*** START OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK 75554 *** Ci commence le livre de l’avision de christine le quel est party en .iii. parties. La premiere partie parle de l’image du monde et les merveilles que elle y vid. Item la seconde partie parle de dame oppinion et de son ombre. Item la tierce partie parle de confort de philosophie. [Illustration: Christine assise en sa maison écrivant un livre.] Premierement dit christine comment son esperit fu transporté. Ja passé avoie la moitié du chemin de mon pelerinage Comme un jour du l’avesprir me trouvasse pour la longue voye lassee et desireuse de hebarge Et comme je y fusse parvenue par appetit de repos apres la reffeccion neccessaire a vie humaine prise et receue dites graces et me recommandant a l’acteur de toutes choses entray en lit de repos traveillable Et comme tost apres mes sens liez par la pesanteur de somne me survenist merveilleuse avision en signe d’estrange presage/ tout ne soie mie nabugodonosor Scipion ne joseph/ ne sont point veez les secrés du tres hault aux bien simples. ¶ Avis m’estoit que mon esperit laissoit son corps et par exemple tout ainsi que mainte foiz en songe m’a semblé que mon corps en l’air volast/ m’estoit adonc avis que par le soufflement de divers vens mon esperit translatez estoit en une contree tenebreuse en la quelle terminoit un val flotant sus diverses eaues. La m’aparoit l’estature d’un homme de belle fourme mais de grandeur inextimable/ Car sa teste tresparçoit les nues Ses piés marchoient les abeysmes/ et son ventre avironnoit toute la terre/ clere face et sanguine avoit. aux coins de son chief donnoient aournemens innombrables estoilles/ de la beauté de ses yeulx issoit si grant clarté que tout l’enluminoit et jusques aux entrailles de son corps reverberoit leur clarté. l’aspiracion de sa tres grant gueule attrayoit si grant air et vent que tout en estoit remplis de couvenable frescheur .ii. conduis principaulx avoit cest ymage l’un estoit le pertuis de sa gueule par ou recevoit sa nourriture/ et l’autre estoit dessoubz par ou se purgioit et vuidoit/ mais de differens natures estoient yces .ii. Car tout ce qui entroit par le conduit hault par ou repeus estoit couvenoit que corps materiel et corruptible eust/ mais par l’autre conduit ne passoit riens fraisle ne palpable. la vesteure de ceste creature estoit dyapree de toutes coulours/ tressoubtilment ouvree. belle riche et de longue duree. en son front bien pourtrait avoit l’emprainte de .v. lettres. c’est assavoir .C.h.a.o.z. qui son nom signifioyent/ En ceste statue n’avoit riens de diffourme Exepté que par fois faisoit chiere triste adoulee et plourable tout ainsi comme homme qui par diverses parties de son corps sent et seuffre diverses passions et doulours pour la quelle chose jectoit grans plains et a dieu lamentacions par divers crys. Ci dit l’ordre comment le dit ymage estoit repeus. Delez le dit ymage avoit assistant une grant ombre couronnee de fourme femenine comme se fust la semblance d’une tres poissant royne naturellement formee sans corps visible ne palpable si estoit tant grant qu’elle obombroit et avironnoit tout le corps du devant dit ymage/ du quel estoit singulierement depputee et establie estre l’administraresse de sa nourriture/ Et estoit tel son office/ environ soy avoit instrumens de divers coings et empraintes ainsi comme sont a paris moles a faire gaufres ou autres outilz semblables Et comme ceste dame n’eust en soy le vice de parece l’ocupoit continuellement neccessaire diligence de divers labours/ car sanz prendre repos elle destrampoit mortier qu’elle coaguloit ensemble/ en la quelle mistion mettoit fyel/ myel/ plomb et plume d’ycelle matere en emplissoit bures de diverses façons lesquelles apres versoit en petite quantité es dis moles que bien estouppoit et saeloit/ tout ce fait non d’une guise mais en diverses differences metoit tout cuire et confire en la gueule du dit grant ymage qui tant estoit lee que elle representoit une grant fournase chauffee en maniere d’attrempees estuves/ la les laissoit jusques a temps couvenable l’un plus que l’autre selon la difference et la grosseur des outilz/ apres le temps venu que la sage administraresse savoit le terme de la perfection de son oeuvre elle ouvroit la bouche de cel ymage par tel art que elle donnoit lieu de tirer hors les matieres assez cuites et les autres laissoit cuire jusques a l’acomplissement de leurs jours adont sailloient hors de ces moles petis corps de diverses façons selon les empraintes des instrumens mais merveilleuse aventure en avenoit/ car aussi tost que ces petis ymages laissoient leur moles adont le grant ymage en quel gueule avoient esté cuis les transgloutissoit tous vifs en sa pance. sanz nombre a une goulee/ et ainsi nuit et jour ne cessoit cel ouvrage continue par les mains d’ycelle dame pour la pasture du grant corps insaciable. Comment christine fu transgloutie ou corps du dit ymage. Mon esperit entre gité celle part ententif a notter ceste merveille/ Adont l’aspiracion de l’aleyne de ycellui grant le tira a soy/ tant qu’il chut es mains de la dame couronnee/ Lors comme ja elle eust mis le mole a tout la matiere en la fournase mon esperit prent si le fiche ens/ et tout en la maniere que au corps humain donner fourme accoustumé avoit tout mesla ensemble et ainsi cuire me laissa par quantité de temps tant q’un petit corps humain me fu parfaict/ mais comme le voulsist ainsi celle qui la destrempe avoit faite a la quel cause se tient et non au mole je portay sexe femenin/ Si fus semblablement que les autres soubdainement transgloutie ou ventre de cel ymage/ Quant je fus la trebuchee adont prestement vint la chamberiere de la dicte dame qui bures tenoit d’une liqueur doulce & tres souefve plaines de la quelle a abuvrer doulcement me prist/ par quel vertu et continuacion mon corps de plus en plus prenoit croiscence force et vigueur/ et ycelle sage croisçoit et engrossoit la pasture au feur de ma force tant qu’a par moy porter et paistre mon corps je pos ou quel croisçoit l’entendement qui ja me donnoit cognoiscence de la diversité des entrailles du ventre de l’image par sus les quelles a .ii. piez je marchoye/ lesquelles estoient faites de cailloux et dures roches par montaignes et valees bois et metaulx et diversitez maintes/ mais tant me sembloit longue et lee l’espace de la pourprise d’icellui corps/ que l’espace de la vie d’un homme ne pourroit souffire a toutes cercher les diverses contrees qui en lui sont comprises. Comment elle se transporta de lieu en autre. En cellui temps comme renommee a tout ses cors et buisines eust corné et encore cornast en la contree ou j’estoye/ ce que la et par toutes autres contrees avoit ja par moult lonc temps signifié de rechief a haulte voix ne cessast de cryer/ Ce estoit que elle racontoit le pris/ l’onneur/ la haultece noblece et poissante digneté d’une princesse de grant auctorité/ couronnee de precieux dyademe a ceptre royal de grant ancienneté & richece la quelle seoit vers les parties que on dit fryge/ et pareille n’avoit en beauté noblece vaillance et hault renom en tout l’univers monde/ adont par les cris de fama apres ce que messages certains orent de ceste chose certiffiez ceulx qui m’avoient en bail desirans de tel princesse servir/ se partirent de la/ et ainsi avec eulx marchant par sus les entrailles du dit ymage/ traversant estranges contrees alpes haultaines/ landes sauvages/ forés parfondes et bruyans rivieres Tant cheminay par maintes journees que de loins ja m’aparu la lueur de la marche resplendissant en honneurs ou je tendoye/ Et ainsi appercevant de mieulx en mieulx sa haultece com plus en approchoie parfinay ma longue voye jusques en sa maistre cité/ la quelle estoit nommee la seconde athenes/ adont acompli le travail d’icellui chemin reposant les membres travaillez pourpensoie comment et par quel voye peusse ataindre a l’acointance de la dicte princesse/ mais comme trop jeune ancor fusse ne me savoie appliquer ne mes a apprendre le lengage differant de cellui de mes parens/ neant moins selon la simplece de mes sens non ancore du tout parcreus m’informoie adez des coustumes manieres et condicions de la dicte dame/ Et comme ainsi je le continuasse par l’espace de plusieurs ans croiscent ma retentive/ je fus informee de la haulte poissance et seignourie d’ycelle/ de la quelle pour eschever prolixité en brief je tesmoigne pour verité sanz adjoustement de mençonge/ que sa contree m’aparu glorieuse de nom/ fertile de fruys/ abondant en richeces grande et lee en circuit/ edifiee notablement d’espesses villes/ fors citez/ chasteaulx bours fortereces et tres nobles manoirs comme sanz nombre/ poissans seigneurs princes natureulx non crueulx/ benignes en conversacion catholiques en foy/ prudens en gouvernement/ et beaulx en faconde/ fort et poissant chevalerie/ loyaulx subgés obeissant peuple/ En ycelle marche vrayement toutes ses condicions j’apperceu/ et maintes autres bonnes que cause de briefté ne me seuffre plus dire/ mais comme il ne soit aucun bien sans envie/ voir est que je y vy de grans gastives par places venues et procurees par estranges envieux/ par quoy m’aparoit en celle contree avoir esté et estre par fois de grans et fieres persecucions. L’acointance que elle desiroit a avoir a une dame portant couronne. Ja estoie parcreue quant j’oz tant pourchacié par divers moyens apres maintes aventures que je attaigni a ce que je desiroie Si oz la plaine accointance de la dame renommee/ de la quelle la beauté/ sens & benignité ne seroie souffisant de descripre/ pource me passe seulement d’elle disant que sans faille fama ne tenoie menterresse des bons recors que elle faisoit en toutes places d’elle/ aux quieulx la vraye experience vi accordable. Or fus je la dieu mercy si prochaine privee amie d’elle que de sa grace faveur ot a me descouvrir les secrés de son cuer et n’ot orreur d’ajoindre a moy femme tel honnour comme de me instituer estre philographe de ses aventures/ et volt que par moy oroisons et chançons en fussent faites/ ja estoit informee tant de mes affections comme qui je estoye. La complainte de la dame couronnee a christine. Adont parlant en tel maniere/ dist ainsi Chiere amie amaresse du cultivement de mon bien comme il soit de neccessité en nature que tout cuer amant desserve estre amez/ droit est que Ton bon desir te soit valable/ Et comme il fust affectueux de m’acointance les bons vouloirs de lui soient ottroyez amie a qui dieu et nature ont concedé oultre le commun ordre des femmes le don d’amour d’estude/ appreste parchemin ancre et plume et escrips les paroles issant de ma poitrine Car a toy me vueil je du tout magnifester/ Et me plaist que a tes sages bien vueillans faces d’or en avant present des memoires escriptes de ma digneté. C’est chose nottoire qu’a cil qui bien se veult declarier appartient qu’il speciffie son premier principe/ Si commenceray a l’introyte de mes gestes te narrant ma premiere venue. ¶ Ou temps du Second aage lors que la lignee neptunus regnoit en marche chevalereuse es habitacions aysiees quant pour cause de la fille electee transportee par le pastour mescongnu vindrent les hoirs des fremis chavauchans chevaulx de bois a tout force d’armes furent par l’escu de barat a la fin vainqueurs. Dont d’ycelle terre fu enrachié l’abre d’or que les dieux anciens selon les chançons des poetes avoient reservé pour leur gloire du quel la haultece de l’ombre s’espandoit jusques sus les contrees lontaines/ Si fus lors par estrange fortune favourable a ycelle fremiere desireuse de vengence ars destruis et mis en cendre/ mais non obstant le furieux desir maling d’yceulx fremis furent aucuns cultiveurs desireux de noble semence veant la persecucion de la noble plante qui par soubtil art emblerent et de leurs mains ravirent en assez quantité des vergetes et des gitons cueillis sur le hault sommeton d’ycellui seignouri noble arbre/ Et comme le dieu pelagus fust consentant d’ycel larrecin leur donna voye et passage par sa terre/ Si se transporterent espandans en diverses contrees es quelles par grant digneté les planterent en maint vergiers et firent greffes de nouvelles antes que fort ilz cloyrent d’espineuses hayes pour obvier aux loisirs des rappineurs. Et ainsi maugré les influences fortunees fu renouvellee en plusieurs lieux la haute plante dont puis une vergete tant crut es marches d’europpe en la terre latine que la haultece d’elle obumbra tout le monde et presseda sanz comparoison sa premiere racine. Ci devise la dame couronnee de son commencement. Ou temps des susdiz larrecins entre les autres fu transportee en ceste contree une vergete issue de la cosme du sus dit arbre d’or la quelle ilz planterent en hault vergier en terre fructueuse/ ycelle plante parcreut tant que de la beauté d’elle je pris mon nom/ & fus appellee/ Libera/ apres par multiplicacion de cultivement tant crut et augmenta tous jours en habondance de digneté ce noble estat/ que les plantes ja montees et embelies en leur force couronnerent le .iii.e giton de leur venue et comme le plus auctorisié en firent leur roy/ cestui porta fruit de grant digneté car il sauva ceste terre de maintes enfermetez/ Et ainsi pou a pou crut le renom de sa proprieté en multepliant Si en furent peuplez mains delitables vergiers par espace de multitude de ans en ceste contree/ Et ainsi t’ay compté la premiere racine de mon nom et cultivement/ et te dis certainement que non obstant qu’a veue d’ueil je soye et appere jeune freche nouvelle flourie et belle/ que plus de mil ans a ja passez puis le temps de ma premiere naiscence. Dit la dame couronnee de ses gestes. Le renom de ma franchise ja espandus en toutes places/ les gouverneurs de noble attrace avec leurs enfans me prirent en bail Si fu entregitee entre leurs mains par lonc temps sanz estrange generacion. O dieux glorieux se je te comptoie toutes les aventures courues es annees puis la naiscence de mon nom jusques a ore/ l’espace de ta vie a l’escouter me pourroit souffire Et pour ce en brief te dis que les tuteurs de mon bail assez s’esforcierent d’acroistre la haultece de mon heritage/ mais comme ignorance ancore les tenist tenebreux ne savoient attraire eaue doulce pour pardurable arrosement presenter a mes racinetes et plantes/ par quoy maint seps de vigne & autres tiges toutes sechees & sanz fruit couvint esrachier & ou feu giter/ Et ainsi dura ceste pestillence tant que le .iii.e filz vint le quel par vertu de sage conseil attray lumiere telement que les tenebres de celle mortel secherresse furent chaciees par la quelle voye ot cognoissance de doiz et source de eaue vive a grant habondance si que lui meismes ja tout perdus & sechez en fu arrosez et vivifiez Et tant pourchaça par sages maistres que l’abondance du fleuve vivant rendy ruisseaulx sources & fontaines en si grant quantité que toutes mes plantes en furent arrosees et viviffiees/ O noble cultiveur fu ycellui car moult il augmenta et parcreut la perpetuité de mon heritage/ en telle maniere qu’il fu le premier registre de ma salvable gloire/ es mains de cestui pris grant croiscence et plaisant beauté/ et tant qu’il me dura fus bien deffendue & si gardee et soustenue que chose quelconques ne m’avint senestre. Encore de ce mesmes. Apres cestui cheux es mains des cultiveurs mau diligens par la quel faute la gloire de mes vergiers fu tournee comme en friche remplie d’erbes et graynes inutiles et de nul bon fruit/ Et comme le vice fornicable fust fiché es os de l’eritier d’yceulx dont les causes de ses demerites le rendent exillé transporterent ses voyes en marche fiable piteuse de sa chetivoison. O le mal pechié d’ingratitude qui tolz et ostes le merite et guerredon de benefice receu et estains recordance de remuneracion deue ne fis tu a cellui mettre en oubly toute cause de feauté/ quant frauduleusement souffris fortraire au feal sa beste menterrece des couvenances de son premier lit/ et les nouvelles ouyes de la reconsiliacion du filz de venus a ses persecuteurs par l’enseigne du demi denier fu sa departie en repostailles rappineuse de l’espousee hors ordre de loy doublement couronnee/ de la quelle songerresse la presentacion du temps que tu vois/ peut signiffier l’ordre de ces avisions. ¶ Succedans cestui nasquirent de ses heritiers hommes de sanc plains de couvoitise rappineux et sanz foy qui a leurs parens faisoient presens de mort & d’occisions conseillez et baretez par les crestees crueuses leonesses venues d’espaigne et de cucubinage desquelles vengence n’espargna a leurs membres le trait des poulains/ a partie d’elles accusee du sanc innocent devant le juste. Des bons et des mauvais gouverneurs de la dame couronnee. Apres ces choses d’un pepin du fruit du susdit arbre en ma terre sailli une plante qui tant crut que elle estandoit ses branches verdure et cosme plus lonc pays assez que n’est toute ma terre/ le fruit qui en issoit estoit de grant vertu odeur et force/ car de grace especial dieu lui ot donné proprieté de chacier les malings esperis/ et moult valoit contre perpetuel venim/ Et par cestui furent gardees maintes contrees de inreparable mort dont germanie se dot louer/ et jusques par dela les alpes ytaliennes estendant sa vertu vers la terre de auffrike ha dieux combien je fus renommee flourie et exaussee par la resplandeur et beauté de ceste plante/ Car comme chose perpetuelle non obstant le lonc temps puis passé/ ancore a celle cause est greigneur/ la fleur de ma renommee/ de l’issue de cestui je fus cultivee un espace de temps. ¶ Mais comme apres sa vertu alast en descroiscent vindrent d’estrange attrace les cultiveurs diligens qui se vanterent de greigneur vertu que les proprietaires & par oblique malice couverte et coulouree de jugement apostolique reserverent pour eulx la souveraine chayere posse dans leur lignee ycelle par plusieurs dessendues/ Mais comme entre les espines en friche destournee fust ce/ tandis/ muciee une graislete ante hors saillie de l’ancienne racine renommee/ le temps venu de sa croiscence apparurent les fueilles vertes de sa haultece. ¶ Adont furent estirpees les estranges germes la belle ante subjugant toutes les tiges de mes courtilz flouri en grant reverence de l’issue de lui sailli germe precieux rendant fruit en son temps a dieu sacré et tres agreable or furent les premiers cultiveurs restituez a leur erre ainsi continuans non obstant le lonc temps puis passé jusques a la journee d’uy. O treschiere amie se je te comptoie toutes les tribulacions par lesquelles j’ay esté pourmenee an l’espace des jours que je te compte tu t’esmerveilleroies comment en tel beauté suis demouree/ car pour moy ravir et embler s’assembloient diverses provinces & gens estranges qui a grant ost deffoulerent ma terre/ brulerent mes villes & mes manoirs/ faisoient de mes gens grant essart et toute me pilloient/ et en tres grant quantité de foiz pareillement ay esté en peril d’estre perdue ravie prise a force/ et du tout deshonoree/ non obstant la deffence des assemblees de mes deffendeurs & de ma gent contrestans a la fureur d’iceulx Et ne cuidez pas que de lonc temps soient saillies a moy ycestes dures angoisses souvent renouvellees en diverses guises dont au jour d’uy je ne suis exente mais te dis que mesmement puis l’aage de tes parens si mal menee par divers cas que onques puis ma premiere naiscence ne furent greigneurs les perilz de mes aventures Et a tout regarder de n’estre du tout enchevé es las de perdicion singuliere/ gloire ne attribue fors a dieu tout poissant qui pour cause de ma catholique foy m’a reservee/ tout ainsi qu’il dist a saint pierre que sa nacelle chancelleroit et ne seroit perie ha dieux combien estoient grandes les orreurs de mes tribulacions/ car les ennemis yssus des serves lignees venoient sur moy a grans effors/ Et fortune pour le temps clere/ a eulx consentoit les victoires contre les couronnes qui me deffendoient aux quieulx non obstant leurs grans et nobles courages non reprouchez parmetoit adversitez non deservies/ En ce temps se rebellerent les vers de terre qui pour les marcheys des chevaulx saillirent/ contremont et ou visage me cuiderent deshonorer es jours que mon dispensier estoit es buyes de mes aversaires/ mes vindrent les ecouffles qui firent leur proye du verminier venimeux et abominable/ ha hay comment estoie lors trouble et obscurcie par diverses afflictions dont la lueur de ma beauté qui tant seult estre glorieuse plaisant et saine fu comme morte/ Car n’en yssoit fors plains et plours/ et toutevois de lamentacions que t’en diroye innumerables sont les diverses angoisses qui m’ont traversee par infinies foiz mais la fin d’icelles te sera comptee. Ci parle la dame couronnee du bon gouverneur que elle ot. Comme dieu ouvrist sur moy chastie l’ueil de sa misericorde sicomme pere pitiable de sa tres amee fille volt cesser les verges de ses bateures et espandre l’oeile de sa misericorde sur les navreures de mes maladies adont sourdi le phisicien propice venus par succession a l’eritage de mon ancienneté et ou palais de mes nobleces receu l’aureale de digneté delaissant en jeunes jours les meurs de legiereté vint dame sapience deesse venerable des choses ordenees qui comme chier filz le revesti du mantel de ses proprietez lors disant fuiez fuiez lors voz ennemis de beneurté laissiez venir les remedes de restoracion Tira a soy toutes choses belles en deboutant les diffamables ycellui saisi de l’espee de justice n’espargna mie les outilz de sa mere/ ains par la sentence d’iceulx mist en oeuvre les mains de son hault sommet/ adont armé de courage fructueux trassant par ces courtilz visitant les angles ja couvers d’espineuses tiges donna ordre a ses commis de la reparacion des ruynes/ lors par quantité de Cens et de millers furent les assemblees d’yceulz alouez non estranges mais privez loyaulz subgez qui a tout fers agus de diverses tailles s’embatoient es gastives remplies d’estranges semences non propices a la nature de mes hommes qui vergiers portans fruit estre souloient. adont se prirent a estirper de tous lez les inutiles herbes chardons orties et toute male racine derompre et sacher hors et a tout nettoyer et faire nouvel gueret ou ilz anterent et attrayrent bonnes semences ainsi continuant le labourage droiturier donnerent lieu aux herbetes et doulces plantelettes de saillir hors de tapinage ou muciez orent esté soubz les espines qui toutes les suffoquoyent Comme peryes en leur vertu/ qui les veist adonc croistre et augmenter et remplir ces vergiers de verdures et flours odorans portans fruit bien deist que moult fust changiee la fortune de leur estre que t’en diroye ne fu mie cellui recreu par les liens de peccune qui n’avoient lieu contre les distribucions de ses ordres/ ne travail estaignoit l’excercite de la chose utile a la quelle oeuvre fortune non reppunante fu/ a l’accomplissement d’ycelle continuee par l’espace des jours du prouffitable ortelain qui n’y espargnoit ses ententes/ O dieu glorieux quel ouvrier comment fus je par lui en joye renouvellee Or furent oubliees les passees angoisses toute ma terre de choses nuisibles auques descombree se prist a esjouyr rendant chançonnettes a la louenge d’ycellui noble par la quel diligence estoie recouvree et mise en convalescence/ a brief parler tant me fu cellui propice que encore m’esjouist la souvenance de ses benefices dont longue parole ne m’en pourroit estre anvieuse/ helas mais comme apres le temps sery viengne souvent la grosse pluye Couvient a present changier le propos de mes ris en tresamers pleurs/ Car comme le procés de fortune ne peust longuement souffrir ma beneurté se monstrant envieuse de mon bien/ lors que ma gloire estoit eslevee plus que n’avoit esté puis une grant part de mon aage/ me toli le tressage administreur lasse moy/ mal apoint ains le temps venu de l’achevement naturel de son voyage/ et envoya Celle qui n’espargne nulz corps vivans le me tolir et ravir sanz pitié avoir de ma vesveté/ Or peus tu cognoistre en moy les signes des mouvemens fortunez qui ores ryoye parlant de mon amant/ Or me voyes a chiere troublee plaines de larmes regraitter les trop tost faillis a moy ses vertus Si couvient changier l’ordre de mes offices en mutacions merveilleuses/ mais toutevoye la lueur de ses benefices apres lui demoura sur terre tant que non obstant les antregetz de plusieurs mains en dure ancore la clarté sus le plus bel de ma face. De .ii. nobles oyseaulx de proye. Sourdi des entrailles d’icellui en double nombre petis papillons dorez tresgracieux et de grant beauté qui s’oserent vanter au feur de leur croiscence avec les colacions des guespes d’estre gardeurs de moy et de mes manoirs/ Si firent leurs assemblees et pour l’ancien renom de leur venue a bon droit leur fu souffert seoir sus les sommetons des plus hautes tiges/ Et tout ainsi comme le proprietaire dit du phenix qui au premier ist hors de la cendre en fourme d’un petit ver/ puis croist & augmente tant qu’il est bel sur tous oyseaulx/ yceulx papeillons tant parcreurent & enforcierent que leur forme fu changee en especes de tres nobles oyseaulx de proye mais par difference aucune quantité de ceulx furent crestez sur les chiefs/ ainsi que sont oyseaulx que on dit huppés/ yceulx nobles pour aviser leurs proyes se tindrent ensemble et prirent leur vol par sus mes fossez et rivieres/ et comme bien avisez n’orent mie conseil de tout essarter les repaires repaisans/ mais eulx en passer rassadiez couvenablement/ O fortune aministraresse de tout inconvenient qui te mut a trouver voye du destourbier du faucon pelerin si hault volant que l’esperance de son attainte faisoit trembler devant lui toutes les proyes rappineuses embatues en son yre/ ou pris tu le vent contraire par ou tu l’abatis lors qu’il faisoit sa roe par si grant fierté/ ains qu’il eust sa proie attainte le ruas jus par ton soufflement si roidement qu’il demoura estendu du tout derompt non mie seulement les plumes mais tout le corps par si que tous jours depuis couvint qu’il fust repeus par estranges mains. O dieux quel dommage de tant noble oysel affaitié en toutes bonnes coustumes/ fier et hardy en son vol/ doulx en appel vif et plaisant en regart/ Et qui sans faille eust deffendu toutes mes flaches et rivieres de tous oyseaulx rappineulz et de mal erre Si fu de moy plaint et plourez grandement comme perte singuliere le quel dommage ne m’est faillis ains renouvellé par chacun jour par griefves pertes. Ci dit la dame couronnee des contens qui furent pour elle gouverner. Apres ces choses vindrent les esperis larrecineux habitans es silves qui distrent qu’a eulx appartenoit a departir les choses propres et privees/ yceulx firent des communs usages closes mansions/ et a eulx les approprierent et tant que mesmement les sauvagines cryerent contre eulx. ¶ En cellui temps par le cry du camellion s’esveillerent une maniere de gent de reprouvee generacion qui dirent qu’ilz ne souffreroient mie l’injurieuse clamour des voix femenines si entrerent es maisons des oyseaulx de leurs forés et tant y furent que volans elles leur furent donnees par ycelles en plusieurs parties se translaterent/ jusques dedens les cavernes des traysons de mes bois/ Si cueillirent les glans des chesnes et mirent ou feu les povres qu’ilz trouverent & a tout ce faire ne trouverent contredit/ ains furent hourdez des degouttes de mes terres. ¶ Multiplié fu l’erreur par divers inconveniens/ car le temps vint que les eaues tant crurent qu’il ne demoura champ qui tout couvert n’en fust. Adont les poissons saillis hors de leurs fosses paissoient es terres semees/ jusques a devourer apres la verdure des herbes les racines des grains/ toutes ces choses representoient naiscence de pestillence. Ha doulce chiere amie jusques cy t’ay compté grant part de mes aventures diversement de joye en dueil entregitees mais comme je ne puisse tout dire ensemble n’est mie faillis encore le lengage angoisseus d’icelles ains a chiere amatye or a primes m’esteut te dire la doulereuse encloeure de mes presens tenebres qui precede les autres en cas que perseverence y seroit longue. Ci se plaint la dame de ses Enfans. Quelle plus grant perplexité peut venir en cuer de mere que veoir yre et contens naistre et continuer jusques au point d’armes de guerre/ prendre et saisir par assemblees entre ses propres enfans legitimes et de loyaulx peres & a tant monter leur felonnie qu’ilz n’ayent regart a la desolacion de leur povre mere qui comme piteuse de sa porteure se fiche entre .ii. pour departir leurs batailles/ mais yceulz meus par courages inanimez sans espargne n’avoir regart a honneur maternelle/ ne destournent le trippignis de leurs chevaulx contre sa reverence ains laissent aler la foule de leurs assemblees sur elle tant que toute la debrisent et mahaignent. ¶ Ne furent mie si crueulx jadis romulus et sa compaignie quant pour cause du ravissement des filles de sabine fait par yceulx rommains s’assemblerent a grant ost les peres et parens pour venger celle honte/ mais comme la royne et toutes les dames piteuses de l’effusion de sanc de leurs maris peres & parens eschevelees a pleurs et cris se venissent ficher entre les batailles lors que assembler devoient/ priant pour dieu que paix feissent/ ne furent mie d’iceulx chevaliers fors et poissans/ les dames defoulees entre les piez des chevaulx ains par reverence espargnees et ouyes en pitié leurs voix femenines qui leurs cuers contraigny meismes ou champ a faire paix. O amie voy cy la suppellative des douleurs. ¶ Adont ycelle princesse/ je vy toute couvrir de larmes/ & sa belle chiere qui estre souloit fresche & coulouree toute destainte & noircye/ ainsi disant lasse lasse je suis celle mere amere en cheute es cas que je te compte. O ma bonne nourrie et chere amie compaigne de mon dueil/ tu ne soies tu mie du fruit de ma terre mais ton cuer de noble nature non ingrat des biens que y as receux/ pleures avec moy par vraye amistié piteuse de veoir les jours de ma tribulacion Et que experience te face certaine de la verité de mes narracions/ non obstant ma beauté de prime face/ regarde et avise les playes de mes costez et de mes membres. ¶ Adont la tres venerable princesse haulce le pan de sa vesteure et a moy descueuvre le nu de ses costez disant regarde Lors ma veue tournee celle part comme j’avisasse les costez blans et tendres par force de presse et de desfoulement noircis et betez & par lieux encavez auques jusques aux entrailles/ non mie tranchez de coups d’espee mais froissez par force de grans foulez. ¶ Adont moy toute esmarie considerant le nouvel cas piteux et non honorable que a mere tant venerable tieulx blesseures fussent procurees par ses porteures/ En disant dame pour dieu couvrez cheux comme femme foible remplie de merveilleuse pitié comme pasmee/ Et couverte de larmes quant parler pos/ pris au mieulx que soz a conforter la desolee/ disant haulte renommee dame vueillés en dieu remettre les larmes de voz lamentacions esperant sa misericorde qui onques ne vous fu falible/ Et pour un pou eslongner les pensees qui a tieulx sanglous vous conduisent vous plaise tant honorer moy vostre povre indigne serve affin qu’entente de parler vous entre oublie que descouvrir me vueillés les encloueures des causes de ces zezanies/ Et ne vous soit estrange de dire a moy vostre familiere et privee les fautes de voz porteures et elle a moy. ha chiere amie se je blasmoie ceulx que je fais mon meismes ouvrage je diffameroye. Si te dis qu’acusacion de mauvaistie formee en malice a nul je ne donne ne que pour despit ne hayne que contre moy eussent ne sont a ceste chose meus. bien est vray que considerant que je sui le lit de leur estre et que a cause de moy vient la lueur de leur gloire/ deussent refrener les assaulz qui tant me sont grevables et la naissance de la racine de zezanye entre eulx semee te compteray. ¶ Apres ce que les partages de mon propre selon les coustumes d’athenes furent a chacun de mes engendrez sorties/ dist le plus grant qu’a lui appartenoit le bail de son mainsné/ et comme ne lui fust contre dit les establissemens d’icellui crierent contre lui/ dont les voix ouyes assemblerent le sanc du pupille en conseil. ¶ Adont mes enfans s’amasserent disant nequaquam aux oppinions d’icellui/ Ceste cause assembla les fleaulx de mes bateures qui ne m’ont espargnee Sicomme il t’est magnifeste/ Ceste orreur courant au jourd’uy parmi mes gaignages rent fletries et sechees les verdures et liqueurs de mes fruis tarist mes fontaines amendrist mon renom et lourdement me tourmente et qui plus m’est grief/ c’est la paour de pis/ & que mes playes par faulte de remede soient converties comme infistulees et incurables. Ci dit comment les vertus au monde sont emprisonnees. Encore autre part gist la maladie amie chiere/ car comme il ne soit a celle douleur pareille qui le cuer tient en amere pensee. Reste a te dire les combles de mes souffrettes. ¶ N’a pas souffit aux menistres de perdicion les oprobres offers a la souche d’antiquité/ ainçois m’ont plus deshonoree. ¶ Helas ou est la princesse a moy esgale qui peust souffrir veoir d’environ soy a tres grant tort tolues chaciees batues banies et emprisonnees ses dames de compaignie & de parage venerables & de grant dignité d’ancien droit establies a estre appellees a ses conseuls a porter les seaulx de ses ordenances/ a soustenir les pans de ses loncs abis & les dorures de son chief/ et mettre en leur lieu paillardelles & femmes diffamees et dissolues/ helas chiere amie ce suis je qui a toy parle mais que mieulx me croyes vueil que le sens de ta veue ait l’experience du vray de ma parole/ Adont comme elle ouvrist une petite fenestrele me dist regarde les prisonnieres/ ton sens soit juge se en palaix royaulx la presentacion de leur reverence seroit plus propre que soubz muciees couvertures. avisez celles qui ja me gouvernerent ou temps de ma joye or les m’ont ravies les persecuteurs de ma gloire. ¶ Adont comme mon oeil adreçasse au pertuis de la chartre .iii. dames vy de souveraine reverence et beauté mais differens leurs maintiens estoient/ ha dieux quelle divine beauté en l’une vy le corps avoir droit lonc et bien fait/ et de la beauté de son vis yssoit un ray de moult grant resplandeur/ celle dame en sa main un grant mirouer tres cler tenoit/ ou quel la reverberacion du dit ray redondoit et se frapoit en maniere que si grant beauté et clarté en issoit qu’englet n’y avoit tant obscur que tout n’en fust enluminez. Ha quel pitié de tel beauté tenir couverte/ comment fust elle seant es places des assemblees publiques affin que chacun se peust louer de sa lumiere/ ceste fu belle par excellence/ mais trop plus noble car elle se disoit fille de dieu le pere et plus forte qu’autre riens/ car de toutes choses vaincre se vantoit. ¶ En un lit couchiee palle et descoulouree vy une autre dame de grant auctorité a chiere et semblant de femme maladive et enferme comme chose deffoulee et desroupte/ et a la premiere se disoit serour a son costé d’estre je vy gisant unes balances/ De l’autre part une mesure et une ligne. ¶ Assez loignet d’icelles vi gesir par terre endormie non honorablement une dame de grant et fourni corsage la quelle estoit toute armee/ costé soy gisant par terre avoit son escu sa lance et ses esperons/ sa teste tenoit ou giron d’une folieuse femme de grant vagueté qui pour lui mieulx endormir chantoit et li gratoit le chief Lors comme je regardasse par grant entente cestes merveilleuses figures vi que/ par plusieurs foiz vindrent de plusieurs pars en maintes flotes les ennemis/ les uns cryoient a haultes voix a la dame endormie qu’elle se deffendist/ & celle adont un petit remouvoit son chief et entre ouvroit un oeil/ et lors la folieuse femme s’efforçoit de lui rendormir Revenoit l’autre tourbe lui crier en l’oreille/ et celle toute estourdie sourdoit son chief/ & la folle de rechief par son chant l’endormoit: Revenoient les autres qui grans coups frapoient en son escu/ et celle se levoit toute droite pour courir apres/ mais la deshoneste la prenoit par le col et la rendormoit/ venoient les plus fors lui courir sus et la batoient/ adont celle se levoit comme enragiee/ et juroit par sa force qu’elle occiroit tout/ si leur lançoit a coup ce que tenir povoit et plusieurs en occioit et souvent chaçoit et souvent chacee estoit/ mais a son refrain revenoit a son giste qu’elle laissier ne povoit. Ci dit des vices qui queurent en general. Ainsi comme je regardoie ycestes choses me dist la dame la vois tu la vois tu l’ebaluffree deshonnesté qui ma gent me honnist/ ceulx de ma deffence endort plusieurs de mon palais dont auques est maistresse met a honte/ helas et ou temps du sain renom de ma felicité veoir ne trouver si osast mais ne cuides mie pourtant se cy la vois a requoy pour tenir en prison endormie/ La dame armee/ que tous jours si tiengne/ Car elle a filles ses semblables a grant quantité de diverses guises/ Si en laisse foison environ celle qui se dort et trassant s’en va par toutes mes citez et villes & en toutes places ou gent s’assemblent pour cerchier qui elle pourra tirer a sa honteuse cordelle et se tres grant contredit n’y treuve/ lieu n’est ou par sa presompcion ne se vueille embatre/ et mesmement es secretes chambres de mes femmes/ se tant sages ne sont que par grant vigueur lui sachent deffendre/ Or regarde seur doulce quel compaignie est dame d’onneur bien paree de tel damoiselle/ mais ancore vueil que tu voies comment de .ii. dames infernales que dieux confonde m’ont acompaignee/ avises environ ceste chartre voy l’office de la desloyale qui pour son inutile travail reçoit grant gages. ¶ Adont hors de la chartre/ me monstre une orde vielle laide et terrible qui sans repos de tel office s’entremettoit/ environ la chartre nuit et jour traçoit plain giron de mousse que secourcie avoit/ la espioit par grant entente que la force de la resplendeur du miroir luisant qui ens estoit ne persast le mur/ et si tost que par aucun pertuis en veoit saillir goute tantost la mousse y fichoit & fort l’estoupoit si que point issir n’en laissoit. ¶ Et je qui veant celle faulse solicitude ne me pos taire/ dis a ma maistrece/ dame pour dieu me dites comment s’appelle ceste ennemie de vertu/ car combien que des autres demander me soie teue pource que leurs offices les me font magnifestes & bien cognoistre de ceste non mie pour m’en accointier mais pour m’en garder vous requier que le sache/ Et celle a moy doulce amie puis que celle qui le cler miroir tient cognois/ son contraire est celle qui estaindre la veult ne deusses ignorer/ mais bien me plaist que le saches/ Si te di que c’est dame fraude dame fraude que dieu confonde Adont hault m’escriay/ ha desloyal ennemie de verité qui cy t’a menee/ ne te vid pas en fourme d’orrible serpent a longue queue jadis Le tressage poete dant de flourence sus les palus d’enfer quant la le convoya virgille sicomme en son livre recite/ et tu es cy saillie/ mieulx t’advisist accompaigner proserpine avec thesiphone alecto et megera deesses de rage infernale qu’estre establie a ceste court. Adont me dist la dame/ or te tays encor verras/ lors hault ou palais me maine en une grant chambre toute plaine de coffres serrez en la quelle vi une dame vielle palle rechignee maigre et seche et de tres laide estature mais sur toute riens m’esmerveilla la façon de ses mains qui grandes estoient a desmesure et si fortes que ce que elle tenoit n’estoit nul qui le peust avoir/ n’esrachier/ fors a grant peine/ Les ongles avoit longues aguës & crochues comme celles de griffon/ mais ce trop m’espoventa que toutes ensanglantees les avoit ycelles ongles en façon de croches fichoit partout ou embatre les povoit fust en ordure ou char de gens ne lui chaloit ou puis tiroit a soy de partout sachoit argent Et que par experience le sache comme la entree je fusse onques la dame ou qui j’estoie si ne m’en sot garder que celles sanglantes ongles ne s’estendissent jusques a moy si que des plumes m’esracherent jusques au vif dont me dolu et tout cel avoir fichoit en coffres/ regarde amie quel office dit la dame Suis je bien accompaignee/ si saches que ceste est celle par qui gist malade en mauvais point au lit emprisonnee et groucier n’ose la tres droituriere fille de dieu que as veu la jus en celle chartre/ et ceste est mise oultre mon gré en son lieu en ma compaignie/ Et ainsi comme ouyr peus m’ont esté ravies mes bien amees dames de compaignie venues du ciel/ et en leur lieu mises cestes perverses prises es infernales contrees si jugez amie tout mon fait veu se joyeuse dois estre. ¶ Encore y a il autre chose qui m’est grevable et moult m’anuye Car comme je doie amer sicomme je fois naturellement ma porteure et mes chiers nourris et loyaulx subgés/ Trop suis dolente d’une grieve maladie comme incurable se de dieu par grace ne vient la medicine qui est commune par toute matiere et par especial plus qu’es petis entre les plus grans/ la cause t’en diray et que ce est. Il est voir que un soubtil vent es montaignes plus que es valees cy environ court & pres de cy le quel est tant envenimez que toute personne qui ferus en est devient groz et enflez Or avient il que les plus poissans demeurent hault es grans dongions et eslevez domiciles si reçoivent a descouvert et a plain le soufflement du dit vent/ Et aussi comme ilz soient plus deliquatis que les plus communs hommes par leur vie qui plus est deliee/ plus sont disposez a recevoir ycellui vent plus penetratif en eulx qu’en autres hommes/ & se de ceste chose te prens garde assez en verras d’infects de ceste diverse egritude/ et pou en sont reservez se par sage provision de y mettre ostacle ne les en garde/ ainsi en y a de sains par tel prudence/ mais c’est petit/ toutefoiz de moins et plus les uns que les autres selon ce qu’ilz seront ferus et disposez en y a de malades/ Si est sicomme ceste pestilence qui pis vault que epidimie par toute ma terre que c’est pitié/ & mesmement les serviteurs n’en sont communement mie sains Ains comme mains de leur maistres ilz s’en gardent sont moult en y a plus enflez Tel proprieté a celle enfleure qu’elle change regart contenance et parole et la personne rent desdaigneuse et trop despite/ et tant engrige souvent avient en maint en y a que a trop cruelle mort et sanz respit elle les conduit/ Si est tant comme ceste playe non mendre que celles d’egipte en mon royaume que grans moyens et petis jusques aux vermissiaulx de terre communement en sont frappez/ & tant que les contrees estranges le reprochent & rempreuvent a mes subgez. Du vent de perdicion qui cuert par la terre. De l’enfleure de ceste maladie qui ainsi court par my ma terre & de l’inconvenient ou elle tire et qu’il s’en ensuivra recite le prophete danyel ou .iiii.e chapitre l’avision que vid jadis l’orguilleux roy nabugodonosor. Il veoit ce dit un arbre qui tant estoit hault/ grant/ & eslevé que jusques au ciel attaignoit/ si branchu estoit que ses branches s’estendoient de tous lez du monde/ de la grant planté du fruit de cel arbre estoit remplie communement toute mondainne creature/ en ces branches faisoient leurs nids les oyseaulx de l’air/ et desoubz elles se reconçoient les bestes de terre Et puis veue/ ceste chose une haute voix du ciel cryant ouoit qui commandoit que au lez de terre l’en coppast ycellui arbre/ et que tout on l’ebranchast et s’en volassent les oyseaulx & les bestes se departissent/ et fust le fruit dispers et perdus. ¶ Cestui dit arbre les enflez devant diz tres poissans qui sont logiez es haulx dongions de ma terre reçoivent le vent de perdicion/ signifie lesquieulx sont de si grant estat force et poissance que a pou cuident ataindre au ciel et tant les rent infects l’enfleure du dit vent que non pas seulement contre les creatures leurs courages sont gros qui remplis de desdaing les demonstre mais aussi contre dieu et son eglise ce que les branches s’estendoient par le monde c’est que yceulx enflez la force de leur poissance par toutes terres estendent pour la quel force par tout sont redoubtez & crains/ Les oysiaulx s’i nichoient et les bestes s’i ombroyent/ c’est que l’espirituel et le temporel veulent subjuguer gouverner et traire a eulx l’abondance du fruit de cel abre/ c’est ycelle detestable contagieuse maladie qui communnement est en toute gent. ¶ Ceste prophecie signiffia la dicte enfermeté/ mais or entens la diffinicion de sa sentence et l’exposicion de la mort et fin d’icelle/ la voix crya du ciel qu’au lez de terre fust l’abre coppez et estirpez/ c’est que par voulenté de dieu la force et poissance d’yceulz enflez finera & sera retranchee les degitant de leurs haultesces les branches qui seront esmondees et les oysiaulx et bestes qui se partiront/ C’est que leur force faillie leurs subgiés et ceulx qui pour les cruaultez des desdaings de leurs enfleures les craignent et doubtent/ les lairont en leur persecucion/ le fruit qui sera dispars c’est leur semblables menus membres pareillement enflés qui seront humiliez/ Et adonc sera certiffié la prophecie de la vierge qui dit/ _Deposuit potentes de sede et exaltavit humiles_. De la punicion des vices. Escoute aussi de rechief la belle louange des .iii. damoiselles diffamees qui en lieu de mes .iii. tres amees emprisonnees que tu as veues la en bas/ m’ot esté pour m’acompaigner baillees/ & avisez se resjouir me doy de compaignie de si honteuse fame/ et toutevoyes nottes a quelle fin terminoit. ¶ De celle premierement que tu vois qui en son giron tenoit la dame armee & qui tant mes subgés et les miens corrompt & sustrait/ Entens l’avision comment en esperit de prophecie la vid le prophete zacarye comme il recite en son livre ou cinquiesme chapitre. ¶ Une femme dist il veoye ou milieu assise d’une bure remplie d’eaue/ & tenoit celle une grosse masse de plomb qu’en sa gueule boutoit/ et puis .ii. autres femmes je veoye qui avoient elles semblables a elles descouffle. ycelles prinrent la dicte bure ou la femme assise estoit & entre le ciel et la terre la portoient/ adont dist il a l’ange demanday qui celle vision me monstroit ou ses femmes la bure atout la femme assise en l’eaue portoient/ & cil me respondi. Ut edificetur sibi domus in terra sennaar/ il la portent dist il pour lui ediffier la une maison en la terre de sennaar/ par ceste prophecie est entendue la deshonnesté dessus dicte et toute personne que elle a tiree a sa cordelle/ la quelle en toutes plaisances et delis charneulz est de eslargir espandre et laissier couler determinee/ tout ainsi comme les eaues sont fluentes et decourans/ la masse de plomb la quelle est metal pesant et grief que elle en sa gueule lançoit est entendu la griefté de l’offence de dieu & la honte vituperable qui tant est ponderant et grieve que fait commettre la deshonnesté a ceulx et celles qu’elle enveloppe en ses laceures. Les .ii. femmes qui esles avoient et portoient la dicte femme assise sont .ii. mauvaises habondances qui portent et soustiennent en voulenté d’eulx espandre en toutes plaisances et charneulx delis/ celle et les siens. La premiere femme est a entendre de delices habondance/ si a .ii. esles comme oysel qui la portent/ c’est assavoir gloutonnie qui fors menger et boire viandes glouttes ne queroit/ L’autre aelle est parece qui ne veult que jouer & avoir repos/ La seconde femme est de richeces grant abondance/ si a .ii. autres esles c’est assavoir rapine qui ne veult fors tolir l’autruy/ L’autre aelle est cruaulté qui ne scet avoir de nul compassion/ cestes aelles estoient a celles descouffle semblables/ car ainsi que cil oysel ne vit que de proye rappineuse/ ainsi a tele mauvaise abondance de richeces communement vient on par extorcions et rapines/ Or est descripte ceste perverse deshonnesté selon la prophecie zacharie/ mais la fin quelle en sera qu’en feront celles qui flotant es eaues la portent ilz la porteront en la terre de sennaar pour la lui ediffier sa maison/ sennaar vault autant a dire comme fetor c’est punaisie qui est la honte & confusion ou ycelles l’amenront/ et en la fin lui ediffieront sa maison en l’abitacion d’enfer ou a punaisie et perpetuele orreur. Encore de ce mesmes & complainte de la dame. O chiere amie et de la desloyale de dieu haye la parfaicte ennemie du faulx office la quelle bouche et estoupe la lumiere de verité sicomme autour de la chartre tu as veu/ Et que dirons nous car de son malefice helas je me dueil/ ne vois tu comment or y prens garde de s’alaine corrupte tout est noirci/ Je enrage d’ire quant je lui voy giter les loz de mes partages non pas par sort/ mais par malice assise a traire finances de diverses buches pour fournir le feu qui ne peut estanchier en mes palais la plus hault assise establir ses ordres plains de desraison et nul grosser n’en ose/ quant je voy la hideuse voillee de malice paistre les mauvais et ceulx de sa sorte et destruire les simples & qu’en puis je dire fors cryer a dieu car les souverains de mes ordonnances sont ses aliez. O dieux quel playe a moy adoulee avec mes autres griefs. Je suis comme la vesve de bon per delaissiee a qui chacun cuert sure et nul n’en a pitié/ et que sont devenus les champions de droit ne s’en sont ilz fuis/ & s’aucun en y a la faulce desloyale ne leur laisse sortir leur droiturier effait/ voyez voyez tous mes loyaulx amis comment suis gouvernee par ce que j’ay perdu la joye de mon chief/ Et ce fait ceste faulse qui n’y regarde droit pour ce que demouree comme brebis sanz pastre suis sans joye d’ami Bien doy estre perplesse quant je voy ma lignee d’icelle avironnee qui leur donne conseil de ses desloyaulx voyes/ est il chose plus laide que ce qu’elle maintient comment si fol est homme qu’il n’avise sa fin. O avuglee guespe ta pointure perverse mainte gent persecute/ Tu es soubtille en oeuvre malice te gouverne & barat tient le glaive de ceulx de ta justice/ Or n’est il homme si sage qui en tous cas t’avise car tu te transfigures en trop estranges fourmes si vas traçant par ville par palais & par sales & par toutes mes places riens sanz toy ne demeure/ & chacun envenimes de ta pouldre couverte. O dieux jusques a quant durera ceste guerre/ mais je me reconforte sire par la figure qui m’en est prophecie de xanson le tres fort. ¶ Ainsi souspirant par semblant de grant douleur dist ceste complainte la tres honoree princesse/ & quant ces choses ot dites comme femme lassee et de dueil surmontee couverte de larmes si que parler plus ne pot se taisoit quoye et moy qui ses maintiens regardoie comme compaigne de son plour par pitié de sa reverence/ et qui de bon cueur y remediasse s’a moy en fust lui dis ainsi. De ce mesmes. Ha dame tres redoubtee et digne comme il appartiengne a la haulteur de vostre force monstrer la tendreur des femenins courages/ laissez en paix les larmes non propices a vostre constance et plus avant me dites de ce que touché avez/ c’est assavoir la figure ramenteue de sanxon le fort/ la quelle s’il vous plait m’exposez/ Et elle a moy amie comme le temps de la destruccion de la faulse fallacieuse et de ses desloyaulx enfans/ je desire me resjouiray en celle attente le te disant/ il est escript ou .xv.e chapitre ou livre des juges d’israel comme prophecie et figure du desertement de mon ennemie et de ses complices qui comme psanxon le quel est interprete comme _sol fortis_/ c’est a dire le souleil fort eust lonc temps par les malices des philiciens ou ceste faulse regnoit/ esté parcecutez vint le temps que dieu lui ouvri la voie du reparement de ses adversitez par droituriere vengence/ adont prist cellui psanxon plusieurs goupilz ou renars et ensemble les accoupla par les queues les uns aux autres les lya/ Et comme il fust ja la nuit venue ou premier somme gita ses renars es maisons plaines de fains de ses ennemis partie d’iceulx renars et les autres chaça es blez des champs et en leurs bois et en leurs vignes/ et par celle voye sicomme dieu volt furent les filz de la desloyalle et elle avec eulx/ En celle partie mors destruis et ars en leurs pechiez. O amie chiere nottez la prophecie du temps de ma gloire. ¶ Quant ceste desloyale assez m’ara chastiee Si que dieu vouldra sa pugnicion cesser/ & les crys de mes plains seront par pitié devant dieu portez Sicomme jadis furent ceulx des enfans d’israel lors que olofernes a tout sa grant force assegiez les avoit/ Adont psanxon c’est le souleil fort s’avisera de grant malice contre ses ennemis cessera un de mes filz cler comme le souleil fort Car le souleil de justice en lui abitera/ cellui destruira ses ennemis par estrange malice/ c’est assavoir les enfans de la fraudulente ennemis de sa vertu qui ma terre et moy par lonc temps ont persecutee/ si prendra renars & queue a queue les acouplera et entre eulx mettra brandons de feu/ puis les getera par nuit sus les desloyaulx & en leurs gaignages & tout bruslera et mourront en leurs iniquitez/ les renars sont les soubtilz avis de son meismes sens que il prendra que il queue a queue accoupplera/ Ce sont plusieurs poins par quoy il les prendra en leur malice/ il mettra brandons de feu entre .ii. c’est la punicion de leur meffais & que par droituriere justice il leur baillera/ il les gettera sur eulx quant nuit sera venue et ou premier somme c’est quant le terme de leur punicion sera venu/ & qu’ilz seront endormis en leur perseverence il getera partie des renars en leurs blez et gaignages C’est que l’avoir mal acquis qu’ilz ont par le sens d’icellui sera distribuez es mains des droiz heritiers. Encore du vitupere des vices en general. Mais de celle aux ordes ongles et qui tant courbes les a ou quel faulx gouvernement tu vois les mouchettes de mes ruches qui pervertist le miel de leur cire en sauvage amertume que t’en diray je n’as tu sentu l’experience de son office/ deust se dieux t’ayst tel monstre estre trouvé en ma maison pour mes enfans m’empoisonner & pervertir et si villainement sustraire et par faulce amonicion de ses flateries les rendre deshonorez par sa fame villaine qui rent ses acointes en ciel et en terre tous diffamez/ Est il riens plus blamé que l’estre ou elle abite tant soit le lieu sacré d’autre vertu/ helas ne deust pas estre cy assise Car qui qu’elle accompaigne ne lui affiert mie s’embatre en mes proprietez. Ha beste orrible et venimeuse comment as tu fait si mortel sault comme du puis de enfer ou est ta naturel demeure jusques es courages de mes enfans en qui habiter ne souloies/ ou sont alez mes anciennes vertueuses portieres pitié et charité quant empeschee n’ont ta hardiece/ Or me pasme le cuer de yre voyant ta cruauté qui ne donne lieu a nulle vertu/ mais sanz misericorde esrache les fruis ains qu’ilz soient meurs de leur tige/ ce fait ta felonnie assise es combles de ma maison/ Et sicomme dit le proverbe maisgnee duite selon seigneur les menistres d’iniquité suivent la trace de leurs chiefs par tes fallaces/ et de toy perverse qui tiens les clefs a force de mes escrins les oeuvres et serres a ton vouloir a leur grant vitupere et prejudice en font leur parement O moleste du monde/ tu sancsue infernale qui te pourra assez vituperer/ n’es tu pas celle donques qui livres matiere aux tourmens d’enfer et qui de cryer ne cesses affer affer/ fournase insaciable et inestainsible qui te pourra assouvir n’a ja ton ardant feu pire que gregois espris mes plus cheres choses Et ja te voy si effrontee et magnifestement publique que nulle vergongne ne te tapist/ ne ceulx ne se hontoient tant sont endurcis que tu compaignes. ¶ Ha bien prophetisa le temps que je voy et le lieu ou tu es en ces proverbes salomon .xxx.e Chapitre ou il dit ainsi. ¶ _Generacio que pro dentibus gladios habet ut comedat inopes de terra et pauperes ex hominibus_ Ha la generacion perverse qui en lieu de dens usent de glaive non mie pour mordre mais pour tout trancher ce veons magnifestement de la desloyale a qui ne souffit mie mordre se tout ne tranche. Piteuses paroles de la dame couronnee & recors de la sainte escripture. O doulce amie et ma chiere nourrie/ et quant je sçay que dieux est juste ne dois je penser que a tous jours pas ne dissimulera la paye de sa droiture/ ne fait il grace quant la convercion qui trop retarde attent sa misericorde mais sicomme naturellement la mere amoureuse de sa porteure non obstant vices qu’elle y voye ne met en oubli l’amour maternelle redoubte par desserte veoir la ruyne de ses filz/ ainsi souspirant et lacrimeuse crainte et paour en freour me tient de soubdaine vengence. Helas n’ay je cause de penser la figure de ma ruyne en ce qu’il est escript ou .xv.e chapitre du livre des roys/ que comme dieu de loy divine repreuve ceste dicte vicieuse gueppe/ sicomme son contraire pour ycelle et a sa cause debouta saül roy que elle avoit aluché/ lors que il l’ot envoyé en bataille contre le roy de amalech si lui avoit deffendu que homme ne prensist a rençon mais tout meist a l’espee comme orribles pecheurs et de dieu reprouvez ne vouloit plus sa vie/ ne des despoulles retenist aucune chose/ mais comme saül mieulx amast obeyr a ceste desloyale sancsue qui lui commandoit le contraire que au commendement de dieu n’en fist riens Ains se volt engraissier des faulces pastures de dieu vees/ et espargna le dit reprouvé roy/ pour la quelle chose dieu appella samuel le prophete disant Je me repens d’avoir ordené sus mon peuple Saül roy Dont comme le dit prophete reprensist Saül d’ycelle forfaicture/ se volt excuser disant que les despoulles que faites avoit/ c’estoit en entencion de a dieu les sacriffier/ de la quel chose respondi le prophete/ mieulx vault obedience que sacrefice/ et pour tant que par croire l’amonicion de la rapineuse as desobei/ Tu seras debouté de ton royaume et adont le prophete le depposa et en oygny david a roy/ Ha chiere amie et dois je penser que dieu dorme ne voy je le temps que contre ses commandemens sont espargnees ses justices sur les mauvais de droit divin condampnez a punicion/ mais qu’ilz ayent pasture pour ficher en la quelle de la faulse adont tout est accoisie/ Mais voir est qu’ilz s’escusent d’aucune faulse couleur de bonté faisant leur malefice/ vois tu tout commandement de loy mis arriere pour elle paistre et nourrir sans nulle espargne/ Que diray je donques se je n’ay paour que dieu soit muable qui ne peut estre/ & s’il ne l’est pour quoy ne me touche ceste figure par semblable cas n’en voye les aprestes/ Car bien est fol cil qui mal fait & bien espoire/ ne sont les estranges aussi aptes a recevoir nouvelles proyes comme ilz souloient/ Et tout ainsi comme cellui qui se sent coulpable ne vid sans la runge de conscience/ le rent paoureux la paour de punicion ne de lui ne depart. ¶ Ancore a ce propos des malefices de ceste dampnee ne parla donques a moy jhesucrist en la parabole de la vigne sicomme il dist en l’euvangile des faulx coultiveurs lesquieulx comme ilz fussent de la maisgnie de ceste doulereuse par envie d’avoir l’eritage n’occirent il les loyaulx messages justement demandeurs des exfruis & comme ceste felonnie engrigiast semblablement/ ne espargnerent leurs glaives le droit heritier/ mais comme la sentence divine les despoulliast pour yceulx crimes de toute possession/ et en revetist estranges cultiveurs les miens cheus en la meismes fosse ne dois je doubter la meismes sentence/ Car comme le souverain maistre establi les eust coultiveurs de ma vigne pour bon compte en avoir/ n’ont ilz occis les messages demandeurs des exfruis/ c’est assavoir les causes de mon exaltacion/ et qui plus est/ le droit heritier c’est le loz de grace qui tous jours jusques a ore m’a possedee/ mais tout ainsi que la femme ançainte la quelle non obstant le desir de veoir le fruit de son ventre hors de soy a sauveté resongne la douleur du temps de l’enfantement/ pareillement non obstant la joye de l’esperance du bon reppareur avenir/ que dieu m’a promis/ je resongne le mal par ou couvient que je passe ains que je y aviengne. Encore de sa complainte. Helas ancore de la paour que j’ay de ma ruyne n’ay je cause considerant les dessertes de mes subgez/ car peut estre que ains la reparacion attendue/ moult couvendra perir des miens Comme il soit vray que de choses a avenir le temps mucié soit soubs le secret de dieu Sicomme la promesse qu’il fist a abraham de ses lignees multiplier & croistre sus la terre comme souvrains/ Et chose est certaine la parole de dieu estre vraye/ Et toutevoye par les dessertes d’iceulx enfans et peuple d’ysrael punicion a tres lonc temps leur a esté par mainte foiz de dieu envoyee/ comme il appert par la bible qui de ce fait mencion/ et puis quant dieu bien les avoit punis les rappelloit a soy Et ancore au jour d’uy les veons dispers et fuitis pour leur dessertes/ leur repparacion selon ce que l’en tient par la dicte promesse sera quant lumiere de vraye foy leur sera donnee Ceste figure me fait doubter grans perplexitez avenir/ ains le reparement de ma ruine/ Sicomme nous veons communement ou temps d’orage grans escroiz de tonnoirres fouldres et tempestes cheoir dommagiablement ainçois que le temps se resclaire/ Et se sur ce croire n’en voulons des anciens les prophecies sicomme merlin les sibilles joachin et mains autres qui nous dient tout plainement les advenemens de noz adversitez et trebuchemens/ et se veoir les veulz en maint lieux les trouveras plainement et a la lettre lesquieulx dis je laisse pour ce que aucuns dire pourroient que comme ilz soient apocriffes ne doivent estre recitez a cause de certaine preuve/ les textes des saintes escriptures que nyer ne povons et ou n’a mençonge nous doivent a tout le moins estre fondement de paour & petite asseurence/ et aussi les veritez des vrayes histoires approuvees. ¶ Qui me gardera donques de trembler quant je cognois que la justice de dieu riens ne passe sans punicion et je voy les occasions d’inconvenient courir toutes communes c’est assavoir par especial les filles de perdicion dessus descriptes et que tu as veues et le vent penetrant qui donne l’enfleure maloite qui bestourne le sens d’omme raisonnable en beste mue. Des punicions des vices. Que j’aye paour de la punicion qui tant rent enfermés mes plus prochains par les exemples que de l’ire de dieu je treuve encore pour trop mendre cas que ceulx que courir voy commis par mes pourprises Sicomme il est escript ou second livre des roys ou derrenier chapitre/ que comme le roy david une foiz ferus du vent dessus dit eslevast son cuer en l’enfleure de ambicion de savoir quel puissance il avoit et de combien de gens d’armes finer pourroit/ & pource savoir fit son peuple nombrer pour la cause de ceste elevacion seulement dieu fu contre lui tant courroucié qu’il lui manda par le prophete gad/ que il choisist de .iii. punicions l’une ou .vii. ans par tout son royaume aroit famine/ ou .iii. mois il seroit en fuite pour paour de ses ennemis ou .iii. jours pestilence de mortalité aroit en son peuple/ Dont apres qu’il ot choisi la tierce punission/ une tele mortalité sourdy qu’en son royaume mourut .lx. & .x. Mille hommes. O doulce amie/ or regardes comme grant punicion pour chose qui au regart de noz grans enfleures sembleroit bien petite boce. ¶ De ceste enfleure ancore et de la punicion de dieu envoyee comme il ne la puist au lonc aler souffrir/ Est escript ou .iiii.e chapitre de danyel que comme nabugodonosor une foiz alast et venist par mi sa sale & son grant palais de babiloyne/ se gloriffiant et disent ne n’est ce pas cy babiloine la grant/ la quelle pour ma maison royal j’ay ediffiee et la poissance de ma force et la gloire de ma beauté. Adont disant ces paroles vint une voix du ciel/ qui lui dist nabugodonosor escoute/ ton royaume de toy est trespassé et bouté hors seras de la compaignie des hommes & avec les sauvages bestes sera ta demeure/ & feing avec les beufs tu mengeras ne fu pas mençongiere la promesse/ car gaires apres ne tarda que executee ne fust en sa personne qui deboutez fu de la compaignie humaine et ramené en fourme de beste paissant aux champs a la pluye et au vent. ¶ A quoy querons nous autres prophecies/ ne nous sont cestes souffisantes/ ne savons nous que dieu est inmuable comme dit ay/ et que tel est ores comme lors estoit/ ne sont les escriptures toutes plaines des veritez de ses punicions/ et de tant comme plus il les retarde de tant plus grant paour avoir devons/ Tout ainsi comme de l’archer de tant comme plus il retarde a frapper tandis que fort il tire la corde/ de tant fiert il plus grant coup quant il assene/ que t’en diroie plus/ d’exemples infinis en sont qui nel croira si lise/ assez souffise ceste narracion sus la dicte enfleure de mal affaire. Encore de ce mesmes. Encore de la deshonnesté qui ma gent de deffence et mes autres officiers et meismement mes plus affins et prochains tient avec les autres passions dessus dictes/ en ses liens comme cy dessus est dit. helas qui n’aroit que un vice seroit a peu eureux/ mais mal pour cellui qui de tous ou de plusieurs est avironnez et remplis/ ne me puis taire de l’exploit de la grant condampnacion de dieu donnee contre son vice/ & des maulx qui en viennent & au jour d’uy et tres les premiers temps comme plusieurs royaumes destruis en ayent esté/ et pour ce doubter doy quant je voy le cas pareil/ ce meismes flaiel/ exemple/ Dyna fille de jacob fu ravie du filz du roy de Sichem et ce fu la cause de la destrucion du dit royaume/ Amon se faigny malade pour avoir thamar sa seur/ pour la quelle cause il fu de son frere absalon occis/ le ravissement de heleyne par paris en grece fu cause de la destruccion de troye. un roy de france comme racontent les croniques en fu chaciez et exillez/ la force de tarquin l’orgueilleus faite a lucrece la chaste dame de romme qui pour celle cause s’occist/ fu cause du desheritement du roy tarquin et de son filz/ Et pour ce fait jurerent les rommains que jamais a romme n’aroit roy. hanibal roy de cartage tant qu’il fu sans l’acointance de la deshonnesté/ il fu vainqueur et victorieux es batailles rommaines & en toutes pars/ Et fu son nom eslevé en proece/ mais si tost qu’aprist le repos & en delices s’enveloppa/ es quelles prist l’acointance de ceste mauvaise chut en la vallee de male fortune ne puis bien ne lui vint. ¶ Plus te diray et nottes que quiconques soit l’omme qui es dissolucions communes s’enveloppe/ de ceste deshonnesté/ merveilles est se jamais puis il a pris d’armes/ et se fortune en tous ses fais ne lui est contraire/ puis que son cuer flote es eaues de ses dissolucions/ et se n’estoit qu’il ne loit de nul diffamer publiquement de ce te donroye exemple vray d’aucuns vivans au jour d’uy au monde sanz honneur/ loyez de tieulx liens/ ancor te dis que pays terre ou regne dont des chevetains est maistrece ne fructifie en honneur ne bonne renommee/ Et a quoy plus alegueroye de ceste exemple la magnifeste experience le nous declare/ mais de son trebuchement quoy qu’en aye dit devant/ ne couvient autre prophecie/ ne mais les effais de la divine justice qui pour cause de celle ebaluffree sanz frain de honte dont les humains estoient remplis/ Dieu dit et sentencia que homme plus au monde ne seroit vivant sus terre/ Et pour ce le deluge envoya jadis qui n’espargna creature vivant fors noué & sa meisgnie que dieu ot preservez. Si pense & nottes comment asseure je doy dormir. Encore de ce. Ancore de celle qui les voyes estouppe que verité ne saille/ C’est fraude la perverse/ Sicomme dit valere le grant ou .ix.e livre que sa tricherie barateuse est un mal mucié et espieus de qui les forces tres efficans sont mentir et decevoir comme elle s’esjouisse en mençonges & fallaces qui sont les faulx outilz de son soubtil art Et de ce parle ysidore en ses synonimes qui dit que fraude ou barat est monstrer une chose en semblant et faire autre en oeuvre/ Et cellui qui en lui l’a est tricheur/ et par elle veult simuler et faindre l’issue de vertu/ de ceste mauvaise vient desloyauté et foy mentie/ or prens garde se ma terre et toutes mes cours sont semees de si fais hebarges/ ja moult enracinez en de trop haulx lieux helas comment ne desplairoit a dieu juste le vice de foy mentie de mençonge et de desloyauté entre les freres parens et amis Et entre prochains sicomme il commande que ilz aiment l’un l’autre quant meismement aux ennemis veult que foy soit tenue/ et que il se courrouce du contraire le nous monstre assez par l’exemple qui signefie des faulx jurans la grant punicion/ c’est assavoir par ce qui est escript ou derrenier chapitre ou livre des roys de zedechias roy de jherusalem qui brisa a nabugonodosor roy de babiloine la foy promise que lui avoit/ pour la quelle chose le dit nabugodonosor vint assegier jherusalem et dieu en sa main lui livra le dit zedechias roy/ Si lui dit quant il le tint. Dieu qui het toute infidelité de foy brisee & de mençonge te veult punir par ma main/ et adont devant lui occire fist ses enfans/ & a lui crever les .ii. yeulx/ et lié de chayennes le fist prisonnier mener en babiloine/ Or regarde que doivent les miens attendre des infidelitez que chacun jour s’entre font tant innormes que l’un en l’autre ne se peut fier/ ne loyauté a peine en part qui soit du grant jusques au mendre peut estre trouvee/ qui vit onques mais l’art de sofistiquacion si commune/ Car de ce semble que chacun soit maistre et jusques aux entrailles des courages c’est embatue celle art d’enfer et dyabolique/ si qu’il n’est a peine parole dicte semblant fait ne chose ouvré qui ne soit sofistiqué en tele maniere que elle a apparence de estre milleure qu’en effait de bonté elle n’est trouvee. Si suis pour ces choses comme celle qui le baston a sus le chief et le coup atent. Encore de ce. Et tout ainsi comme les vertus deppendent les unes des autres & s’entre accompaignent & attrayent Semblablement ces filles de perdicion trebuchent de l’une en l’autre/ et se entre sachent et apparient/ Et qu’il soit vray pour quoy est doncques fraude trouvee ne mais pour remplir les coffres de la rappineuse C’est l’administraresse de ses pourveances et de son amas/ C’est celle qui treuve les voyes de attraire ces finances et faire ses contras/ hahay se perdue l’avoit comment esgaree seroit/ Onques ne fu si propice boyasse ne qui si bien pensast de sa maistresse. Dieux quel compaignie et quel couple avarice et fraude/ mais de leurs ordes mains _libera nos domine_. Dieux ne commença ceste orde caigne aux ongles crochees/ tres que sus la terre n’avoit que .iii. hommes Lors que kaÿm offroit a dieu des pires fruis de sa terre et des pires bestes de son parc/ Et comme dieux qui scet les courages n’eust agreable son sacrefice le reprouva ycellui chut ou second inconvenient/ c’est assavoir de envie et puis ou tiers par l’omicide que il fist de son frere abel Qui pourroit raconter les maulx qui par ceste sont avenus/ et ancore ne cessent/ pour quoy te diroye des empires royaumes/ citez et peuples qui destruis en ont esté les temps passez/ Autre exemple ne couvient fors du temps present n’est elle celle qui en l’eglise de dieu met la division et le Sisme/ certes c’elle n’estoit ne couvendroit pas .ii. papes/ ains a peines un le vouldroit estre/ n’est elle principale ou debat de mon royaume/ Se trouvee n’y estoit la charge du gouvernement ne seroit tant chalengee/ dirons nous que elle fust plus grande jadis ou roy de babiloine/ pour tant se une seule foiz il desroba le temple de dieu. helas avisons quantes extorcions on fait en plus ses amees choses que son temple/ C’est assavoir a ses povres membres qui sont les souffreteux de quoy il est escript que licite seroit vendre les calices & les joyaulx livres et aournemens de autelz pour secourir a besoing a la neccessité de yceulx Et ilz sont de toutes pars persecutez/ et de tieulx joyaulx qu’ilz ont/ c’est leur sustentacion desrobez/ Et dieux scet en quieulx usages sont employez/ Mais le cas de cestui dit roy pour quoy ne nous peut estre figure et prophecie du pareil inconvenient par divine punicion/ Car sicomme ou livre de danyel ou .v.e Chapitre est escript que une foiz baltasar faisoit un grant disner/ et seoit a table avec les nobles de son royaume/ commanda que fussent apportez les vaisseaulx d’or et d’argent que son pere avoit pris ou temple de jherusalem/ esquieulx vaisseaulx on souloit faire le service de dieu/ Et cellui corrompu par pompe buvoit dedens presomptueusement/ et y faisoit boire ses cucubines qui de tieulx rappines faisoient leurs paremens/ et les choses de dieu mettoient en vilz usages/ Mais dieu contre qui nulle force n’a poissance/ et quoy que il attende bien se scet venger ot amené l’eure de la punicion de ycelluy mal faiteur/ Et par cest exemple povons notter la ruyne des plus eslevez souventes foiz quant plus cuident estre asseurez/ Car sicomme cellui Balthazar Roy de Babiloine estoit plus en sa joye/ il leva les yeulx Et en la paroit de sa sale vit une main qui escripsoit tieulx .iii. moz/ mané/ thetel/ phares/ Le premier mot mané/ C’est a dire nombre/ et est a entendre que dieu avoit nombré les jours de sa vie/ Et que venue en estoit la fin. Le Second mot thetel est a dire pois/ qui vouloit dire que dieu avoit pesé ses biens et ses maulx/ et legier avoit esté trouvé en biens/ et pesant en maulx. Le tiers mot phares vouloit entendre division/ C’estoit a dire que dieu avoit devisé son royaume et sepparé de lui/ Et ainsi avint car celle meismes nuit/ daire le roy de mede/ et Cirus roy de perse prindrent la cité de babiloine/ et fu occis balthazar et son royaume transporté es mains des mediens et des persens. Encore de ce. Tant que c’est sanz nombre doulce chiere amie/ te pourroye dire de tieulx exemples de diverses punicions pour divers pechez helas et les miens ne s’i prennent garde/ ne dit le proverbe rural et commun que bien se bat qui par autruy se chastie/ & que qui autrui maison voit bruler/ de la sienne paour doit avoir/ Il n’est si beau chasti que cil qui de soy meismes & sanz contrainte vient/ plus leur fust honorable laisser les vices de pure voulenté que ce que a force on leur feist delaissier/ n’est il escript que dieux a plus grant joye du pecheur retourné a lui que du juste qui onques ne failli/ C’est chose humaine de pechier/ mais infernalle est la perseverence. Ha doulce chose est que de suivre la voye de vertu a qui si veult duire/ n’est il dit que l’omme vertueux a ja un pié ou ciel/ Et a quoy se eslieve homme qui est terre & cendre/ ne scet il que sa vie est brieve ne se gloriffie es richeces mondaines/ lesquelles ne sont ne vrayes ne siennes/ Et que vault avoir seignourie au monde grans tresors terres possessions et poissances sur les autres/ un pou de temps pour an si user que on s’en enqueure dampnacion perpetuele/ qui est cellui si ignorent qui n’ait le ver de conscience. vueille ou ne vueille quant il se sent pecheur ne possede il et y a un des tourmens d’enfer qui ne le laisse durer/ mais quelle est plus grant seureté que nette conscience/ C’est joye celestielle/ Hahay mais pour quoy ne a qui dis je ces paroles quant je sçay que n’en serai pas creue Car ne pourront entrer es courages ja adurcis Sicomme on dit le fol ne croit jusque il prent mais habondance de voulenté le me fait dire comme tendre mere a ses enfans/ mais ce me desconforte que ja me semble en y a d’entrez en obstinacion qui trop est chose perverse. Helas/ j’ay grant paour que semblable je soie a Cassandra la sage fille du roy priant qui veant la ruyne appareillee sus les troyens les amonnestoit d’appaisier leurs courages contre grigois ains que pis leur venist/ mais en vain se debati car n’en fu pas creue/ Si leur en ensuivi tout ce que pronostiqué leur avoit/ Dont a tart de ne la croire se repentirent/ ainsi de eulx amender et mettre a paix devers leur dieu de qui ja voy la guerre. Bien vouldroye que a mes paroles si adjoustassent foy/ ains que pis leur venist/ ilz me creussent ne que du tout ja son yre fust sur eulx espandue/ par plus grieve vengence. O sage roy de ninive bien conseillez qui creus le prophete jonas/ quant dieu par lui te manda/ que pour les pechiés de toy et de ta cité tu avoies encouru sentence de destruccion dedens quarante jours Mais lors te repentant batant ta coulpe/ en jeunes plours et afflictions toy et tous tes subgés jusques aux bestes mues par .iii. jours cryant a dieu mercis vestus de sacs/ cendres sur les testes/ tant te humilias que Dieu ot pitié de ta contriction si/ que ton humilité espargna sa vengence par bon appaisement. ¶ N’ont doncques les miens assez de exemples d’eulx repentir ne scevent ilz que de mal couvient que mal viengne Car non obstant que le sens litteral de l’euvangile dye que neccessité est que esclande viengne/ ne dist il apres que pour tant mal cellui par qui esclande vient/ veulent ilz resembler le larron qui ne croit quelque exemple que il voye que l’en destruise les mal faiteurs jusques a tant que il ait la corde au col/ Helas/ mais c’est trop tart/ Car trop est meilleur a l’omme se garder du mauvais pas que ce que a peine ou jamais s’en tirast hors se il y estoit entrez. La fin de la complainte de la dame couronnee. Belle doulce amie que te diroye ne t’ay je assez tenue es narracions et procés de mes aventures le bien et le mal je t’en ay regehy en general & en particulier puis la naiscence de mon nom jusques au jour d’uy/ Et ce plus m’a eslargie a te signiffier l’estat de mes anuys que piteuse de mes afflictions je t’ay trouvee/ Si est temps des crimes/ que je me seuffre/ de plus te dire/ que trop ne soie longue. O quel plaisir et quel alegement est de dire et descouvrir a son loyal ami ou amie les pesanteurs de ses pensees Car la viande presentee au famillieux n’est plus savoureuse/ Si ne dis plus ce que autre foiz as dit quelle que je appere que glorieuse soye/ Car je t’acertaine se dieu de sa grace n’y remedye que passé a lonc temps ne fus plus perplesse helas mais comment remede du ciel espereroye quant aux miens si mal je le voy desservir Et ancore plus me grieve sans faille le peril de pis ou je me voy que le mal que je seuffre Tout soye bien batue Tout ainsi que cellui qui devant lui voit cil qui l’a navré/ a paour que il le partue Si te mercy ma bien amee en fin de mes paroles de ta loyal amour et compaignie La quelle te pry que ne me faille jusques a la fin. ¶ Non obstant que d’alieurs tu soies requise/ et que de moy et des miens tu ayes petis emolumens/ mais ton bon courage ne vueille delaissier la nourriture de son enfance/ Si demeures constante avec moy ou gracieux labour de tes dictiez/ du quel maint plaisirs ancore feras a moy et mes enfans/ Lesquieulx je te pri que me salues/ Et que leur signifies les plaintes de mes clamours Et que Comme loyaulx et vrays enfans veulent avoir pitié de leur tendre mere/ de qui encore le lait leur est neccessaire et doulce nourriture/ mais vueillent si espargner ses doulces mamelles que ilz ne la succent jusques au sanc. ¶ A tant cesserent les parolles de la dame couronnee Et moy apres ce que selon ma poissance au mieulx que sos je l’os reconfortee/ lui disant que non obstant son grant peril/ se dieux plait les prieres et oroisons de maintes bonnes creatures/ et les biens fais qui sont celebrez par sa terre/ non obstant les grans pechiez qui y queurent/ Comme dieu soit misericors la reserveroyent et tireroient de peril/ La merciay de l’onneur que m’avoit faite et de la charge que commise m’avoit/ lui en promettant vraye excecussion. Et a tant reposer la laissay. Explicit la premiere partie du livre de l’avision christine. Ci commence la seconde partie du livre de l’avision christine la quelle parle de dame oppinion et de ses ombres. Apres ces choses me sembloit que desireuse de plus avant enquerre aloye traçant par la cité d’athenes tant que m’embatoye entre les estudes/ lors joyeuse d’estre parvenue a si noble université voluntaire de mon sens par leur savoir prouffitablement imbuer/ m’arestoie entre les escoliers de diverses facultez de sciences disputans ensemble de maintes questions formant plusieurs argumens. ¶ Lors sicomme l’oreille vouloie tendre a escouter/ adont le sens de ma veue preceda cellui de m’ouye/ Car en haulçant mes yeulx avisay volant entre yceulx une grant ombre femenine sanz corps sicomme chose espirituelle de trop estrange nature et qu’elle fust merveilleuse l’experience prouvoit/ Car celle chose veoie estre une seule ombre/ mais de Cent mille milions voire innombrables parties les unes grandes/ les autres mendres autres plus petites de soy elle faisoit/ puis s’assembloient ses parties d’ombre comme par grans tourbes si que font nuees ou ciel ou oyselés volans par tas ensemble/ mais plus en y avoit que onques oyseaulx ne volerent. Si estoient ces tourbes sepparees les unes des autres ainsi comme les couleurs d’elles se differoient/ car de toutes les coulours qui onques furent et de plus que onques n’en fu estoient differenciees les unes des autres/ Car une grant tourbe en y avoit de toutes blanches une autre de toutes vermeilles/ les autres yndes autres de couleur de feu autres d’eaue/ et ainsi de toutes les couleurs/ Et se tenoient ensemble celles d’une couleur sicomme font oyseaulx d’une espece Toutefois aucune foiz avenoit que ilz s’entremesloyent/ mais tous jours retournoit chacune a sa couleur/ Et non obstant que une chacune couleur se tenist ensemble toutefoiz en y avoit en la route de plus fort taintes les unes que les autres/ se vermeil estoit l’une plus ardant/ l’autre plus palle/ l’autre plus sanguine/ & ainsi de toutes les couleurs si qu’a peine en y avoit une qui aucunement ne differat de l’autre/ Et tout ainsi comme les couleurs d’icelles ombres par tourbes se differoient semblablement faisoient leurs fourmes Car il n’est corps de creature humaine ne d’estrange beste/ oysel monstre de mer serpent ne chose que dieu formast onques voire des plus haultes choses celestielles et de tout quanque pensee peut presenter a la fantasie dont la n’y eust la fourme/ Si en y avoit tant d’estranges qu’il n’est cuer qui le peust penser mais fourmes de geans serpens orribles bestes ne chose mortelle tant ne m’espoventerent comme firent les orribles noirs deffigurez monstres d’enfer de la quelle remembrance encore suis toute espaourie. Ci dit de quoy ces ombres servoient. D’icelles tourbes d’ombres qui par l’air voloient je veoie tous avironnez les clercs disputans es dictes escoles/ et avant que cellui qui vouloit proposer sa question parlast/ une de ses ombres lui venoit s’acouter en l’oreille comme se elle lui conseillast ce qu’il devoit dire/ Et apres quant l’autre vouloit respondre ou repliquer/ une autre ombre lui aloit semblablement s’acouter/ Et ainsi n’y avoit la nul arguant qui ne eust autour de son chief ou une ou .ii. ou .iii. ou .iiii. ou plus grant quantité qui toutes le conseilloient/ mais chacune science a part avoit sa couleur d’ombres/ sicomme gramaire les verdes/ dyaletique les morees/ arismetique dyaprees/ musique blanches Geometrie vermeilles/ Astrologie les asurez/ theologie dorez philosophie cristalines & ainsi des autres sciences liberaulx et deffendues/ Et ceulx qui arguoyent n’avoient environ eulx tant que duroit la disputoison fors les ombres de la couleur qui appartenoit a la science de leurs argus mais non obstant que toutes traÿssent a une couleur/ ceulx qui proposoient plus fort taintes ou moins taintes que ceulx qui repliquoient les avoient si que nulle fois n’estoient sans difference/ et s’il avenoit que pareilles venissent aux parties qui disputoient/ adont estoient les .ii. disputans d’acort Si estoit la chose partie en telle maniere qu’il sembloit que ycelles ombres fussent cause de leurs descors et debas qui aucunefoiz tant multiplioit entr’eulx/ que de tieulx de chaude cole y avoit faisoient venir de verbis ad verbera/ Et pour ce que estrange chose pourroit sembler a ceulx qui oyent ou orront la descripcion de ceste avision en ceste partie la quelle les yeulx de mon entendement plus clerement veoit que expliquer ne sçay ne descripre que j’appelle ycestes choses ombres/ & si dis qu’elles avoient coulours diverses/ come se chose contredisant fust couleur et ombre estre ensemble/ si dy que ombres voirement ce estoient/ car estranges causes leur donnoient leur fourmes non mie d’elles mesmes les avoient/ Coulourees couvenoit que elles fussent. autrement point ne fussent/ mais transparans petites et grans si que on veoit par mi auques toutes estoient/ fors d’aucunes si troubles que l’en n’y veoit grain ne goute. Ancore plus/ car tout ainsi comme elles se dessembloient de couleurs/ semblablement faisoient de fourmes car comme j’ay dit devant de toutes les fourmes et choses qui pevent estre ymaginees avoient/ celles ombres empraintes/ Celles qui appartenoient a philosophie estoient comme fleurs de diverses façons et couleurs/ mais tant estoient de grant odeur et beauté que toutes les escolles en resplandissoient/ si que grant beauté d’i estre estoit/ les autres fourmes d’ombres comme de gens de bestes ou d’autres choses s’estendoient plus dehors les escoles et voloient par tout le monde/ car celles plus appartenoient a oeuvres manuelles & fais que en speculacion et plus estoient attribuees aux gens d’armes et ordre de chevalerie et autres ars mecaniques & ouvrables/ De tout ce me sembloit que avoie clere cognoissance/ mais sur toute chose m’esmerveilloit et fort a comprendre m’estoit ce que je veoye non obstant ces diverses parties d’ombre qui par tout le monde s’espandoient que toutefois n’estoit ce que l’image d’une toute seule ombre en la quelle toutes se refrappoient. Comment l’ombre araisonna christine. Adont comme je fusse ententive a regarder ceste merveille/ l’ombreuse creature s’en donna de garde et en telle maniere m’araisonna fille d’escole qui ça t’amaine et moy a elle/ dame aventure mais voz merveilles m’ont cy arrestee/ Et se je peusse moult voulsisse plus vous cognoistre/ Et elle a moy comment ne me cognois tu doncques/ dame je n’en ay pas recort/ et elle a moy O bien voy que ignorence tolt aux humains la cognoissance des objects de leurs oeuvres mais pour emplir ton desir Ottroy que tu me cognoisses pour ce par vehementes enseignes te seray magnifestee. ¶ Saches que tres que adam fu formez je fu cree/ Et suis fille de ignorence desir de savoir m’engendra Le premier homme & sa femme par mon exort decevable fis en la pomme mordre/ et apres ce que dieu l’ot pour ce meffait condampné a avoir sa vie en sa sueur/ je lui fis querre et encercher les proprietez des herbes et des plantes et lui appris la maniere des terres cultiver et les natures des choses crees lui fis esprouver tant qu’il les attaigni/ ensuivant apres je gouvernay les humains/ & leur fis prendre loy/ la quelle fu premiere celle de nature/ Et tres ces premiers aages furent aucuns soubtilz hommes aux quieulx tant fis encerchier qu’ilz trouverent philosophie et par consequant toutes les sciences & ars par moy furent premierement investiguees et la voye trouvee d’y attaindre/ ne nom de philosophe oncques trouvé n’eust esté se je ne fusse/ Sicomme plus a plain cy apres te declaireray/ Et non obstant que philosophie avec ses filles fust avant que moy/ et que fille de dieu soit/ si fus je faite aussitost que creé fu entendement humain/ et lui et moy ouvrismes la voye aux hommes de cler engin a la trouver a entendement premier et moy seconde/ si suis chamberiere d’elle en ce mortel monde/ car en paradis n’enfer n’ay je demeure/ ma duree sera jusques au derrain jour & lors finera. je rapporte les messages des hommes de cler entendement a philosophie et a ceulx qui apliquer s’i veulent je les fois par le moyen de diligent estude se ne leur tolt deffaute d’engin attaindre par investigacion a elle/ Et pource non obstant que par tout le monde soye me vois tu principalement en ses escoles hanter es quelles par l’occasion de moy avec le labour d’estude apprennent les clercs toutes sciences & sans moy apprises ne pourroient estre Et non obstant que de dieu viengne la grace d’en hault je suis celle qui la mes a oeuvre ou cuer de la personne & sanz moy riens ne proufiteroit Et te dis plus fort que se je n’estoie avec foy esperance et charité point ne seroit es humains. Les choses que l’ombre disoit a christine. Ancore te dis je que tous les anciens prophetes qui ont esté non obstant qu’ilz parlassent par inspiracion divine de l’advenement de jhesucrist et des temps avenir/ et mesmement saint jehan l’euvangeliste en l’apocalipse et tous ceulx et celles qui ont prophetisié se j’eusse esté en eulx contraire a leurs dis ja n’eussent saintement parlé des secrés divins/ mais affin qu’en moy tu n’erres & que mieulx m’entendes te dis que non obstant les choses dittes maint ont prophetisié verité es quieulx je n’estoye mie saine mais leur disoie au contraire de leur prophecie sicomme caÿphe qui dist de jhesucrist qu’il estoit expedient un homme mourir pour sauver le peuple/ Il dist verité mais ce n’estoit mie ou sens ou il le prenoit/ et pource estoye faulse en lui/ car je le faisoie follement cuider. ¶ Plus te diray de ma nature tres que creature humaine est nee si tost qu’entendement commence aucun petit a ouvrer en lui/ tantost moy et de mes plus legieres filles entrons en lui/ et au feur que l’enfant croist avec son entendement nous croisçons en lui pareillement & en celle croiscence selon ce que ses inclinacions se donnent je loge en lui de mes filles/ s’il est soubtil en speculacions je les lui baille teles qu’il lui fault et celles le font encercher plus avant de ce en quoy il est enclin/ Se enclin est aux armes teles qu’il lui fault les lui baille/ et celles le font encercher la maniere de excerciter les armes/ Se a oeuvres mechaniques marchandise/ ou labour de terre/ paindre/ escripre/ ou lengager pareillement selon les oeuvres par moy avec la inclinacion ou longue coustume d’enseignement/ toute personne prent ses meurs bons ou mauvais sages ou folz selon qu’il s’applique/ Si fais tout homme ouvrer parler aler et venir et sanz moy ne se mouvroit pour oeuvre faire Si me change souvent en eulx par divers accidens/ et fois souvent des bons mauvais/ et des mauvais bons/ les savans errer et dire faulx en divers cas/ et les simples aler droite voye et dire voir/ et selon que je sui en eulx je me donne a cognoistre par leurs oeuvres et parolles/ Se n’est en aucuns qui de faintise se cueuvrent/ toute foiz ce ne pourroient faire sanz aucunes de mes filles. ¶ Souventes foiz je deçois ceulx ou je habite par leur donner faulx a croire/ nil n’est si sage que souvent ne deçoive ne autrement ne pourroit estre selon le cours naturel. ¶ Je suis fondee sur ce que la fantasie rapporte a l’omme soit mal ou bien Si fois souvent faulx jugement et dis une chose estre bonne ou elle est mauvaise/ et ainsi l’opposite et pour ce fais haÿr et amer sans cause souvent advient et sans l’avoir desservi/ diffamer et aussi louer sans achoison souventes foiz. ¶ Es sages hommes suis plus certaine et plus vraye et es anciens de longue experience/ et pource a bonne cause sont appellez es conseulx des ordenances pollitiques Je suis naturellement plus vive et plus certaine en un homme que en un autre selon l’abilleté de son entendement le quel me rapporte en ses pensees Et en homme qui souvent me change est signe de pou constant et legier courage// Je ne suis nulle fois certaine/ car se certaineté y avoit/ ce ne seroie mie. Je dis souvent verité mais je la dis par couleur et informacion d’autre chose Et la gist en l’omme le sain jugement se la couleur est voir semblable et digne d’estre receue qui me fait parler/ Je ay proprieté de faire encerchier verité et de l’enquerir et fus faite pour celle cause/ mais aussi tost que elle est clerement trouvee de la chose que je fois querir adont couvient que celle mienne fille qui cause a esté d’ycelle verité attaindre se parte de la personne/ Mais g’i demeure avec plusieurs autres de mes filles qui pareillement s’en partent selon les veritez qui sont attaintes/ car la ou elle est nous ne povons arrester/ et si la faisons attaindre par labour d’encercher. ¶ Mes jugemens en nul cas riens ne valent se fondez sur raison ne sont Et cil qui parle ou oeuvre par moy ou sens n’est appellé il erre et abonde en folie J’ay comme dit est filles bonnes et mauvaises voir disans et menterresses/ mais se elles mentent ou dient voir n’est mie certaine la pensee qui en soy les a/ Combien que souvent grant foy y adjouste/ Et pour ce que je suis chose non certainement sceue peus tu appercevoir que moy avecques esperance sur le temps avenir par le moyen de vraye foy sommes cause du merite des vrays feaulx catholiques/ Si peus notter que pour cause que ainsi je me diversiffie et change vois tu ycy mes filles de diverses fourmes et couleurs Car n’est homme si sage qui en soy ne m’ait diversement/ la cause si est que ma mere ignorence ne laisse ou vaissel du corps pour sa groisseur l’ame du tout ouvrer selon sa soubtilleté/ Et pour ce couvient que moy qui composee suis de la nature de l’ame en tant que je suis speculative/ et de la nature du corps en tant que je suis ignorent soie et abite ou cuer de creature humaine mais es intelligences qui franchement voient verité & ont cognoissance des proprietez de toutes choses je ne suis ne n’abite ne nulle part se ignorence et entendement ne sont ensemble/ Et comme dit est homme n’est si sage qui n’ignore les causes du plus des choses/ et pour ce n’est il nul qui en moy ne varie/ mais pource que es moins parfais suis plus foible sont leurs raisons nices et reprouvees. Encore de ce mesmes. Et entens sainement encore de ma poissance/ je te dis que toutes les loys et secrés qui ont esté au monde/ puis son commencement exepté la loy escripte qui a moy se fu de dieu donnee Et puis celle de jhesucrist les quelles vindrent du ciel ou je n’ay nul repaire/ toutes les autres ay trouvees la loy de nature ou n’aouroient que un seul dieu qui fu premiere & bonne a qui bien la tenoit fu par moy trouvee Celles des payens d’aourer plusieurs dieux/ je donnay aux hommes de fol entendement/ et continuer leur fis par espace de moult lonc temps/ Et ancore plusieurs parties du monde je tiens en celle erreur. Je fis trouver a belus les premieres ydoles et a son filz le roy ninus aourer l’ymage de son pere Et combien que ne trouvasse la loy escripte/ car n’i sceusse attaindre/ fis je maintes foiz errer en ycelle plusieurs juifs qui par moy firent maintes mauvaistiez & felons fais Sicomme mesmement au peuple d’israel je conseillay faire un veel d’or et que ilz l’aourassent comme dieu/ et ou temps de abdon le prophete fis je au roy jheroboam semer la faulce creance contre dieu et sa loy/ et ainsi de mains autres/ mais aussi continuay je les bons en oeuvres meritoires// En la loy de grace je n’oz que veoir/ car elle est certaine/ mais a cellui qui en fu acteur je fis par le moyen d’envie maintes peines faire & aussi moyennant grace divine/ maint convertir a sa loy/ mais tout fusse je cause de sa mort toute fois contre moy fu par paour jugez a tort/ et ycelle envie et mauvaistié pareillement m’avoit fait ficher ou temps devant es cuers de ceulx qui persecuterent les sains prophetes et aussi en ceulx qui martirerent les benois sains Je fis trouver a mahommet la faulce loy qui ores est a esté et sera pour la punicion des crestiens continue/ si tiens les sarrasins en celle faulce creance. ¶ Par moy se ficherent le temps passé en plusieurs du nom chrestien diverses erreurs en la loy et folles creances qui fortes furent a esracher Sicomme il appert de manés le faulx herite qui trouva la secte de ceulx que on appelloit manichees/ et Arrianus qui ediffia l’eresie arrienne/ et es parties de bretaigne pelage qui par sa faulce doctrine plusieurs chrestiens corrompi/ un autre vers espaigne nomme precelin et plusieurs autres/ en qui je fus faulce et en leurs disciples que je fis errer/ Et mesmement plusieurs papes et patriarches et de divers estas de l’eglise/ Et ancore ne suis si de tous esrachee en mains faulx pas que non obstant les vrays amonnestemens de sainte theologie je ne soie en eulx avec erreur tappie/ et couverte mais paour de feu nous fait tenir coye et close. Ci dit l’ombre les oppinions de philosophie sus le principe du monde. En repliquant ce que devant est dit pour donner preuve que si sage ne soit que je ne face errer parlerons des anciens philosophes quelle je fus en eulx/ Et comme le traictier de ceste matiere/ tout soit elle soubtille puisse estre au prouffit de l’entendement t’en deviseray plus largement en lengage plus couvert comme la matiere le requiere/ te diray premierement des tres ancians investigueurs des choses naturelles A ceulx qui premierement philosopherent/ je disoie que des natures des choses yceulz sont seulement les princippes qui sont ramenez a cause de matere/ et a ce que plus leur fust ce apparant teles raisons leur faisoie investiguer que .iiii. condicions semblans appartiennent aux raisons des princippes/ premierement disoient ilz comme ce de quoy aucune chose est faite/ semble le principe estre d’icelle chose/ Car c’est vray signe de princippe par qui la chose est faite et tel est la matiere/ Car de matieres toutes choses sont faites. Item car tout ainsi que ce dont les choses sont faites nous disons le princippe de l’engendrement d’elles et par consequant cause/ en tant que generacion toute chose precede a estre a ce que elle est/ ne ainçois elle n’est riens. Et toutefoiz de matiere premierement comme de son princippe chacune chose est faite/ car la matiere precede la formacion des choses Et aussi la matiere premierement non pas acidentelement est le suppost des formes par quoy ancore appert que elle soit vray principe il s’ensuit que matiere soit princippe des choses/ Tiercement car comme de toutes choses ce semble le principe ou quel finablement toutes elles retournent Car sicomme les principes sont premiers en la composicion/ aussi doivent ilz derreniers estre en resolucion & autressi ytel en la matiere Quartement comme il faille les princippes demourer/ ce par especial semble estre vray principe qui en chacune generacion/ et apres toutes corrupcion demeure/ dont comme la matiere la quelle ilz afferment substance des choses soit tele que elle demeure en toutes mutacions/ Combien que aucunes passions se varient en elle/ et en elle autressi toutes les autres condicions devant dictes affierent. Par ces .iiii. premisses ilz concluoient que la matiere est l’element et le premier principe des natures des choses ainsi disoient que riens ne peut estre simplement corrompu ne engendré Car tout ainsi se disoient ilz que quant aucune mutacion est faite envers quelconques passions/ toute foiz demeurent l’essence principal/ nous ne disons ycelle chose n’engendree simplement ne corrompue aussi fors selon aucune chose c’est a dire accidentellement sicomme un homme blanc devenir noir/ nous ne disons ycellui homme engendré quant il prent tel abit ne corrompu quant il pert le premier/ Car sa substance principal si demeure/ c’est assavoir son estre le quel si est sa fourme tout autressi que la matiere disoient/ il est la substance des choses/ et ycelle demeure permanablement/ Tout autressi ilz concluent que rien n’est simplement corrompu ne engendré fors accidentelement/ mais disoient ilz toutes mutacions qui adviennent es choses sont faites vers aucuns accidans venans de la matiere comme sont passions ou quelques qualitez/ Dont combien que tous yceulx couvenissent ensemble en mettant la matiere comme cause premiere/ Toutefoiz les faisoie differer doublement en la posicion d’elle C’est assavoir quant a pluralité/ car les aucuns mettoient une seule matiere et les autres plusieurs causes materielles/ et quant a l’espece aussi/ Car aucuns l’eaue mettoient/ les autres l’air/ les autres le feu Thales l’ancien philosophe qui prince fu de ycelle philosophie/ disoit que ce estoit l’eaue et affermoit la terre estre assise sur l’eaue ainsi la mettoit le principe des choses/ et dist que ainsi estoit fondee la terre dessus comme le effaict est fondé sur la cause/ dont il est a savoir que cestui thalles fu dit prince de ycelle philosophie/ Car comme il fust l’un des .vii. sages qui plus proprement furent dis theologiens/ poetes/ lui tout seul se transporta a considerer les causes & les princippes des choses/ Les autres seulement demourez occupez es moralles sciences/ Les noms d’iceulx .vii. sages sont premierement Chales millesien qui fu du temps romulus cellui qui fonda romme ou temps d’achar le roy d’israel comme on lit es croniques environ .vi.c .lxxxvii. ans devant l’incarnacion jhesucrist & devant aristote environ .CCC.lii. ans/ Car aristote fu du temps alixandre le grant qui preceda jhesucrist .CCC.xxxv. ans/ Cestui thales fu astrologien/ Car meismes comme on lit il pronostiqua un deffault du souleil ou temps d’ozias et des fondacions de romme bien cent ans ains que il fust Cestui aussi fu cil dont on lit en l’istoire des philosophes qui chaÿ en la fosse quant il aloit veoir le cours des estoilles/ de quoy il fu remprouvé d’une vielle/ Comment dit elle cuides tu veoir ce que l’en fait ou ciel/ quant a tes piez ne vois. ¶ Le second sage fu pitacus mitilenus ou temps que es ebrieux regnoit zedechias et es rommains tharentin le premier/ le quel pithacus tua frenon d’aches qui batailloit a lui. ¶ Les autres .v. si furent solon d’athenes qui fu faiseur des drois & des loys populaires/ Chilon lacedemonien/ pithidorus corintien/ cleobelus sydien Byas periandran/ Et furent tous ou temps de la chetiveté de babiloine/ Et en ce temps ci en bretaigne la grant raignoit cordeille fille du roy loyr de bretaigne & femme d’agampus le roy de gaule/ le quel agampus a l’instance de elle subjugua et conquesta bretaigne occuppee par les serourges d’elle qui chacié en avoient son pere/ si en chaça yceulz et le royaume au pere restitua au quel puis succeda ycelle cordeille Comme plus a plain il appert par les gestes. Ancore de ce mesmes. Dont entre yceulx .vii. sages thales tant seulement specula la nature des choses/ et ses disputacions et les raisons qu’il fist il envoya par lettres en diverses contrees la quelle chose nul des autres ne fist pour ce fu il entr’eulx appellé prince de leur philosophie Les raisons qui murent Chales a dire ce qu’il disoit estoit qu’il veoit le nourrissement de toutes choses estre moisteur/ et par .iii. signes prouvoit son propos le premier est ce qui est dit c’est assavoir que toutes choses vivans par moisteur sont nourries/ mais ce disoit il comme ce soit une semblable chose de quoy les choses sont & a quoy elles viennent/ Et ainsi humeur semble estre le principe des essences des choses/ le second signe est que comme l’essence de toutes choses vivans tres grandement soit conservee et gardee par sa propre et naturelle chaleur/ Toutefoiz la chaleur semble faite et nourrie de humeur Car humeur est aussi comme nourrissement et matiere a chaleur/ il appert et s’ensuit que humeur soit principe des choses. ¶ Le tiers signe comme la vie de tous les animaulx soit gardee en humeur/ car par le deffault de naturelle humeur chacun animal meurt/ et par la conservacion d’elle chacun animal vit/ par quoy comme vivre soit estre aux choses qui ont vie comme il fu dit devant il appert qu’il s’ensuive que humeur soit principe des essences des choses/ & ces .ii. signes deppendent l’un de l’autre Aussi il prent signe par la generacion des choses/ Car ce dit il comme toutes generacions par especial des choses qui ont vie/ lesquelles sont tres nobles et parfaictes sur toutes autres choses soient faites de semences/ lesquelles semences ont escailles sont de nature moiste sicomme chacun scet/ il appert ce dist il humeur estre princippe des generacions des choses Cestui Chales estoit induit a ceste oppinion par l’auctorité des anciens/ car comme aucuns poetes theologisans/ eussent esté ancore plus anciens de lui Et yceulx eussent tele oppinion de nature/ c’est assavoir que l’eaue fust principe des choses/ yceulx peut estre pour l’ancienneté d’eulx thales si ensuivi. ¶ Si est cy a savoir que comme les premiers en grece renommez de sciences fussent appellez poetes theologisans/ ainsi diz poetes Car de ce qu’ilz disoient ilz formoient dictiez & parloient faintement/ theologisans aussi qu’ilz parloient des dieux et des choses divines/ les premiers et les plus principaulx renommez d’iceulx furent .iii. c’est assavoir orpheus et son disciple museus/ et linius de thebes qui fu maistre de hercules/ Et ces .iii. furent ou temps des juges qui regnoient ou peuple de israel environ. .v.c .xxvii. ans/ avant que chales fust/ environ .xliii. ans avant que theseus le roy d’athenes ravist helayne la fille au roy de thebes environ .lxxxviii. ans ains que troye fust destruite/ Et de tous yceulx .iii. orpheus fu le plus sollempnel/ Et cestui fu cellui dont les poetes parlent qu’il ala en enfer querir erudice sa femme la quelle le serpent avoit pointe en fuyant par le pré quant euristus le frere orpheus la vouloit violer la quelle fable a bon entendement moral peut estre entendue Sicomme fulgence ou livre des natures des dieux tres clerement l’expose/ De cestui orpheus aussi parle boece ou .iii.e de sa consolacion a la fin et ovide en methamorphoseos ou .x.e/ Cestui orpheus aussi a parler proprement sanz nulle ficcion si que boece recite en sa musique estoit tres bon cithariste C’est a dire tant melodieusement faisoit sons en la harpe/ que par les proporcions des acors tant a point ordenez il garissoit de plusieurs maladies/ et les tristes faisoit estre joyeus. ¶ Ces .iii. poetes dis par maniere de fictions & de paroles transumptives parlans des choses de nature disoient que occean c’est a dire la mer ou l’abeisme ou a tres grant inundacion d’eaues/ Et thetis qu’ilz disoient la deesse de humeur sont parens de generacion/ Et par ce dist il comme par singuliere similitude ilz donnoient entendre que eaue fust le principe de la generacion des choses/ Encore ceste sentence par autre fabuleuse narracion ilz couvroient disant que le sacrement et le serment des dieux estoit par l’eaue qu’il appellent stix/ La quelle est un fleuve d’enfer/ Et par ce que ilz disoient les dieux faire leurs sacremens & leurs sermens de l’eaue pour ce que sacrement se fait tous jours par ce qui est plus digne/ Car le parfaict precede l’imparfaict de nature et de temps ilz se donnoient a entendre que l’eaue fust plus honorable et plus digne des dieux/ Et dont comme il appere qu’ilz cuidassent l’eaue premiere et plus ancienne des dieux/ lesquieulx dieux peut estre ilz entendoient estre les corps du ciel ou autres corps sensibles/ Car ancore des choses sepparees n’avoient cognoissance/ Il dit que nulle plus ancienne oppinion de ceste n’a esté es choses de nature/ La quelle soit cogneue/ meismement ancore ceste oppinion a esté nagaires d’aucuns renouvellee/ non pas qu’ilz deissent l’eaue plus noble ne si noble que dieu comme yceulx premiers firent/ mais sans ficcion aucune ilz la disoient & affermoient estre premiere & aussi la derreniere des choses de ce monde/ car meismes ilz la mettent premiere que le ciel/ Car la premiere espere/ c’est assavoir une que ilz ymaginent comprendre La .ix.e ilz la mettent estre eaue Sicomme plus plainement frere rogier bacon le recite en son livre du ciel ou .xii.e chapitre/ Et peut estre a ce ilz se mouvoient cuidans les vieulx poetes accorder avecques eulx/ ou peut estre pour les diz des philosophes nommans en plusieurs lieux les eaues sur le ciel/ Toutefoiz tant yceulx philosophes que aussi les poetes en tant comme a bon sens se puissent ramener au moins le plus des choses en enveloppement et soubz ombre parlerent non les nouveaulx mais yceulx anciens en tant que des sciences les portes vous ouvrirent vous les devez excuser amer et supporter. Les contre dis d’aristote aux autres philosophes. Aristote qui lonc temps fu apres ou quel je fus tres vraye et certaine par le moyen de son noble engin et entendement qui moy et mes filles attrey les plus soubtilles impugnatables/ & les autres poetes non mie les impugna en tant comme poetes/ mais en tant que ilz semblent philosophes/ et sont hors de verité/ aussi recite il d’ippones/ le quel sicomme maisme il recite sur le livre de l’ame/ fu de tres rude engin/ car il mettoit l’ame des bestes et des hommes estre eaue/ Cestui dit il suivi du tout thales sanz lui riens adjouster/ Et pource dit il nulle louange ne nul pris n’en doit recevoir. ¶ A autres philosophes je dis et fis a croire que l’air estoit principe de toutes choses si comme a dyogenes & anaximenes/ et disoient que l’air estoit premier de l’eaue Et principe de toutes choses simples/ c’est a savoir des elemens/ Si est a savoir que .ii. anaximenes furent et tous .ii. philosophes C’est assavoir l’un du temps aristote/ Et de cestui il n’entent pas ycy/ mais cestui anaximenes dont il fait mencion fu disciple d’anaxamandra qui disciple avoit esté thales devant dit/ Et cestui anaximenes & anaximendra furent du temps que cirus conquist le royaume de mede/ et transporta aux persens ou temps de la destruccion du temple de jherusalem/ En ce temps cy aussi c’est assavoir ou temps d’anaximenes regnoit tarquin l’orgueilleux. Le .vii.e et le derrenier roy de romme/ cellui qui fu chacié pour tarqui son filz qui viola lucrece/ cellui aussi fu disciple d’anaximenes/ Toute foiz tant de difference ont ilz qu’anaximenes mettoit l’air simplement principe se non en tant que composé il fust avec raison divine/ Et de ce vint une oppinion qui est recitee sur le premier de l’ame/ Et la raison peut estre fu tele qui les mouvoit Car ilz veoient que par respiracion d’air la vie de plusieurs animaulx au moins du plus des bestes est sauvee/ Et sanz air elle est anichilee/ Et aussi car ilz veoient par imitacion & ensuite de l’air varier les generacions et les corrupcions des herbes et de plusieurs des choses. ¶ .ii. autres philosophes c’est assavoir ypassus et eraclitus mirent le feu estre principe et matere des choses et peut estre furent meus a ce pour la soubtilleté et noblece qu’il a/ Car meismes pour ce que ilz le veoyent luisant et monter contre mont/ ilz cuidoient le ciel estre de feu/ Cestui eraclitus/ pittagoras/ democritus et anaxagoras & plusieurs autres furent tous en un temps/ C’est a savoir ou temps que prophetisoient/ en judee/ aggenus/ zacharias/ et malechias/ ou temps du dit cirus. ¶ Cestui eraclitus sicomme il avoit oppinion ou feu quant aux principes & causemens des choses ainsi comme on lit fu tout le premier de tous les anciens qui par maniere d’art trouva deviner ou feu/ et celle art que on dit piromancie/ Et sicomme on lit en aucuns traictiez d’elle/ lui lonc temps ainçois pronostiqua la desolacion de babiloine la cité devant qu’elle fust avenue. ¶ Ainsi diversement mirent yceulx le principe de matiere/ C’est assavoir d’eaue d’air & de feu en y adjoustant le quart element/ c’est assavoir la terre ilz en disoient toutes choses causees/ et les disoient estre incorruptibles & ingenerables/ sicomme faisoient ceulx qui mirent un principe/ mais il metoit que par l’assemblement d’entre eulx selon diversité de plus ou de moins se causoient les diversitez des choses qui se font. ¶ Dont combien que anaxagoras fust ainsné d’empedecles en temps/ toutefoiz fu il plus novice en savoir/ Car comme un chacun abregier doye a son povoir les principes des choses par quoy moins en deust avoir mis que ne fist empedocles le quel en mettoit trop sicomme plus plainement il appert ou premier de phisiques/ Cestui ancore pour les accroistre les mist infinis/ c’est assavoir car il disoit les elemens et toutes choses estre faites d’infinies petites parties/ lesquelles il mettoit estre les drois princippes & mettoit les choses estre engendrees & corrompues par congregacion & disgregacion/ c’est a dire par assemblement & desassemblement d’icelles N’autrement ycelles ne pourissent ainçois pardurablement demeurent/ Dont par les choses ja dictes de Aristote conclut que par anaxagoras et par les oppinions des jadis philosophes on ne peut autre chose cognoistre fors seulement la cause de matiere. Encore des oppinions. Pittagoras disoit les esperes qui sont menez ou ciel estre dix. Combien que tant seulement .ix. en soient apparans/ c’est a savoir .vii. comprises par les mouvemens des planettes/ l’uitieve par le mouvement des estoilles/ et la .ix.e par le mouvement journal qui est le premier mouvement/ mais pittagoras adjousta la .x.e antixthonan c’est a dire menee au contraire des mouvemens/ et par consequant sonnent contrairement/ Car comme il mist & aussi le mirent plusieurs autres que des mouvemens des esperes du ciel se facent armonies Car comme ilz considerassent que naturellement noz pensees lesquelles ilz metoient de nature celeste se resjouissent de sons qui sont par mesure ordenez/ considerans aussi que tous sons sont de mouvemens causés/ Car sanz mouvement nul son ne seroit fait voyans ou ciel esperes et cercles de diverses grandeurs preporcionnees les unes vers les autres ce leur sembloit par moult nobles mesures et meues aussi de mouvemens couvenables a elles ymaginans par ces choses ou ciel estre grans melodies/ lassus ilz affermoient estre parfaicte musique/ et celle de ça bas estre dirivee de celle de lassus Et aussi selon ceste leur ordenance le mouvement journel qui va d’orient en occident au contraire des autres seroit en l’espere .x.e & la .ix.e seroit celle la quelle si mouvroit toutes les esperes basses au contraire du premier mouvement. ¶ Pittagoras et ceulx de sa secte par lui instruis mettent les principes des choses encheans es causes dessus dictez/ si mettent nombres ainsi que matere et princippe des choses et les passions des nombres ainsi comme les passions ou les abis des choses/ si que nous entendions par passions accidens/ legierement passibles et par abis accidens permanens/ sicomme ilz mettoient que la passion d’aucun nombre selon la quelle il est dit pareillement per estoit princippe de justice pour l’equalité de sa division Car tout nombre qui equalement se devise par egales moitiez sicomme .viii. se devise en .ii. quatre & quatre/ en deux deux/ et .ii. unitez et plusieurs autres par semblable maniere/ yceulx ilz disoient princippes de justice/ Et par semblable maniere les autres accidens des choses ilz assimuloient aux accidens des nombres & mettoient les principes des nombres per et non per/ pour ce qu’icelles sont leurs premieres differences mais le nombre per ilz metoient estre le principe d’infinité Et le nombre non per estre princippe aux choses lesquelles sont fenies/ Sicomme plus plainement il appert declairié sus le .iii.e de phisiques/ c’est assavoir que le nombre per semble estre couvenable a division. ¶ Pour ce infinité par especial se semble ensuivre a la division des choses continuees/ Et le nombre non per si a le per soubz lui/ & ancore unité la quelle est cause de indivision/ Et aussi prenoient ilz que les nombres non pers adjoustez par ordre l’un a l’autre retiennent la figure des quarrez nombres mais les pers varient leurs figures/ Sicomme .iii. adjoustez avec un qui est le principe des nombres/ causent ce nombre .iiii. le premier de tous nombres quarrez/ car .ii. fois .ii. sont .iiii. Et de rechief cinq qui apres .iiii. est le premier nomper adjousté avec .iiii. fait .ix. qui est second quarré/ car .iii. fois .iii. sont .ix. Et ancore adjousté .vii. a .ix. font .xvi. qui est le tiers quarré car .iiii. foiz .iiii. sont .xvi. Et apres adjousté .ix. a .xvi. font .xxv. qui est le quart quarré/ Et ainsi de tous autres. Mais se le nombre de .ii. qui est le premier nombre per est adjousté a un il constitue nombre triangulier/ c’est assavoir .iii. Et se a lui estoit adjousté .iiii. qui est le second per il constitue .vii. qui n’a tele figure/ Et ainsi les nombres pers adjoustez aux quarrez ne gardent point une meismes figure/ Et pour ceste raison leur attribuoient infinité/ et aux nompers finité/ Et pour ce que finité si signifie fourme a qui compette l’active vertu/ Et infinité en depart la matiere a qui compette passibilité/ pour ce les nombres pers ilz disoient femmelles et les masculins nompers/ Et de ses .ii. diversitez per et nomper feni et non feni non pas seulement ilz constituoient nombre mais aussi unité/ Car unité disoient ilz est per et nomper en vertu/ pour ce que toutes differences de nombres en vertu couviennent a unité/ Car tout se retournent en elle & elle en nesune/ Car combien que unité de fait ne soit pas aucun nombre. Toute foiz disoient ilz en vertu elle est un chacun nombre/ Et pource la mettoient ilz constituee de per et de nomper/ Et tous nombres constituez de elle Et mettoient le ciel et toute chose sensible estre faictes de nombres/ Et ytele estoient l’ordre des princippes qu’ilz mettoient. De ce mesmes. Aucuns autres naturiens anciens furent qui mirent mouvement c’est a savoir en tant comme ilz mettoyent un principe le quel par reffaccion et condempsacion ilz disoient mouvable du quel aussi engendrees metoient les diversitez des choses/ Et par ceste maniere le monde disoient engendré selon toutes differences des parties de lui/ Toute foiz car en lui ne mettoient variacion se non selon les accidens/ pource concluoient ilz que selon substance tout le monde fust un/ autres plusieurs oppinions furent dont la narracion longue seroit/ mais en brief yceulz anciens philosophes s’entre accordent assez en ce que ilz dient es choses aucun principe de matiere/ sicomme thales et dyogenes & leurs semblables/ & les aucuns si en misdrent plusieurs sicomme empidocles/ Et aucuns autres aucunes choses non corporelles sicomme ceulx qui mirent dualité/ c’est a savoir platon qui mist & grant et petit/ lesquieulx ilz dient non estre corps/ les ytaliens aussi c’est a savoir pitagoras ont remis infeni/ le quel de rechief pas ne mettoient corps/ Empedocles aussi les .iiii. elemens qui sont corps pour principes mettoient aussi anaxagoras mettoit infinité de semblables parties/ c’est assavoir infenies pars semblables estans indivisibles pour principe des choses/ Et tous ceulx ci ont touché tele cause/ c’est assavoir la cause de materre/ Et ceulx aussi qui ont dit l’air ou l’eaue ou le feu pour principes ou autre moyen entre yceulz elemens sicomme plus espeus de feu ou plus tenues d’air/ Tous yceulx ont mis ycellui corps estre premier principe et element des choses/ Et ainsi appert il que tous ceulx devant diz quant aux choses ja dictes ont mise seulement cause materielle autres plusieurs yceulx anciens ensuivirent que je delaisse pour briefté/ Toutefoiz est a notter que tant avons eu d’eulx que par leurs diz ne causes ne principes oultre yceulx canons mis en phisiques/ nul de eulx n’a diffini/ bien qu’encore obscurement trestous/ toutefoiz les aucuns y semblent approcher/ C’est a savoir yceulz qui materre estre principe dirent/ fust une ou plusieurs ou corporee ou non/ aussi platon qui mist grant et petit & les ytaliens qui mirent infini/ Et empedocles/ l’eaue le feu l’air et la terre/ Et anaxagoras l’infinité de semblables parties/ Car tous ceulx ci toucherent celle cause/ voire et aussi tous ceulx qui ont touché d’air et d’eaue ou de plus espés de feu ou de plus soubtil d’air/ lesquieulx ilz assignoient estre element premier/ yceulx tous seulement ont touché de materre. ¶ Mais les autres du principe de mouvement toucherent/ c’est a savoir tous ceulx qui amistié ou haine ou entendement mirent estre principes. ¶ Toutefoiz qui soit l’estre ou substance es choses plainement nul ne dist/ Toutefoiz cuidoient ycelles estre causees d’immobilité et de reposement/ Et pour ce de ce qui est la substance aux choses ilz mirent especes estre causes/ et un la cause des especes. Encore de ce. Comme ces choses soient obscures a sentir aux gens lais et rudes a dire en lengage vulgar et meismes a ton entendement pour la grosseur de lui estranges passeray oultre des oppinions des anciens philosophes lesquieulx en assez de manieres fis errer sus les princippes des choses. ¶ Mais de ces choses fu je clere a mon tres amé filz aristote le prince de philosophie le quel reprima yceulx anciens par vives raisons sicomme cy en brief te toucheray sanz du tout definir/ car longue en seroit la narracion non delitable a ceulx qui ne la sentent/ Aristote donques reprime les oppinions d’icelz anciens philosophes es principes des choses/ Et pour ce faire il se devise en .ii. parties premierement/ il impreve les singulieres oppinions/ et d’enciennement il requeult les choses qui sont dictes et les continue a celles qui ensuivent/ la premiere par ce divise en .ii. autres/ premierement il impreuve les oppinions de ceulx qui naturellement ont parlé .ii.ement des pittagorians & des autres/ encore en la premiere part il fait .ii. choses/ premierement il impreuve les oppinions de ceulx qui mirent une cause materielle & .ii.ement de ceulx qui en mirent plusieurs/ ancore au premier il fait .ii. choses premierement il impreuve les oppinions ja dictes en general & .ii.ement en especial/ Il les impreuve en general par .iii. raisons dont la premiere est telle Car comme les choses non seulement aucunes soient corps/ mais aussi qu’aucunes soient non corps comme il est apparu en son livre de l’ame que yceulx anciens n’ayent mis fors seulement principes corporeulx/ La quelle chose appert/ Car ilz mettoient un/ c’est assavoir le monde estre une seule substance et une seule nature/ Sicomme la matere la quelle corporee ilz metoient recevant mesure c’est a dire division/ Et toute foiz corps ne puisse estre cause de chose incorporee/ il appert que en ce ilz ont failli qu’insouffisamment ilz ont assignez les principes des choses/ Et non pas seulement en ce ilz ont failli/ mais en autres choses plusieurs comme plus a plain apres il declare. La .ii.e raison est tele/ que quiconques a neccessairement a determiner de mouvement/ Il fault que il mette aucune cause de mouvement dont comme les diz philosophes ayent neccessairement a traictier de mouvement La quelle chose si appert doublement c’est assavoir/ car ilz s’efforçoient a deviser la cause de generacion et de corrupcion/ les quelles ne sont sanz mouvement Tant aussi Car de toutes choses naturellement ilz vouloient traicter/ Et toutefoiz toute naturelle consideracion enquiert de mouvement pour ce que nature est principe de mouvement et de repos comme il appert ou .ii.e de phisiques/ il s’ensuit que ilz devroient traictier de la cause qui est le principe de mouvement/ Et ainsi comme ilz ostassent ou oubliassent ycelle appert que ilz failloient La .iii.e raison Car comme une chacune chose naturelle ait substance et essence/ C’est a dire fourme/ Car fourme est princippe de l’estre et ce que c’est/ Donques comme ce par qui toute chose a son estre soit le principe d’elle & de sa cognoiscence/ Comme les philosophes dis/ ne meissent l’estre des choses cause et laissassent la fourme il appert que ilz failloient ycy repreuve il leur oppinion plus en especial/ & se fait doublement/ premierement quant a ceulx qui le feu estre mettoient principe/ l’une/ bien que le feu fust souffisant .ii.ement quant a ce que ilz laissoient la terre comme aucunement elle appere premiere. premierement il resume la posicion d’eulx/ Car comme ilz missent chacun des simples corps transmuer l’un en l’autre si que les uns sont engendrez des autres selon constricion ou inspissacion c’est assavoir selon tenueté ou engrossissement/ sicomme les groz des soubtilz/ Et pour ce ilz missent l’un de ces .iii. estre premier principe Car les autres sont engendrez de lui/ ou par congregacion ou disgregacion/ lesquelles guises toute foiz se different quant a priorité ou posteriorité c’est assavoir car selon une maniere ce semble premier estre de quoy autre est engendré/ par soubtiliacion/ et ceste guise il met .ii.ement Mais dit il que ce soit premier de qui autre est engendré par condempsacion ou inspissacion/ il appert dit il par ceulx qui mettoient principes les corps plus simples/ c’est a savoir les corps ayans tres menues parties/ desquieulx par condempsacion ilz disoient les choses estre faictes/ sicomme aucuns qui mettoient le feu pource que il est tres soubtil/ aussi un chacun des autres eslemens eut un philosophe qui le jugia premier/ mais pour quoy dist il ne mirent la terre estre principe/ Il ne peut estre dit que ce eust esté contre l’oppinion commune/ Car oppinion divulguee fu la terre substance de toutes choses estre/ Et mesmement exeodus qui fu l’un des poetes theologisans l’affermoit disant la terre estre premiere faite par quoy comme il appere que la terre estre principe fu l’oppinion des theologisans poetes qui precederent les naturiens philosophes/ seulement les naturiens escheverent a la mettre principe pour la groissesse de ses parties Et pour ce comme ilz veissent que l’air eust plus grosses parties que le feu et l’eaue que l’air/ et ilz ne veissent rien si soubtil que feu/ Il s’ensuit dit il que en ensuivant ce principe de condempsacion nulz ne dirent si bien que ceulx qui mirent feu principe/ Car comme pour cause de soubtilleté aucune chose puit estre appellé premiere/ il est neccessité que celle soit principe qui est tres soubtille sur toutes/ Toute foiz s’il estoit vray qu’ilz dient s’ensuivroit il grant inconvenient/ C’est assavoir s’il n’estoit riens que feu il s’ensuivroit s’aucun disoit que air fust plus groz que feu/ ou plus soubtil que eaue que ilz mesprendroient. Ancore des oppinions des philosophes. Mais certes ycy met il l’autre raison par la quelle au rebours il appert que la terre soit tres proprement principe/ car comme ce soit chose evident que ce qui est derrenier en generacion est premier en nature/ pource que nature a la fin de generacion tent a ce qui est premier en son entencion/ mais tant que une chose est plus deprise plus espesse et aussi plus composte/ Tant est elle plus derreniere en generacion/ pour ce que en voye de generacion on precede de plus simples choses aux composees sicomme des elemens on va aux miscions/ et les mixtions aux humeurs et des humeurs aux membres/ tant que finablement on vient a homme qui est le plus compost Semblablement doncques comme ce qui est le plus espeus appert estre en generacion derrenier/ et par consequant principe de nature/ il appert que ceste conclusion soit contraire a celle de devant/ Car ainsi la terre qui est plus espesse et plus disperse sera premiere d’eaue et l’eaue que l’air/ et l’air que le feu/ Si est pour ce a savoir que il y a difference entre querir ce qui est premier & a parler simplement/ Car s’on enquiert de premier simplement n’est pas doubte que premier est parfaict/ de imparfaict et faict que n’est poissance/ Car nulle chose n’est ramenee d’imparfaict a parfaict/ ou de poissance en fait/ se non par aucun ens parfaict/ c’est a dire par aucune chose estant de fait parfaicte Et c’est cy a savoir que je appelle poissance en tant que je la distingue contre fait/ La poissance de quelconques effait le quel n’est c’est a dire de quelconque chose produisible et menable en aucune nature soit bonne ou mauvaise/ ycelle nature non estre ore/ mais povoir estre/ Et pource la nomme l’en poissance de povoir estre ou non/ mais quant elle est/ elle est nommee fait a difference de povoir estre/ Et parce il appert que fait est le plus noble/ Dont pource se nous parlons de la perfeccion de dieu/ dieu si est tres parfaict/ et donques tres premier/ Car en son essence nulle possibilité ne fu ainçois que fait/ mais ces particulieres choses qui precedent en leur estre de poissance en effait/ la poissance en ycelles quant temps si precede le fait et ainsi l’imparfaict le parfait combien toutefois que a nature le fait soit le premier c’est asavoir quant en son entencion et maniere d’elles savoir produire/ Tout ainsi que il appert d’un messagier qui va en aucun lieu Combien que le lieu ou il va quant au labour et a son entencion il atteigne de y venir/ Toutefoiz estoit il le premier quant a son entencion/ car autrement ne se fust il pas meu/ Et sicomme au lieu quant il ataint on pourroit dire qu’il y estoit deffaict. aussi ainçois qu’il atteignist s’entencion povoit estre appellé poissance/ Et ainsi il appert que fait se non en temps/ toute foiz quant a nature ou a entencion est premier que poissance/ il est du tout manifeste que ainsi le premier principe de toutes choses il fault estre tres simple pour ce que toutes choses sont composees des simples & non e converso donques il estoit neccessaire aux anciens naturiens que l’un et l’autre ilz attribuassent au principe premier/ c’est a savoir au principe du monde qu’ilz attribuassent avec souveraine simplicité souveraine perfeccion Mais comme ces .ii. ne puissent estre atribuez a aucun principe corporel Car es generacions & es corrupcions les tres simples choses sont les plus imparfaictes pour ce leur sembloit estoient ilz contraires mettre division es principes. Cesse a parler des oppinions. Plus te diroie assez quelle je fus es anciens philosophes en divers cas/ et mesmement en cestui dessus dit plus largement/ & aussi des solucions du vray distingueur et sage determineur Aristote Et qui plus de ce vouldra savoir quiere le philosophe en sa methaphisique Mais comme la matiere soit obscure de ce/ a tant souffise/ Et ainsi comme en une riche mercerie ou tresor/ sont avec perles diverses pierres precieuses de plusieurs vertus couleurs et pris/ les quelles au goust et plaisances de divers barguigneurs sont requises/ Soient ycestes choses ou tresor de ton volume reservees aux hommes scienceux de soubtil entendement/ Et passent oultre les moins expers aux choses plus legieres et communes Et tres ore soit changié l’ordre de nostre rethorique en plus vulgare et elegant parleure en retournant a nostre premiere arrenge te soient assés souffisantes les preuves des choses devant dictes/ me tenant quitte de promesse a toy par moy faite/ C’est a savoir de te clairer les termes de ma poissance manifestes mesmement es hommes plus sages & de plus soubtilz engins. De l’ombre la poissance que elle a. Or t’ay je assez prouvé par ce que devant est dit comment je suis cause premiere des oeuvres humaines & que se precedent ne fusse aucune oeuvre n’aroit effect es humains/ pource te vueil reprendre en aucune partie de tes dis/ en ton livre intitulé de la mutacion de fortune le quel compilas par grant labour & estude/ Car combien que par moy t’en venist l’invencion trop faillis sauve ta grace/ Lors que tu tant octorisas la poissance de dame fortune que tu la dis estre toute ordenaresse des fais qui cueurent entre les hommes/ Et ma poissance souveraine sur toutes influences refleccibles es oeuvres communes qui precelle toutes autres/ tu oublias/ Si ne te soit honte offrir l’amende a moy suppellative de toy en ceste partie injuriee te rendant repentie coulpable comme mal avertie me recongnoissant suppellative sur toutes poissances relatives ça bas de dieu ordenees/ Et que ceste chose te soit magnifeste vueil que me desnoues cest argument/ Je te demande le quel est plus noble ou l’acteur qui est principe de la chose premierement mise en fourme/ ou l’euvre qui despent et vient de la poissance de l’acteur premier princippe/ Et moy a elle/ certes dame je tiens que comme dieu soit principe de toutes choses/ Et aussi comme dit aristote l’entendement est le souverain des biens/ Car a lui tous les autres obeissent le premier principe des choses je confesse le plus parfaict en accion de oeuvre comme ci devant est assez prouvé/ Et elle a moy/ bien respondis/ or t’ay vaincue par ton meismes jugement/ Car non obstant qu’entendement soit devant moy quant en concept Toute foiz suis je premiere cause de toutes choses bonnes ou mauvaises faictes ou pourchacees par pensees ou oeuvres humaines/ Et donques comme devant est dit s’il est ainsi/ ce que si/ que principe soie des speculacions et toutes choses ouvrables/ comme il appert Je conclus vraye ma preposicion que je precelle les choses ouvrees/ Et que fortune a qui tant de poissance atribuez/ n’est fors ma chamberiere mercenere comme conduisarresse des oeuvres ja par moy disposees a mettre a effaict. ¶ Mais affin que il ne semble que par mouvement de envie lui vueille soubtraire la fame de son auctorité/ te cognois estre vray qu’en disposicion de oeuvre/ fortune a poissance de conduire les fais particuliers bien ou mal selon le soufflement de son influence/ mais te souviegne que differens sont noz mouvemens/ car de rechief te dis que je euvre en esperit et fortune ne peut ouvrer fors es choses ja par moy deliberees aptes a recevoir ses influences es choses dehors et foraines mais es repostailles de la pensee es quelles je sui muciee n’a nulle poissance/ doncques tu peus cognoistre que elle est serville et villaine vers mon auctorité comme elle soit au monde sicomme superflue comme le las de l’adversaire/ Et je soie celle sans qui nulle chose n’est faite et sans qui nul fruit d’oeuvre ne pourroit l’omme conduire a perpetuelle gloire. Encore dit de sa poissance. Que te diroie de mes poissances n’en doubtes point que elles passent & precedent toutes les choses mondaines Et t’acertaine que par moy singulierement depuis le commencement du monde a esté est et sera gouverné tout l’univers et fondé sur moy es choses ouvrees par les hommes/ Et non obstant que grans sciences lois escriptes/ rigles de princes coustumes de terres soient en commun usage/ si te di je que precede toutes leurs poissances/ et plus puis que toutes ensemble/ et qu’il soit voir il appert par ce que non obstant ycestes coustumes ou establissemens souventes foiz/ fais errer meismes ceulx qui y sont les plus savans et les plus expers et entrer en tieulx argumens dont les conclusions sont faulces et dampnables sicomme ja est prouvé par ce qui est dit des anciens philosophes. ¶ Et pource que tu attribues en ton dit livre de la mutacion de fortune/ elle estre menarresse des antregiez des seignouries/ je te dis que de tous yces mouvemens suis le premier motif/ ne fu je celle qui tres le .ii.e aage fis a nambroth le jayant par presompcion ediffier la fort cité et tour de babiloine qui onques n’ot pareille comme ci apres sera dit/ si le fis errer tant qu’il dechut de l’atainte de sa pensee/ apres ce temps comme je fusse fort fichee ou cuer du roy de ninive par moy mettre a effaict/ ne vint il a chief de prendre la dicte fort cité de babiloine/ la quelle sa femme semiramis par moy et mon industrie moyennant son chevalereux courage fist ancores enforcir et brayer de bons fossez et bastides. ¶ Item apres ce lonc temps ne donnay je cuer a cirus de guerroyer astiagies son ayol qui a occire l’avoit commandé si me poursuivi tant que il avint a son entente de ce et de tout oryant qu’il conquesta/ et pour ce que la matiere en est belle ancore diray de sa conqueste/ Comme je donnasse cuer et hardement a Cirus de emprendre fortes choses ce meismes recite abacut en sa prophecie Il prist la dicte cité de babiloine la quelle prise fust tant merveillable que ainsi comme dit Orose & saint augustin a peine pout il lors estre creu que par vertu humaine fust conquestee ne qu’en ceste mortelle vie ediffiee et puis prise peut estre. Car si qu’il dit elle estoit en bel espace assise de toutes pars tres fort en sa disposicion façonnee en quarrure/ la haultece de ses murs estoit .l. coubdes/ et l’espesseur autant par .iiii. fois/ tous les murs estoient de pierre cuite enlaciez par cyment/ et avoit cent portes d’arain/ et environnoit .CCCC.lxxx. estades qui valent .li. milles C’est assavoir .xxv. lieues et demie françoises/ Car sicomme raconte orose Comme Cirus eust conquis auques tout orient & voulsist subjuguer babiloine la quelle lui restoit Comme a un des assaulx que il fist il perdist ou fleuve de euffrates qui cignoit la cité de ses chevaliers/ cellui que il amoit le plus/ le quel aussi surmontoit tous les autres en valeur et proece/ Il jura que cellui fleuve le quel avoit noyé si vaillant chevalier deviseroit en tant de parties que nulle part de lui ne seroit si grant que a une petite femme venist aux genoulx/ et ainsi fu car en .CCCC. & .lx. ruisseaulx par force d’ommes en l’espace des champs il devisa le fleuve/ si que le tres noble fleuve qui passoit par dedens la cité osté et subtrait de elle/ fu subjuguee/ et prise. Encore de ce mesmes & des seignouries. Pour briefté je laisse infinies autres choses lesquelles ay faites faire pendant ce temps & meismes celles que tu imputes a fortune/ ne vindrent de moy/ Les premieres invencions des fais que ains leur achevement vy en pensees/ non obstant que souvent les veoye autrement qu’ilz n’avenoient de tous les fais des conquereurs passez. ¶ Ne fis je apres autres aventures passees/ a croire au roy xerses qu’il conquerroit toute grece en lui ramentevant sa grant poissance/ Dont pour ce faire assembla tant de gent que mons et vaulx en estoient couvers/ Si avoye couleur de jugier pour lui la victoire/ mais comme fortune me soit souvent contraire/ par especial en fais de guerres et es choses avenir/ je confesse que elle voluntairement donna la victoire aux grieux tresbuchant cellui poissant es las de maleurté sicomme toy meismes as autres foiz apres autres aucteurs recordé en tes volumes Toute foiz non obstant que a lui fusse mençongiere et decevable fis je la premiere naiscence de celle emprise. ¶ Apres ce temps par moy et par mon amonnestement furent commenciees et continuees les grans guerres troyennes/ Ne fis je a croire a leomedon roy de la premiere troye que les gregois dessendus a son port/ quant aloient pour querir la toison d’or estoient venus pour espier sa terre et lui pourchacier dommage/ et par moy sans cause envoya congeer de sa terre jason hercules et les autres barons villainement/ pour le quel despit je me mis ferme ou cuer des dis barons et leur promis que bien s’en vengeroient comme ilz si firent apres/ car je fus simple et nice ou dit roy leomedon qui follement me crut et mal se gaita de yceulx gregois en qui je fus sage et vraye/ si que sagement menerent leur fait par l’ayde et disposicion de fortune conduisaresse de leur bon eur/ si que toute destruirent et ardirent la cité/ le roy occirent et toute la gent. ¶ Apres ne fis je a priant filz leomedon rediffier la seconde troye qui tant fu belle fort et poissant que merveilles estoit a comprendre/ par moy apres entreprist la vengence sur les grieux Si fis aler paaris en grece et ravir helayne et tout faire ce qui en fu fait/ Et par mes amonnestemens avec l’ayde ou nuisance de fortune perdoient troyens et gaignoient Je fus cause de la mort hector/ car je lui faisoie a croire que il n’avoit garde d’achiles qui sans cesser le gaittoit/ si que au derrain l’occist/ Semblablement depuis deceu je achilles tant que il cheut es las de la royne Ecuba qui a bonne cause le hayoit/ tout pour moy et par mon pourchas fu au derrain troye prise et destruite/ De la quelle fis apres partir plusieurs barons du sanc real a tout grant foison de gent qui par mer s’espandirent en diverses contrees dont eneas et sa compagnie arriva en ytale si lui fis couvoiter la fille du roy latin/ et pour celle cause emprendre guerre a turnus qui lui chalengioit Dont d’icellui eneas venu a son entente deffendirent puis les fondeurs de romme. Dit ancore l’ombre des choses que elle a faites faire. Depuis ensuivant n’ay je esté celle qui les successeurs de yceulx ay amonnestez d’emprendre les grandes et merveilleuses choses/ lesquelles par l’ayde de fortune a eulx propice/ tant esploitierent et par leur travail ayde et sens en lonc espace de temps que ilz conquesterent le monde Sicomme les histoires de leurs gestes/ et toy meismes apres autres en ton dit livre de mutacion de fortune le recordes/ le recitent/ si n’est besoing de plus en faire longue narracion. ¶ Aussi ne fus je celle qui au grant Alixandre tres sa jonesce donnay l’invension d’emprendre les fortes et fieres batailles en lui promettant fortune en son ayde qu’il seigneuriroit sicomme il vint puis a chief de tout le monde/ Semblablement devant et apres ensuivant de toutes conquestes et seigneuries/ et toutes estranges choses mettre a effaict des choses a l’aventure par propos deliberé/ ay esté moyen et principe/ ce ne me peus tu nyer/ se tu ancores par grosseur d’entendement ne m’ignores/ qu’en dis tu me suis je assez magnifestee/ me cognois tu/ et moy a elle/ dame dites ancore. A quoy veulx tu que plus je dye. Ne vois tu l’experience de moy manifeste meismes chacun jour ou pays ou tu demeures par les debas que je fais par mi la ville et en toutes places/ Regardes et avises quieulx descors/ mais meismement entre les princes qui sont d’un sanc et amis naturellement par les diversitez de moy qui suis contraire en eulx le fois devenir comme ennemis maintefoiz et en chacun suis si afferme contrairement en ce qui lui semble bon que l’en ne me peut desmouvoir Car chacun dit que il a droit et ainsi le veult soustenir et a discuter leurs raisons ne vois tu les assemblees qui en sont faites de plusieurs que on dit sages et a chacun pour soy de ses aderés qui different les uns des autres/ Lesquelles choses sont causes de grant inconvenient/ car en pays royaume/ empire ou cité ou je soie ou aye esté communement de plusieurs guises contraires & mal accordables/ ne fu que rebellion et grant debat commocion et bataille ne fust/ ne autrement ne peut estre Car certes la ou je ne suis d’un commun accord/ n’ara ja paix/ mais du tort ou droit d’entre lesdiz princes supperieurs je me tais/ Car de ce determiner n’est mie mon office qui tous jours suis en doubte et non certaine/ mais de ce demander couvendroit a la tres clere resplandissant poissant deesse que tu veis enclose en chartre et emprisonnee & de qui fraude s’estudie a estoupper et clorre les voyes de sa lumiere sicomme a toy meismes fu apparant et de qui les menistres quoy que leur desplaise n’osent soubz peine d’estre batus tinter ne lever l’ueil/ mais de leurs descors fois je sourdre par toutes places nouveaulx debas entre leurs ministres et aderez et par toute la ville en deviser negativement l’un contre l’autre/ et meismes a de ceulx qui ne les cognoiscent en estranges terres en qui je me fiche diversement/ Si les fais entre batre souventes foiz/ et questionner mesmes de chose qui riens ne leur touche/ Disant l’un contre l’autre Tel seigneur a droit pour tel cause et pour tele/ L’autre replique que non/ et ainsi par non a/ si a/ si fu/ non fu/ je fais gent entre occire souventes foix meismes es tavernes souvent avient adont suis je forte quant il y a vin & plus je y abonde & fais mesler gens de la chappe a l’evesque/ ou des guerres de anthioche le quel a ou droit ou tort et ou le quel est plus sage/ ou le quel ne l’est mie/ Et ainsi je demonstre es humains leur ignorence de eulz debatre de ce de quoy riens ne scevent et ne leur appartient/ O quel folie en homme de qui le sens doit gouverner raison/ se fonder sans elle sur moy & jugier par moy certainement de chose non certaine et que ilz ignorent Que t’en diroie je fois vivre les gens par moy/ c’est a entendre disposer leurs fais selon ce que je leur conseille/ Et quant ilz pevent avenir a l’ordre de vivre que je leur fois desirer/ adont sont ilz contens de la chose que ilz vouloient/ mais je suis different en eulx/ Car je fais penser et cuider a l’un que bon lui soit/ une maniere de vivre/ et certaines choses que il appete lui sont bonnes/ que a un autre ycelles meismes ne plairoient point/ mais lui plairoient toutes contraires/ Et cestes differences viennent selon les condicions et aages des gens sicomme je suis autre es jones que je ne suis es vieulx/ et meismes es .ii. aages entre eulx suis je different/ Et pour ce que ainsi je differe suis je cause des debas du monde/ et chacun me cuide avoir en soy meilleur/ je fais sembler a un homme que avoir des flourins il n’est plus de joye Je fais sembler a un autre que avoir belles dames il n’est plus de bien/ aux uns juger que science est souveraine chose/ aux autres que chevalerie est meilleur et plus noble & ainsi des autres choses/ Et pour ce ne fu onq si parfaict pas jhesuscrist comme homme qui peut bien vivre ne estre agreable a l’oppinion de tous Toute foiz te dis je bien que vivre vertueusement & bien faire si emporte le plus des voix des gens. Ce que l’ombre disoit des arquemistes. Comment cuides tu que je soie comme j’ay dit fort atachee es speculatis clercs & entre les autres es arquemistes qui la science cuident trouver par les termes entendre de aucuns livres obscurs de faire l’or/ merveilles est car s’il est voir que aucuns philosophes par investiguer les secrés de nature telle art trouvassent/ la quelle chose fort semble a croire/ toutevoie tant sont couvers estrangement les textes de leurs aucteurs que bonnement le sens humain ne les scet ne mais a l’aventure concevoir/ ne sentir fors telement quellement/ mais voy ci qui deçoit les ouvrans en ycelle art que ilz dient et touchent que comme il n’apartiengne que aux ignorans ruraulx soit descouvert si noble secret/ pour le bien des soubtilz l’ont voulu si mucier que des rustiques ne leur soit tolu ne fortraict/ Et ycy est la decevance/ Car chacun qui s’i fiche cuide estre du nombre des plus soubtilz & abuse en son entendement en estudiant yceulx livres lesquieulx baillent le sens de leurs termes/ a si doubles ententes que le plus cler voyant n’i voit nulle goute mais adont je me fiche en eulx et leur fais a croire que l’asemblement des metaulx sublimez diversement comment et de quoy doivent estre mistionnez de diverses matieres et nourris en feu attaindront l’art de nature et par espace de temps sera converty en or ou argent et toute voye l’un entant la maniere du composer en une guise l’autre en un autre/ et le tiennent secret les ouvreurs sans conferir ensemble de paour que ce que ilz en croyent et la maniere de leur ouvrer peust aviser un autre de trouver la voye d’i attaindre ne jamais nul ou pou n’euvre de la guise de l’autre/ et ainsi gastent le temps et perdent et font grant mise follement par vaine esperance qui par aventure en leur erreur les reconforte pour un pou de apparance ou conjecture de aucune congelacion estrange faite par diverses mistions & feu quelque matiere dure remettre ou pouldre en eaue ou autrement cuident par ce avenir au degré ou ilz tendent lesquelles choses sont toutes frivolles/ et tournent a folies et a chetivoison et toute jour et nuit font feu contemplant un fournel/ mau peus & mau vestus se paissent de vent/ & la font chasteaulx en espaigne pensant comment il seront aise quant l’or saront faire/ et quieulx despens ilz menront/ Et que cuides tu que de tieulx arquemistes sourdent aucune fois de grans trompeurs qui cabusent les seigneurs & leur font a croire que se ilz eussent quelque mise n’est mie doubte que ilz ont ja ataint un grant secret si en tireront grant prouffit/ et ainsi par quelque apparance de verité soubtille en ycelle art monstrent signe de aucune chose voir semblable/ et au derrain tout tourne a neant comme tu as veu meismes en ton aage avenir de plusieurs de quoy il estoit grant renom/ et maintes gens foy y adjoustoient Sicomme d’un en alemaigne que on nommoit maistre bernard qui tant se faisoit renommer par l’estat que il tenoit/ et meismes a ton pere envoya il lettres/ et tant fist que trop de gens foy y adjoustoient/ et aloient de toutes pars clercs devers lui/ et toutevoye au derrain fu trouvé que tout estoit neant et tromperie/ et de autres plusieurs que tu as veus que au derrain on faisoit mourir par leurs dessertes par cabusemens faire a seigneurs/ Et avient aucune foiz que je me fiche si en eulx par la speculacion que ilz y ont trop ententive/ je les fois devenir tous fantastiques & si astras que ilz sont comme inconversables. ¶ La bonne galle est quant de aucuns folz non lettrez s’i boutent qui mieulx cuident entendre et exposer les textes des aucteurs que les plus savans & les lisent et ymaginent dessus/ et dieux scet les bonnes fantasies/ que ilz y ont sicomme un orfevre qui volt devenir arquemiste/ mais il le fu au contraire de la ou il tendoit Car or cuidoit faire et le deffist/ comme il fust riches homs et povre devint/ cellui estudiant un chapitre entendi que mercure c’est a savoir un metal que ainsi ilz nomment estoit la matiere ouvrable de la science Et comme il passast oultre tousjours lisant de rechief entendi que la cause de la perfeccion de l’oeuvre estoit matere reputee ville/ Et que on trouvoit sur le fiens gittee sicomme chose desprisee Adont comme cestui fust fort ententif a bien speculer ceste chose que ce povoit estre Au derrain determina en soy que vrayement par ce que dit estoit/ c’est a savoir mercure que comme les aucteurs eussent baillez leurs termes obscurs/ on devoit retourner le mot/ c’est a savoir cure ton marc que il entendi par la fiente de l’omme que l’en devoit curer/ et ancore plus de ce/ le certiffia que il trouvoit que sus les fiens comme chose ville estoit trouvee/ si s’arresta sus ces poins/ et commença a ouvrer en sa fiente en la faisant secher au feu et faire pouldre et la fin en fu que il puoit comme charongne/ & chacun le fuioit et se moquoit on de lui qui cuidoit faire de fiante or/ et aloit sus les fiens a grant diligence les querir/ un autre estoit qui cuidoit de savates faire or/ et aloit sus les fiens a grant diligence les querir puis les bruloit/ et tant ouvra que les voisins qui empulantis en furent le chacierent. ¶ De tieulx folz est il assez ouvrans en celle science a qui n’en remaint ne mais parte de temps & povreté/ Et qu’il ne soit mie dit selon le proverbe commun que les sciences n’ont plus fors ennemis que ceulx qui les ignorent/ que elle soit vraye ou non je ne te acertaine mie/ Toutevoie je te dis sans prejudice que la difficulté d’elle par vehementes raisons que comme les oeuvres de nature soient impossibles a ataindre sophistiquement donroit cause a plusieurs des plus avisez de non y perdre temps et mise par folle occupacion/ en esperance vaine y adjoustant grant foy. Des nobles que l’ombre dit que elle deçoit. Des nobles qui suivent les armes sont ilz point que tu cuides par moy deceus/ certes si sont souvente foiz plusieurs y a Car je les fais abuser du fait des armes par ce que ilz n’en scevent ou ne veulent savoir les propres termes lesquieulx sont tieulx. Il ne loit point a nul s’armer pour aler en bataille ne se combatre fors pour certaines causes C’est a savoir pour la loy de dieu contre les mescreans ou herites contraires a la foy/ Item pour deffendre l’eglise/ son prince/ son pays/ sa terre/ le bien publique/ le droit des ignocens/ & ses propres choses/ & autrement n’est loy qui le permette ne n’est bataille juste & sans dampnacion. Or y prens garde se de tous ceulx qui s’arment sont droiturierement ses poins gardez/ et se nulz y vont sus mauvaises querelles. ¶ Bataille que tu le saches justement faite est premise de droit divin & du droit des gens qui n’est autre chose meismes ce dit la loy/ que entencion de remettre a droit par force d’armes chose par autruy deraisonnablement contendue/ Si ne regarde de sa nature ne mes retourner droit a droit & faire convertir guerre a paix/ ne les maulx que fais y sont/ de la nature de bataille ne sont mie ains par mauvais usage acoustumé en guerre sont fais/ & que batailles en justes causes soient de dieu premises appert en plusieurs lieux de l’escripture/ sicomme il ordena a un homme nommé jhesus comment sa bataille establiroit/ et que une embuche feist pour surprendre ses ennemis/ Et de ce dient voz docteurs que dieux est vainqueur et ordeneur des batailles comme par plusieurs fois est apparu. ¶ Mais ceulx a qui je fais faire armes perilleuses & sanz raison/ et leur donne a croire que grant honneur leur sera pour l’amour de leurs dames sans visiere ou un bras nu/ ou descouvert d’aucun de leur harnois/ ou en aucun autre peril emprendre fait contre un autre a qui n’ont nul contens je les deçois/ et pareillement ceulx qui tieulx armes leur aceptent/ et a eulx se coupplent. Ce que l’ombre disoit des gens d’armes. Et ceulx qui donnent gage pour a oultrance en champ de bataille combatre sus aucune querelle soit droit ou tort/ je te promet en ce cas sont par moi deceus/ car vers dieu mesprennent & pechent grandement/ et te diray comment/ combatre en champ est contre droit divin qui est de dieu et de sainte escripture contre le droit des gens Le civil/ le decret/ et contre droit canon et cellui qui l’acepte/ pareillement peche La cause est que a dieu miracle ne chose contre nature on ne doit demander/ comme telle chose faire soit une maniere de tempter dieu esperant il aydera au droit/ Si ne doit/ Si ne doit estre quise de la voulenté de dieu experience/ Et que ceste espreuve soit faulse/ on a veu maintefoiz que cellui qui droit avoit estoit vaincus/ sicomme une decretale raconte de .ii. freres qui furent restez d’un crime & comme ilz fussent de celle cause vaincus en champ tout ne fussent ilz mie coulpables & apres la verité fu sceue par la confession meismes de ceulx qui le delit commis avoyent/ et pareillement de plusieurs a esté prouvé la loy deffendi que teles preuves non droitturieres plus ne fussent en usage/ Item juges sont establis pour cognoistre des causes et faire droit/ Et est loy ordenee que nul de sa propre cause ne soit juge/ Et cellui le veult estre qui prouver veult son fait par soy meismes et par sa victoire qui est soubz la distribucion de fortune/ et a l’aventure Item le droit canon commande que au pape l’en obeisse/ le quel soubz peine d’escommenie deffent comme chose reprouvee contre droit de justice/ que tele espreuve ne soit faicte Et tu me diras donques comment seront punis les mau faicteurs secrés Je te respons que dieu pour lui s’est reservee la punicion/ et dit un decret que se en ce monde tous maulx pugnis estoient/ le jugement de dieu dont point de lieu n’aroit/ et cellui presomptueusement le se veult attribuer qui la victoire de la vengence s’en veult donner. ¶ Et comment est uns homs si folz qui plain de vices et de pechiez se sent/ poson que il ait bonne querelle en aucun cas/ que il cuide que a lui pecheur dieu face miracle de la chose muciee que il quiert/ mais se il estoit sage paour devroit avoir de la pugnicion de dieu en sa juste cause/ Comme souvent aviengne & soit avenu que dieu a dissimulee vengence du pecheur ou cas ou desservi l’avoit/ et puis le pugni en chose dont estoit ignocent. La fin de l’oroison de l’ombre. Que dis tu souffist il t’ay je assez compté du fait de mes poissances desquelles ne pourroyes en ta vie comme autre foiz t’ay dit tous les exemples ouyr tant en y a et si divers sont/ Scez tu ancore qui je suis/ Et moy a elle dame congnoistre vous cuidasse/ mais les raisons contradictoires que me narrez/ vaciler me font en vostre cognoissance/ car se bien l’ay entendu/ tres au premier me dites que la ou verité est attainte/ ne povez arrester/ et toutevoye bien sçay et suis certaine que en maint cas m’avez pure verité ycy endroit clariffiee. Si ne sçay entendre comment ce peut estre que chose doubteuse tesmoing puisse estre de verité pure Et elle a moy fille envers le sens de ton entendement & escoutez et nottez/ Car je te promet que quoy que autrefoiz en divers cas te fusse menterresse en cestui cy t’ay je dit voir/ se bien l’entens & ne m’i contredis/ S’il te recorde de ce qu’ay dit/ c’est assavoir que cause suis moyennant estude & entendement de faire attaindre les choses vrayes/ mais bien est vray que aussitost que attaintes sont je me depars en cellui cas ne plus n’y arreste Et qu’il soit voir ainsi l’as esprouvé/ car non obstant que ces choses t’aye dictes non pas moy les t’ay certefiees mes les ses par le moyen d’estude qui raporté l’a a ton entendement/ le quel par raison est certain que ainsi soit/ pource en ces cas de toy me partiray et en lieu te remaindra certaineté/ Et par plus groz exemple ne te souvient il de moy et de ma cognoissance par les divers cas que je t’ay fait mettre en termes & faire plusieurs lectures. ¶ Ne fus je celle qui mist le debat entre les clercs disciples de maistre jehan de meun comme il s’i appellent/ Et toy sur la compillacion du rommant de la rose du quel entre vous contradictoirement escripsistes l’un a l’autre chacune partie soustenant ses raisons/ sicomme il appert par le livret qui en fu fait. Responce de christine a l’ombre. Adont comme mon entendement se apperceust par clere cognoissance qui estoit celle qui tant araisonnee m’avoit je dis ainsi. ¶ Ha dame oppinion poissant et forte voirement vous doy je mon bien cognoistre/ car tres m’enfance oz je vostre accointance/ Et certainement je cognois et confesse vostre auctorité estre de grant vigueur et poissance/ et quoy que vous soiez blasmee souventes foiz/ qui bien de vous use ne peut errer/ et mal/ pour cellui en qui vous n’estes saine/ mais puis que il vous a pleu de vostre grace tant m’onorer que a moy si clere evidemment vous estes magnifestee me racontant voz grans proprietez/ encore vous requier que ennuy ne vous soit de me declairier aucunes demandes Et elle a moy/ fille dis ce qu’il te plaist. ¶ Dame puis que il est ainsi que de vous vient la premiere invencion des oeuvres humaines bonnes ou malles/ rudes ou soubtilles selon la disposicion des entendemens comme dit avez/ plaise vous me certiffier se es choses par vous engendrees en moy lesquelles a mon povoir par le moyen d’estude & de tel science et entendement comme j’ay qui en mes compilacions et volumes sont declairees se en aucune chose y ay erré/ comme si sage ne soit qui aucune foiz ne erre/ Et elle a moy amie chiere soyes en paix car se ainsi estoit mieulx vouldroie tart que jamais les amender Car je te dis que non/ Tout t’ay je blasmee de ce que prerogative de honneur vols comme je ay dit devant donner a fortune et moy comme je soie princippe y oublias mais non pour tant faulte n’y a. ¶ Non obstant que par moy maint s’en debatent diversement Car les aucuns dient que clercs ou religieux les te forgent Et que de sentement de femme venir ne pourroient mais ce sont les ignorens qui ce dient/ Car ilz n’ont pas la cognoiscence des escriptures qui de tant de vaillans femmes sages et lettrees et mesmement prophetes qui ou temps passé ont esté font mencion/ Et comme nature ne soit amendrie de sa poissance/ ancore en peut estre/ les autres dient que ton stile est trop obscur/ et que on ne l’entent/ si n’est si delitable et ainsi diversement le fais aux uns louer & aux autres reprimer de loz/ comme chose quelconques estre a tous agreable soit impossible/ mais tant te dis que verité par le tesmoing de l’experience ne seuffre le blasme avoir effait sur le loz/ si te conseil que ton oeuvre tu continues comme elle soit juste Et ne te doubtes d’errer en moy/ Car tant que je seray en toy fondee sur loy/ raison & vray sentement tu ne mesprendras es fondacions de tes oeuvres/ es choses plus voir semblables non obstant de plusieurs les divers jugemens/ les uns par moy simplement/ les autres par envie/ Car je t’acertaine que quant elle et moy sommes ensemble adont se font les tres faulx jugemens ne il n’est si bon qui y soit espargné/ et adont suis je perilleuse quant envie me gouverne/ si faisons la personne avuglee es autruy choses et en son meismes fait qui en soy nous a si lui rongnons le cuer/ ne reposer ne la laissons/ et vouloir lui donnons de faire maint maulx qui accomplis sont aucune foiz/ & mal est gouverné cil qui chiet entre noz mains ja si bon ne sera ne si poissant. ¶ Ne veames nous jadis les portes de romme au preus julius cesar qui tant victorieux s’en retournoit/ & au dernier tant pourchaçames que il fu occis/ Assez de teles en avons faites/ ne il n’est si sage qui garder s’en sache/ Si t’ay assez narré de mes aventures et a tant souffise/ Car parce que je donne a croire a l’un que une chose est bonne et bien faite ou que elle est vraye/ & a l’autre tout le contraire/ dont sourdent bataille et maint debas/ la prolicité de mes narracions si racontees pourroit aux lisans a ennuy tourner/ Et si te prophetise que yceste lecture sera de plusieurs tesmoignee diversement les uns sur le lengage donront leur sentence en plusieurs manieres/ diront que il n’est pas bien elegant Les autres que la composicion des materes est estrange/ et ceulx qui l’entendront en diront bien/ et le temps avenir plus en sera parlé que a ton vivant/ Car tant te dis je ancore que tu es venue en mauvais temps Car les sciences ne sont pas a present en leur reputacion ains sont comme choses hors saison/ et que il soit vray/ tu en vois peu qui a celle cause soient en la maison de fortune sus haulciez. ¶ Mais apres ta mort vendra le prince plain de valour et sagece qui par la relacion de tes volumes desirera tes jours avoir esté de son temps et par grant desir souhaidera t’avoir veue Si me suis a toy descripte/ Or diffinis de moy ce que il t’en semble. ¶ Et moy a elle dame comme la descripcion de vous meismes/ m’en appreigne la diffinitive. Je dis que comme parfaictement/ ore vous cognoisce/ que vous voirement estes de ignorence fille adhesion a une partie en doubtant tous jours de l’autre/ Et de ce je m’avise ce que de vous dit aristote ou premier livre de posteres que cellui qui vous a doubté tous jours que autrement puist estre que ce que il pense/ comme vous soiés non certaine/ Et saint bernard dit aussi ou .v.e chapitre de consideracion que vous estes ambiguë et povez estre deceue/ Si dis et conclus que vous estes adhesion a une partie/ la quelle adhesion est causee de l’aparance de aucune raison prouvable soit que l’oppinant ait doubte de l’autre partie soit que non/ de vostre poissance je dis que pour l’ignorence qui est es hommes que par vous est plus le monde gouverné que par grant savoir. Explicit la .ii.e partie du livre de l’avision christine. Ci commence la tierce partie du livre de christine/ le quel parle/ de confort de philosophie. Es escolles dessus dictes apres ces choses comme je traçasse de lieu en lieu/ cerchiant divers estudes fus convoyee par maintes chambres et haulteces de pluseurs degrez/ Et comme les passages et destrois des diz degrez fussent penibles et difficiles a ceulx qui acquerir et posseder les vouloient a qui ne fust souffert se trouvé souffisant ne fussent a moy qui transitoirement estoie errant par yceulx assez legiere fu la voye/ Et tout ainsi comme a un estrangier voyageur lyement souventes foiz sont monstrez et ouvers les tresors des princes par ou ilz passent affin que ilz voyent la magnificence et richece de yceulx si que recorder le puissent en leur pays/ fus paisiblement & sans grant dangier menee par toutes les places des dictes estudes/ Et de raconter la beauté et tresors que je y vi/ me passe pour briefté/ mais tant en di que avec la beauté inextimable qui m’y apparu/ la soubtilleté des divers ouvrages comment furent fais ouvrez et tissus et de quieulx matieres mon entendement n’estoit digne de concevoir ne comprendre ne partir ne m’en povoie de plus hault monter pour veoir diverses beautez fu souffisant seulement mon bon desir et amour a m’empetrer lieu et licence de plus savoir ainsi convoyee par la segretaine de philosophie abbesse et superieure de ycellui couvent/ fus pourmenee par tous les estages de toutes beautez et bonnes choses remplis et combles/ Et comme ancore plus de grace receusse de ycelle noble conduisaresse de sa liberalité & plaine largece me donna congié de hardiement mettre la main/ et prendre tant comme porter pourroie des tresors de ces coffres Et je de ce non reffusant comme couvoiteuse de en enrichir en la merciant me baissé pour mon giron en emplir/ mais comme trop pesant fussent a mon corps femenin et foible selon mon grant desir/ petit en emportay/ et non si peu que je le donnasse pour quelconques autre tresor ou richece. ¶ Ainsi convoyee fus menee tout au plus hault sommeton ou quel avoit situee une tres belle sale clere luisant et de fines couleurs/ tres richement painte ou furent pourtraictes toutes sciences et leur deppendances au tour des parois et tout par mi la dicte sale avoit fourmes arrengees pour seoir les escoliers escoutans les leçons des maistres/ la en droit lisans en chayere qui la estoit haulte et moult bien ouvree/ moy joyeuse de estre parvenue a si bel estre m’amusoie aux riches pourtraitures vivement faites et de soubtilz ouvriers. ¶ Adont comme je voulsisse encercher de toutes choses avisay un huissellet de yvoire moult bien ouvré le quel estoit fort cloz et barré/ ainsi comme ma veue moult ententive estoit celle part comme assez pres j’en fusse/ presumant par les congectures que je veoie/ que grant tresor encloz la devoit avoir reputant eureux l’entendement a qui la cognoiscence en seroit donnee desiroie que tel digneté fust a moy descouverte/ Lors si que je estoie en ce penser ouy la dedens moult grant remuement & diverses voix femenines de doulce et soueve parolle/ tost apres ouy barres tyrer clefs tourner et le dit huissellet desverrouller/ adont comme je fouisse celle part pour tost estre preste sans ressongner presompcion ou mesprenture a me ficher ens/ oz le visage tout au plus pres/ mais aussi comme je avoie esté joyeuse esperant celle ouverture fus a l’ouvrir autant esmerveillee et remplie d’espoventement Car si tost que ouvert fu une si tres grant lumiere me feri en la face et es yeulx que cuiday de tous poins estre avuglee par quoy de paour et de la merveille cheus sur le sueil de l’uis pasmee me repentant d’estre si hault montee/ adont comme ancore a terre fusse gisant/ ycy une voix femenine de ce pourpris haulte sonnant mais non espoventable ne orrible/ ainçois doulce belle et tres gracieuse/ mais ainsi que se auques loings de moy fust je la ouoye/ la quelle m’appella par mon nom disant mon ancelle tres loyalle lieves sus et ne te espoventes Car l’amour que as a moy et le desir qui te maine en suppleant ton ignorence te sera valable/ adont moy resjouye doublement/ c’est a savoir de ce que voix de dame tres venerable me sembloit m’appelloit Et secondement que saroye partie de ce que desiroye me ravigora et tres fort esjouy/ Lors de rechief comme desireuse de choisir a l’ueil la beauté merveilleuse qui m’aparoit estre ou lieu dont sailloit telle clarté/ adreçay ma veue de plain visage/ tout par mi le dit huissellet/ mais tout ainsi comme quant par mi le ray du souleil on regarde contremont ou ciel il semble veoir en l’espere luisant un visage si cler que l’ueil humain ne le peut souffrir/ semblablement la vi une tele tresluisent espere que toute la chambre emplissoit de tres grant resplandeur/ Et environ celle espere avoit .ix. dames luisantes comme estoilles desquelles je avoie cognoiscence que establies estoient pour elle servir et moult me sembloient de grant reverence si baissay incontinent ma veue ja toute esblouye metant ma main au devant dis ainsi/ Tres haulte et tres noble creature de la quelle la cognoissance m’est occulte/ puis que il vous plaist tant m’onorer que vostre servante & ancelle me daignez appeller/ plaise vous me certiffier donques la proprieté de vous ma venerable maistresse/ Et elle a moy ma mechinete saches que non obstant que tes yeulx foibles ne me puissent clerement veoir pour leur grosseur/ que je suis celle qui nuement et visiblement s’aparu ou temps de l’exil/ et de sa tribulacion/ a mon chier ame filz boece le tres sollempnel philosophe/ le quel par mes confors je garday de mort et de langueur desesperee. Ce que christine dit a philosophie. Quant j’oz ainsi ouy parler la tres venerable deesse par les quelles paroles et enseignes elle me fu manifeste/ adont a .ii. genoulz je me gitay ainsi disant/ o tres glorieuse sapience de la quelle toutes cognoissances despendent tant de bon cuer remercy dieu et toy qui tant benignement m’as fait digne de ton accointance/ et n’as eu orreur de moy femme ignorent non digne de descoudre les lassemens de ta chaussemente/ ains comme maistrece tres amiable/ m’as a toy appellee/ la quelle humilité me certefie que tu ne refuseras a moy ta chamberiere des petites mietes de ton relief souffisans pour sa nourriture Car comme tu eusses nourry du laict de tes mamelles et de tes precieux mets ton tres amé filz dessusdit qui tant t’onora et ama ne l’oublias pas ou temps de sa grant neccessité/ et pareillement plusieurs autres de tes enfans/ semblablement je suppose que moy ta serville mercenaire que tu as nourrie des demourans des grosses viandes de tes tables tu n’oublieras ains donras remede reconfortant les navreures de ses infortunees adversitez/ car pour celle cause croy que dieu saint esperit pere des povres & leur vray administrateur m’a conduite au terme de ta cognoissance Sicomme il scet les pesanteurs de mes perplexitez/ aux quelles reconfort ne m’est presenté par les humains de nulle part/ Et comme assez soyent de moy celees et couvertes mes dictes aversitez et non revellees aux mondains ainçois tres muciees pour cause que par aventure eulx non charitables tourneroient les complaintes de mes neccessitez a derrision & despris/ sans que aucun fruit donnant alegence m’en ensuivist/ Et pource a toy celestielle cognoissance sepparee des viltez de ça jus/ et vraye phisicienne essoreray et esventeray les complaintes de mes pensees/ confiant que ta clemence n’ara a despris l’umble voix de sa servante/ et amenistreras reparacion a la ruyne de mon espoir/ rué jus par les soufflemens de fortune en la quelle hayne ay esté tres mon enfance diversement non obstant que souvent m’ait monstré son cler visage/ mais quant resjouir m’i cuidoye moult tost le couvroit de s’obscure nue. La complainte de christine a philosophie. Reverend dame/ obeissance en facondede predite a ta serinité ne te tourt a ennuy la narracion de mes aventures pour le procés de leur prolixité/ et te plaise daigner estendre l’ayde de ton conseil au secours de la chetivoison de mes pensees O dame chiere maistrece vueilles notter comment fortune la variable/ m’a tous jours esté comme dit est tres amere marrastre Considerant tres l’estre de mon enfance/ Car comme je fusse nee de nobles parens ou pays d’ytalye en la cité de venise en la quelle mon pere nez de boulongne la grace ou je fus puis nourrie/ ala espouser ma mere qui nee en estoit par l’acointance que mon dit pere avoit de lonc temps devant a mon ayol/ clerc licencié et docteur né/ de la ville de fourly/ et gradué a l’estude de boulongne la grace qui salarié conseiller de la dicte cité ou je nasqui estoit a cause du quel parenté mon dit pere ot la cognoissance des veneciens/ et fu pour la souffisance et auctorité de sa science retenu semblablement conseiller salarié de la dicte cité de venise en la quelle fu un temps resident a grant honneur richeces et gaings. ¶ Or me dis ne fu ce pas fortune qui en ce temps assez tost apres ma nativité fist mon dit pere pour certaines besongnes et ses possessions viseter se transporter en la dicte cité de boulongne la grace/ En la quelle lui vint tantost nouvelles & certains messages tout en un temps de .ii. tres excellens roys lesquieulx pour la grant fame de l’auctorité de sa science le mandoient priant et prommettant grans salaires et emolumens chacun endroit soy que vers lui voulsist aler/ dont l’un estoit le souverain des roys chrestiens le roy de france Charles le sage quint de cellui nom/ Et l’autre fu le roy de honguerie/ cellui au quel pour sa desserte et merite est demouré apres lui tel nom que on le dit le bon roy de honguerye. ¶ Adont comme la souffisance de ces ambassaderies pour la reverence de la digneté des diz princes ne fust a mettre arriere/ delibera mon dit pere a obeir a l’une des parties/ c’est assavoir comme au plus digne/ et aussi le desir de veoir les estudes de paris et la haultece de la court françoise/ venir vers le dit roy de france esperant transitoirement veoir le roy/ obeir a ses commandemens/ et viseter les dis estudes l’espace d’un an puis s’en tourner vers sa femme & famille/ la quelle il ordena demourer sus ces possessions et heritages a boulongne la grace/ Et toutes ces dites choses faites & ordenees avec la licence de la dicte seignourie de venise se party & vint en france/ ou quel lieu fu du dit sage roy Charles tres grandement receus et honorez/ et tost apres l’experience veue de son savoir & science l’establi son conseiller tres especial privé et chier tenu/ le quel lui fu tant agreable que du partir au chief de l’an ne pot avoir licence ains volt a toutes fins le dit roy que grandement a ses cousts et frais envoyast querir sa femme enfans & famille pour user a tous jours leur vie en france pres de soy/ en promettant possessions rentes/ et pensions pour tenir honorablement leur estat/ neant moins comme mon dit pere en esperant tous jours le retour retardast ceste chose pres de l’espace de .iii. ans/ en la fin couvint que fait fust/ Et ainsi comme dit est fu fait le transport de nous de ytalie en france/ grandement fu receue la femme et enfans de ton amé philosophe maistre thomas mon dit pere arrivé a paris lesquieulx le tresbenigne bon sage roy volt veoir et recevoir joyeusement/ la quelle chose fu faite tost apres leur venue a tout leurs abis lombars riches d’aournemens et d’atour selon l’usage des femmes et enfans d’estat/ ou chastel du louvre a paris ou mois de dessembre/ estoit le dit roy lors que la presentacion du dit mesnage a belle et honorable compaignie de parens fu a ses yeulx magnifesté/ la quelle femme et famille a tres grant joye et offre il receut. Dit christine de ses bonnes fortunes. Moult nous fu fortune favorable le temps durant de la vie du sus dit bon sage roy charles/ Et avec les autres gloires des prosperitez receues/ en joyeuse plantureuse et paisible vie/ en mariage/ comme ce soit naturel joye/ a tout loyal serviteur veoir la prosperité de son bon maistre la dieu merci puis le temps de la venue de mon dit pere au service du roy gouverné en partie mesmement en ses guerres par l’administracion de son sage conseil selon la science de astrologie crut & augmenta de mieulx en mieulx la valeur de ses prosperitez recevant plusieurs victoires et conquestes sus ses ennemis/ et que ces choses soient vrayes je m’en rapporte aux vivans princes & autres ancore de ce temps qui ce scevent/ le quel dit bien du prince estoit le comble de la joye de son sus dit feal serviteur/ non obstant que a l’usage des philosophes fust nulle l’espargne de la peccune/ et avoir de mon dit pere/ la quelle chose sauve sa reverence je ne repute mie louable en l’estat des mariez soubz la quelle main doit estre la cure de leur maisnage souffreteux apres eulx peut estre a cause de leur prodigalité/ toute voye non obstant la liberalité de ses coustumes la pourveance du bon roy ne laissoit a l’ostel de son amé deffaillir nulles choses neccessaires. ¶ A venir au point de mes fortunes le temps vint que ja approchoie l’aage ou quel on seult les filles assener de mari tout fusse je ancores assez jeunette non obstant que par chevaliers autres nobles & riches clercs fusse de plusieurs demandee et ceste verité ne soit de nul reputee ventence/ Car l’auctorité de l’onneur et grant amour que le roy a mon pere demonstroit estoit de ce cause non mie ma valeur/ comme mon dit pere reputast cellui plus valable qui le plus science avec bonnes meurs avoit/ ainsi un jone escolier gradué bien né et de nobles parens de picardie de qui les vertus passoient la richece/ a cellui que il reputa comme propre filz je fus donnee/ En ce cas ne me plains je de fortune/ car a droit eslire en toutes couvenables graces sicomme autre foiz ay dit a mon gré mieulx ne voulsisse cellui pour sa souffisance tost apres nostre sus dit bon prince qui l’ot agreable lui donna l’office comme il fust vaquant de notaire et son secretaire a bourses & a gages et retint de sa court tres amé serviteur. Entre a parler christine de ses males fortunes. Ainsi dura celle prosperité par plusieurs annees/ mais comme la dicte fortune se montrast envieuse de noz gloires volt restraindre la source dont ilz venoient/ Et ne fu ce pas par elle voirement chiere maistresse qu’a cestui royaume fu procuré le grief dommage du quel malement se senti le mesnage de maistre thomas ce fu lors que le tresbon sage prince non pas envielli par cours de nature mais en assez jeune aage comme de .xliiii. ans chut en maladie assez brieve dont il trespassa. helas voirement souvent avient que choses bonnes petit durent/ Car ancore au jour d’uy se a dieu plust avoir laissié durer sa vie neccessaire a cestui royaume du quel le gouvernement & estat malement est ores de cellui de lors different/ ne fust trop enviellis/ Or fu la porte ouverte de noz infortunes/ et moy estant ancore assez jeunette y fus entree Et comme ce soit de commune coustume des poissans hommes close la bouche grant est le remuement et changement de l’estre de leurs cours et de leurs lieux/ de la quelle chose sont causes plusieurs voulentez contraires/ et a peine autrement peut estre se moult grant discrecion n’y remedie. Comme il appert du grant alixandre/ sicomme il est escript les divers descors lesquieulx non obstant les partages des regions que il leur avoit limitees/ tantost apres sa mort entre ses barons sourdirent. ¶ Adont faillirent a mon dit pere ses grans penssions plus n’ot .C. frans le mois bien payez/ avec ses livrees et dons qui gueres moins ne montoient comme appris avoit/ et l’esperance que le dit bon Roy lui avoit donnee de asseoir pour lui et ses hoirs .v.c livres de terre et assez d’autres biens dont la deffaulte du ramentevoir au bon Roy & la mort qui trop tost vint ne souffri la dicte promesse sortir son effait non obstant que des princes gouverneurs fu retenu a gages malement amendris et mal payez/ Si fu ja venu le temps de sa viellece qui en assez brief temps apres chut en longue impotence et maladie ou maintes souffrettes sourdirent aux quelles eust eu besoing l’espargne des choses despendues/ Et pource au mien cuidier est juste prudent espargne en jeunece qui secourt l’omme en sa viellece/ durant son sain entendement jusques a la fin recognoissant son createur comme vray catholique Trespassa mon dit pere droit a l’eure que devant ot prenostiqué/ du quel entre les clercs demoura renommee que en son temps durant ne plus de Cent ans devant n’avoit vescu homme de si hault entendement es sciences mathematiques en jugemens d’astrologie avec ce entre les princes & ceulx qui le frequentoient la vraye reputacion de sa prodomie/ ses biens fais/ loyauté verité & autres vertus & nul reprouche faisoit plaindre sa mort et regraiter sa vie/ en la quelle nulle reprehencion n’affiert se trop grant liberalité de non refuser riens que il eust aux povres en tant que il avoit femme et enfans ne lui donne/ Et que je ne le dye par faveur/ de ceste verité sont ancores au jour d’uy maint de ses cognoiscens/ princes et autres certains comme de experience/ si fu un tel homme a bon droit des siens plaint et plourez. Encor de ce mesmes. Or fu demouré chief du mesnage mon mari jeune et preudomme sage et prudent et tres amé des princes et toute gent frequentant son dit office par le quel moyennant sa sage prudence estoit soustenu l’estat de la dicte famille/ mais comme ja fortune m’eust mise ou declin de sa roe disposee au mal que donner me vouloit pour du tout au plus bas me flatir souffrir ne volt que gaires me durast ycellui tresbon par la quelle dicte fortune mort lors que il estoit en sa fleur apte & appreste et sus le point tant en science comme en sage et prudent conqueste & gouvernement de monter en hault degré le me toli en fleur de jeunece comme en l’aage de .xxxiiii. ans et moy de .xxv. demouray chargee de .iii. enfans petis et de grant mesnage Si fus a bon droit plaine d’amertume regraitant sa doulce compaignie et la joye passee qui ne mes .x. ans m’avoit duré/ voyant venir le flo de tribulacion qui sur moy accouroit fus plus desirant mourir que vivre et n’oubliant ma foy et bonne amour promise a lui deliberay en sain propos de jamais autre n’avoir or fus je choite en la valee de tribulacion/ Car comme la dicte fortune quant du tout veult decliner quelque chose soit regne/ cité empire ou singuliere personne/ elle de loings va querir ses apprestes toutes contraires pour la chose que elle a acqueilli en yre conduire ou point de maleurté/ ainsi m’avint Car comme je ne fusse au trespassement de mon dit mari le quel fu surpris de hastive epidimie Toute foiz la dieu grace fu sa fin comme bon catholique en la ville de beauvais ou avec le Roy estoit alez & n’estoit accompaignié fors de ses serviteurs et maignee estrange/ Si ne poz savoir precisement l’estat de sa chevance/ Car comme ce soit la coustume commune des hommes mariez de non dire et declarier leurs affaires entierement a leurs femmes de la quelle chose vient souvent mal comme il m’apert par experience/ et n’est mie sens quant femmes ont non nices mais prudentes et de sage gouvernance/ Si sçay bien que a clarté ne me vint tout ce que il avoit/ Or me couvint mettre mains a oeuvre/ ce que moy nourrie en delices et mignotement n’avoie appris & estre conduisarresse de la nef demouree en la mer ourage & sanz patron/ c’est a savoir le desolé mainage hors de son lieu et pays/ adont me sourdirent angoisses de toutes pars/ Et comme ce soient les mes des vesves plais et procés m’avironnerent de tous lez/ Et ceulx qui me devoient m’assaillirent affin que ne m’avançasse de leur riens demander Et dieux scet que il est vray que tel me demandoit que le tesmoignage du papier des mises de mon mary Comme de un preudomme nya la debte du fraudeleux comme payé et menteur de sa demande par le quel fut confus et plus ne osa parler ne soustenir sa mençonge Tost me fu mis empeschement en l’eritage que mon mari avoit acheté/ et comme il fust mis en la main du Roy m’en couvenoit payer la rente et si n’en jouissoie Et moy en la chambre des comptes demenee par lonc plait contre cellui sanz pitié qui en estoit & ancore est des maistres et seigneurs de qui avoir droit ne povoie receu par lui a tort tres grief dommage comme le voir en soit magnifeste Ce scevent maint/ ne ancore lui en ses pechez enviellis ne le considere ne fait conscience. ¶ Ne fu pas seule celle pestillence/ car comme les deniers de mes petis orfelins fussent par leurs tuteurs de mon consentement baillez en mains de marchant reputé preudomme pour accroistre et multiplier leur povre avoir/ comme il en eust l’espace de un an rendu couvenable conte et gaing par la moitié raisonnablement lui tempté de l’ennemi fist a croire qu’il avoit esté robé/ et s’asempta/ encore cousta a poursuivre/ et fu ce la perdus Autres plais me sourdirent a cause de heritages/ sur lesquieulx on demandoit ancienne rente & grans arrerages de la quelle chose ou decret de notre achat n’avoit aucune mencion conseillee par des plus sages avocas que hardiement sur ce me deffendisse & que ne doubtasse que comme je eusse bonne cause la diffinitive en seroit pour moy de sommer les garens de la vendicion lesquieulx estoient mors povres et hors du pays/ n’y avoit remede affin que je parvenisse ou point ou fortune me conduisoit/ En ce temps en comble de mes adverses fortunes me sourdy comme a job longue maladie/ par ceste chose dont s’ensuivi faulte de poursuite sicomme je tiens et par non avoir mise souffisant/ encheus de mes causes par lesquelles condampnacions satisfiant les frais fus de tous poins au chief de ma povre chevance Et merveilles est comment fortune povoit estre tant sur moy achenye/ Car en toutes les manieres que partes se pevent faire a personne disposant ses faiz par bon conseil et ordennance sicomme a mon povoir dieux scet que je faisoie me venoient au contraire de ce que par raison venir deussent toutes mes besongnes et generaument en toutes choses/ O vertu de pacience tous jours ne te avoie mie en la bourse ains te suppeditoit souvent en moy grant amertume Je vy le temps que a .iiii. cours de paris estoie en plait et procés deffenderresse et sur mon ame je te jure que a tort estoie grevee de mauvaises parties par quoy couvenoit en fin se paix vouloie avoir comme je apperceusse leur cavillacions desirant me tirer de plait comme celle qui le hayoit parfaictement comme chose contre ma nature qui paix desire que je chevisse a eulx moyennant le mien a tres grans frais et coust/ Et ne cuidez mie que ce m’ait duré un an ou .ii. mais l’espace de plus de .xiiii. ans que quant un meschief m’estoit faillis l’autre survenoit en tant de manieres diversement que longue seroit et anuyeuse la narracion de la moitié/ Et ainsi ne fina la sancsue de fortune de sucer mon povre avoir jusques a tant que tout l’ot desfiné & que plus a perdre n’avoie/ & adont faillirent mes plais mais non mie mes adversitez O doulce maistrece quantes larmes souspirs plains lamentacions et griefs pointures cuides tu que quant je estoie seulete a mon retrait que je eusse et gitasse en ce tandis/ ou quant a mon foyer veoie environ moy mes petis enfans et povres parens/ et consideroie le temps passé et les infortunes presentes dont les floz si bas me affondoient et remedier n’y povoie/ Desquieulx meschiefs plus plaignoye mes prochains que ma personne Sicomme une foiz je respondis a un qui me disoit que je n’avoie que plaindre car je estoie sans charge comme celle qui estoit seule/ & sangle je dis qu’il ne m’avoit pas bien regardee/ car je estoie .iii. foiz double/ et comme il ne m’entendist ce disoit lui exposay disant que je estoie .vi. foiz moy mesmes Et avec ce cuidez tu point chiere maistrece que grevast a mon cuer la charge de la paour que on s’apperceust de mes affaires/ Et le soucy que a l’estat ne apparust a ceulx dehors ne aux voisins le decheement de ce maleureux estat venu de mes predecesseurs non pas de moy Le quel mon ignorence tant amer me faisoit que mieulx eusse choisi mourir que en decheoir/ ha quel fardel et quel pointure a cuer que trop aime le vouloir soustenir et fortune ne vueille/ il n’est doulour a celle pareille/ et nul ne le croit s’il ne l’essaye et dieux scet quans inconveniens a celle cause viennent & sont venus a mainte gent Si te promés que a mes semblans et abis peu apparoit entre gens le faissel de mes ennuys/ ains soubs mantel fourré de gris et soubz seurcot d’escarlate non pas souvent renouvellé/ mais bien gardé avoie espesses foiz de grans friçons/ et en beau lit et bien ordené de males nuis mais le repast estoit sobre comme il affiere a femme vesve et toute foiz vivre couvient Et dieux scet comment mon cuer tourmenté estoit quant excecucions sur moy estoient faites et que mes chosettes m’estoient levees par sergens/ le dommage grant m’estoit/ mais plus craignoie la honte/ mais quant il couvenoit que je feisse aucun emprunt ou que soit pour eschever plus grant inconvenient beau sire dieux comment honteusement a face rougie tant fust la personne de mon amistié le requeroye/ & ancore au jour d’uy ne suis garie de celle maladie dont tant ne me greveroit comme il me semble quant faire le m’esteut un acés de fievre Ha dieux quant il me souvient comment tant de foiz ay musé la matinee a ce palais en yver mourant de froit espiant ceulx de mon conseil pour ramentevoir et soliciter ma besongne ou maintes foiz y ouoye a mes journees de diverses conclusions qui suer des yeulx me faisoient et maintes estranges responces mais en sur que tout me grevoit la mise de la quelle mal aisiee estoie. ¶ A l’exemple de jhesuscrist qui volt estre tourmenté en toutes les parties de son corps pour nous instruire a pacience/ volt fortune que mon povre cuer fust tourmenté de toutes les manieres de dures et diverses pensees. Quel plus grant mal et desplaisir peut sourdre a l’innocent ne plus grant cause de inpacience que de soy oyr diffamer sanz cause comme il appert par les recors de boece en son livre de consolacion/ ne fu il pas dit de moy par toute la ville que je amoie par amours Mais ycy trop fait a notter que il soit voir/ que tout ce feist fortune par ses batemens divers/ car comme telz renommeus communement viennent et souvent a tort par grant acointance & frequentacion les personnes ensemble et par conjectures et couleurs voir semblables/ mais je te jure m’ame que ycellui ne me cognoiscoit ne ne savoit qui je estoie ne ne fu onques homme ne creature nee qui me veist en publique ne en privé en lieu ou il fust/ Car mon chemin ne s’i adonnoit ne n’i n’avoie que faire et de ce me soit dieu tesmoing que je dis voir. Et comme selon l’estre de sa personne et de la moye ne se peust bonnement tel chose faire ne n’estoit voir semblable/ ne nul n’avoit couleur de le penser me suis mainte fois esmerveillee dont teles paroles povoient sourdre/ lesquelles estoient portees de bouche en bouche disant je l’ay ouy dire dont comme celle qui ignocent me sentoie aucune foiz quant on le me disoit m’en troubloie/ et aucune foiz m’en sousrioye/ disant dieux et ycellui et moy savons bien que il n’en est riens. ¶ Ne se passa mie a tant ma peine/ Car comme a mon povoir tous jours estrivasse contre la bataille et luite de fortune me voyant moult dechoite de ma chevance comme je eusse cedules veriffiees et passees par la chambre des comptes d’une somme d’argent qui ancore deue estoit a mon feu mari a cause des gages de son dit office empetray mandement du roy aux generaulx que de ce je fusse payee/ or vint la poursuite anuyeuse que par neccessité contrainte faire me couvenoit/ a grant travail pourmenee par maintes responces pro et contra plusieurs journees et que ce soit lonc travail et ennuyeux je m’en rapporte a ceulx qui essayé l’ont/ plus desplaisant que onques mais en ce temps ci comme dient les anciens/ Or peus savoir se a moy femme foible de corps et naturellement cremeteuse faire de neccessité vertu m’estoit labour qui a danger et coust de compaignie selon l’estat appris me couvenoit trotter apres eulx selon le stile puis en leurs cours ou sales en commun muser a toute ma boite et mandement le plus des jours sanz y riens faire/ ou par lonc train avoir responces doubles en esperance mais longue estoit l’attente/ O dieux quantes parolles anuyeuses/ quans regars nices/ que de rigolages de aucuns remplis de vins et graisse d’aise souvent y ouoye/ lesquieulx choses de paour de empirer mon fait comme celle qui besoing avoit je dissimuloie sanz riens respondre me retournant de autre part/ ou faisant semblant que ne l’entendisse le getoie a truffe Et dieux amender vueille toutes villes consciences Car de mauvaises en trouvoie. ¶ A cause de ceste poursuite comme je ne trouvasse nulle part grant ne petit charitable/ non obstant que a plusieurs nobles et grans requeisse l’aide de leur parolle esperant que comme loy de droit les oblige au secours des vesves et orphelins Et je n’y trouvasse en effaict riens bon pour moy un jour desconfortee sur ces choses fis ceste balade. Balade. Helas ou donc trouveront reconfort povres vesves de leurs biens despoullees puis qu’en france qui seult estre le port de leur salu et ou les exillees Seulent fuir et les desconseillees Mais or n’y ont mais amistié Les nobles gens n’en ont nulle pitié Aussi n’ont clercs li greigneur ne li mendre ne les princes ne les daignent entendre ¶ Des chevaliers n’ont elles nesun port par les prelas ne sont bien conseillees Ne les juges ne les gardent de tort des officiers n’aroient .ii. maillees de bons respons des poissans travaillees Sont en maint cas n’a la moitié devers les grans n’aroient exploitié Jamais nul jour ailleurs ont a entendre ne les princes ne les daignent entendre ¶ Ou pourront mais fuir puis que ressort n’ont en france la ou leur sont baillees Esperances vaines conseil de mort voyes d’enfer leur sont appareillees S’elles veulent croire voyes broullees Et faulx consaulx ou appointié n’est de leur fait nul n’ont si acointié qui les ayde sanz a aucun mal tendre ne les princes ne les daignent entendre ¶ Bons et vaillans or soient esveillees voz grans bontez ou vesves sont taillees d’avoir maint maulx de cuer haitié secourez les & croyez mon dictié Car nul ne voy qui vers elle soit tendre ne les princes &c. ¶ La cause qui me mouvoit a en personne oultre mon gré faire telle poursuite estoit que quant mon message y envoyoie n’avoit en leur presence nulle audience mais a tout le moins quant je y venoie ramentevoir l’estat de moy vesve requerant encline devant eulx par pitié leur secours/ aucune apparence de pitié plus en eulx trouvoie/ cest ennui avec des autres ne me dura pas petit/ ains y fus constant plus de l’espace de .vi. ans sur le pourchas non mie de moult grant somme qui par parties en tieulx travaulx et requestes de seigneurs resservé le reste qui ancore m’est deu je fus payee. Encore continue christine sa complainte. Entens tu doulce maistrece en quieulx doulz deduis ay passé la jonesce de ma vesveté Avoie je cause que trop druerie me feist entendre aux foles amours/ mais non obstant ce que assez souffire deust par si lonc temps a celle par qui tout ce me venoit ne fu pas appaisiee envers moy la desloyale de qui autre foiz me suis plainte comme je en eusse cause/ car la douleur du dent y trait la langue/ ains te diray en poursuivant ceste matiere jusques au jour d’uy comment ses floz m’ont gouvernee et ancore ne cessent. ¶ Voir est que ou temps de mes perplexités dessus dit pour ce que descouvrir a autrui si qu’ay touché ses adversitez et affaires/ La cause pour quoy/ Car charité est pou trouvee ne peut tourner se a servitude non et pou de preu/ Comme ce soit moult grief faissel de douleur tenir enclose sans regehir ne m’avoit ancore tant grevee fortune comme elle ne peust que je ne fusse accompaignee des musettes des poetes non obstant que les reboutas arriere et chaças de la compaignie de boece ou temps de sa tribulacion pour le repaistre de plus haultes viandes/ ycelles me faisoient rimer complaintes plourables regraitant mon ami mort et le bon temps passé/ sicomme il appert au commencement de mes premiers dictiez ou principe de mes cent balades et mesmement pour passer temps/ et pour aucune gayeté attraire a mon cuer doulereux faire diz amoureux et gays d’autrui sentement comme je dis en un mien virelay. Dit christine comment elle mua sa maniere de vivre. Apres ces choses comme ja fussent passees mes plus jeunes jours et aussi la plus grant part de mes occupacions foreines revins a la vie qui plus naturellement me plaisoit c’est a savoir solitaire et quoye/ adont par solitude me vindrent au devant les rumignacions du latin & des parleures des belles sciences & diverses sentences et polie rethorique/ que oÿ le temps passé au vivant de mes amis trespassez pere et mari/ je avoie de eulx/ non obstant que par ma folour petit en retenisse/ Car non obstant que naturellement et de ma nativité y fusse encline me toloit y vaquer l’occupacion des affaires que ont communement les mariees/ et aussi la charge de souvent porter enfans Avec ce la trop grant jonesce la trop mignote ennemie de sens qui ne laisse souventes foiz aux enfans quelque bon engin que ilz ayent pour le desir de jouer/ hanter l’estude se crainte de bateures ne les y tient/ & pource que celle crainte n’avoie la voulenté de jouer si maistrisoit l’engin & sentement si que constant ne povoit estre ou labeur de apprendre. Se plaint christine de jeunece. Ha folle jonece avuglee et variable non cognoissant les prouffitables & bonnes choses qui ne te delites fors en choses vaines/ oyseuses et de nulle vertu/ ne ailleurs appliquer ne te querroies Et certes voirement qui par toy se gouverne suit la voye de perdicion et se avugle en sa meismes cognoissance/ Tant haÿr te dois quant ou temps que je estoie a meimes les .ii. beaulz conduis de philosophie/ costé si haultes fontaines tant cleres et saines Et moy comme fole jone trop mignote/ non obstant que les beaulx ruisseaulx me pleussent ne m’en emplissoie/ mais tout ainsi comme le fol qui voit luire le cler souleil ne s’avise de la pluye ains cuide que tous jours lui dure/ n’en faisoie compte et a temps cuidoie recouvrer a ce que je perdoie Ha fortune quel tresor tu me tolis/ Tant fis grant dommage a mon entendement qui ne les me laissas durer jusques en l’aage de plus grant cognoissance/ bien t’a herdis a nuire meismes a la proprieté de mon ame/ car se ores avoie costé moy tel clarté au desir que j’ay/ sustraite de toutes autres occupacions et delis comme de choses vaines donnee entierement a l’estude/ telement et si largement me empliroie que femme nee puis lonc temps ne m’en passa/ helas quant je avoie costé moy les maistres de science/ conte d’apprendre ne faisoie/ Et ores est le temps venu que mon engin et sentement m’en die en desirant ce que par faulte de apprendre ne peut avoir/ c’est a savoir l’art de toy philosophie m’amie science. Ha doulce savoureuse chose et emmellee qui tous autres tresors en valeur precedes comme souveraine/ tant sont eureux ceulx qui a plain t’a saveurent/ Et toutevoie comme de ce je ne puisse juger fors a l’aventure sicomme de chose que a plain je ne cognoisce/ neant moins m’en donne la cognoissance le tres delitable goust & saveur que je treuve seulement es petites deppendances et parties de sciences comme plus hault je ne puisse attaindre me fait presumer ou bien de elle a ceulx qui l’aiment/ & la saveurent et sentent souverain delit/ Ha enfans et jones se vous saviés le bien qui est ou goust de savoir et le mal et laidure qui gist en ignorence comment se bien avisié estiez petit plaindriés la peine et labour de apprendre/ ne dit aristote que naturellement l’omme savant seignourist l’ignorent sicomme nous veons l’ame seignourir le corps Et quel chose est plus belle que savoir/ & quel chose est plus laide que ignorence messeant a homme sicomme une foiz respondis a un homme qui remprouvoit mon desir de savoir disant que il n’appartient a femme avoir science comme il en soit pou Lui dis que moins appartient a homme avoir ignorence comme il en soit beau coup. Dit christine comment elle se mist a l’estude. Ainsi en cellui temps que naturellement estoit parvenu mon aage au degré de cognoissance regardant derriere moy les aventures passees & devant moy la fin de toutes choses Tout ainsi comme un homme qui a passé perilleuse voye se retourne arriere regardant le pas par merveille et dit que plus n’y entrera/ et que a meilleur se tendra/ ainsi considerant le monde tout plain de las perilleux/ & que il n’est fors pour toute fin un seul bien qui est la voye de verité me tiray au chemin ou propre nature et constellacion m’encline/ c’est a savoir amour d’estude/ adonc clouy mes portes/ c’est a savoir mes sens que plus ne fussent tant vagues aux choses foraines/ et vous happay ces beaulx livres et volumes/ et dis que aucune chose recouvreroye de mes pertes passees/ ne me pris pas comme presomptueuse aux parfondesses des sciences obscures es termes que ne sceusse comprendre/ Sicomme dit Caton/ lire et non entendre/ n’est mie lire ains comme l’enfant que au premier on met a l’a.b.c.d. me pris aux histoires anciennes des commencement du monde/ les histoires des ebrieux/ des assiriens et des principes des seignouries procedant de l’une en l’autre dessendant aux rommains des françois des bretons & autres plusieurs historiographes/ apres aux deducions des sciences selon ce que en l’espace du temps que y estudiay j’en pos comprendre. ¶ Puis me pris aux livres des poetes Et comme de plus en plus alast croiscent le bien de ma cognoissance/ adont fus je aise quant j’oz trouvé le stile a moy naturel me delittant en leurs soubtilles couvertures et belles matieres muciees soubz fictions delitables et morales/ et le bel stile de leur metres et proses deduites par belle et pollie rethorique aournee de soubtil lengage et proverbes estranges/ pour la quelle science de poaisie nature en moy resjouye/ me dist fille soulasse toy quant tu as attaint en effait le desir que je te donne & ainsi continuant et vaquant tous jours a l’estude comprenant les sentences de mieulx en mieulx. ¶ Ne souffist pas a tant a mon sentement & engin/ ains volt que par l’engendrement d’estude et des choses veues nasquissent de moy nouvelles lectures/ adont me dist prens les outilz et fiers sur l’enclume/ La matere que je te bailleray si durable que fer ne feu ne autre chose ne la pourra despecer si forges choses delitables/ & ou temps que tu portoies les enfans en ton ventre grant douleur a l’enfanter sentoies/ Or vueil que de toy naiscent nouveaulx volumes/ lesquieulx les temps avenir perpetuellement au monde presenteront ta memoire devant les princes et par l’univers en toutes places lesquieulx en joye et delit tu enfanteras de ta memoire/ non obstant le labour et traveil le quel tout ainsi comme la femme qui a enfanté si tost que ot le cry de l’enfant oublie son mal/ oublieras le traveil du labour oyant la voix de tes volumes. ¶ Adont me pris a forger choses jolies a mon commencement plus legieres/ & tout ainsi comme l’ouvrier qui de plus en plus en son oeuvre s’asoubtille comme plus il la frequente/ ainsi tous jours estudiant diverses matieres mon sens de plus en plus s’imbuoit de choses estranges amendant mon stile en plus grant soubtilleté et plus haulte matiere depuis l’an .M.CCC.iiii.xx & .xix. que je commençay jusques a cestui .CCCC. & cinq/ ou quel ancore je ne cesse/ compilles en ce tandis quinze volumes principaulx sanz les autres particuliers petis dictiez lesquieulx tous ensemble contiennent environ .lxx. quayers de grant volume comme l’experience en est magnifeste Et comme grant louange pour ce n’y affiere/ Car pou y a soubtilleté/ par ventance dieux scet que ne le dis mais pour continuer l’ordre de mes bonnes et mauvaises aventures. Le plaisir que christine prenoit a l’estude. Or fu l’estat de mon vivre tresmué en autre disposicion/ mais non pas pour tant changié en mieulx ma malle fortune ains comme dolente du bien et solas de ma vie speculative et solitaire persevera sa malivolence non a ma personne seulement mais en despit de moy a de mes plus prochains la quelle chose je attribue au procés de mes adversitez. Et te diray comment par me tolir mes bons amis comme tous jours elle soit repunante a ma prosperité ne les a souffers longuement vivre. Il est voir que comme la voix courust ja et meismes entre les princes/ de l’ordre et maniere de mon vivre c’est a savoir a l’estude/ pour ce que revellé leur estoit non obstant celer le voulsisse leur fis present comme de nouvelle chose quelque petis et foibles que ilz soient de mes volumes de plusieurs matieres lesquieulx de leur grace comme princes benignes et tres humains les virent voulentiers & receurent a joye/ et plus comme je tiens pour la chose non usagee que femme escripse comme pieça ne avenist/ que pour digneté qui y soit/ et ainsi furent en peu de heure ventillez et portez mes dis livres en plusieurs pars et pays divers. ¶ Environ ce temps comme la fille du roy de france fust mariee au roy richart d’angleterre vint par de ça a celle cause/ un noble conte dit de salsbery/ et comme ycellui gracieux chevalier amast dictiez & lui meismes fust gracieux dicteur/ apres ce qu’il ot veu des miens dictiez tant me fist prier par plusieurs grans que je consenti tout le feisse je envis que l’ainsné de mes filz assez abille et bien chantant enfans de l’aage de .xiii. ans alast avec lui ou pays d’engleterre pour estre avec un sien filz auques de l’aage/ du quel dit conte comme il se portast tant bien & grandement de mon dit enfant et plus promettoit pour le temps avenir aux quelles choses croy que il n’eust failli/ comme il en eust la poissance/ vrayement les promesses que faites m’en avoit ne furent trouvees mençongieres/ mais ce bien ne volt pas celle souffrir longuement qui mains autres maulx m’a fais c’est a savoir male fortune qui non pas lonc temps apres procura la dure pestillence ou dit pays de angleterre contre le dit Roy Richart comme chacun scet/ pour la quelle cause apres pour sa grant loyauté vers son dit droit seigneur fu decollez a grant tort le dessus dit tresbon conte/ or fu failli le eur mondain du commencement de mon dit filz assez enfant en temps de grant pestilence hors de son pays/ par raison dot estre esbahi/ mais que avint il le roy henry qui ancore est qui s’atribua la couronne/ vit des dictiez et livres que je avoie ja plusieurs envoyez comme desireuse de lui faire plaisir au dit conte/ si lui vint a cognoiscence tout ce que il en estoit/ adont tres joyeusement prist mon enfant vers lui/ et tint chierement & en tres bon estat/ & de fait par .ii. de ses hayraulx notables hommes venus par de ça lencastre et faucon roys d’armes me manda moult a certes priant et promettant du bien largement que par de la je alasse/ et comme de ce je ne fusse en riens temptee considerant les choses comme elles estoient/ dissimulay tant que mon filz peusse avoir disant grant mercis/ & que bien a son command estoie/ et a brief parler tant fis a grant peine/ et de mes livres me cousta que congié ot mon dit filz de me venir querir par de ça pour mener la qui ancore n’i vois/ & ainsi reffusay l’eschoite de ycelle fortune pour moy et pour lui pour ce que je ne puis croire que fin de desloyal viengne a bon terme/ Or fus joyeuse de veoir cil que je amoie comme mort le m’eust seul filz laissié & .iii. ans sans lui oz esté/ mais crue fu la charge de ma deppense non a moy aysiee/ Car je doubtay que le grant estat ou quel estoit par de la lui donnast vouloir de retourner comme enfant es quieulx consideracion n’est grande voulentiers se tiennent a ce que aux yeulx et a leur aise meilleur leur semble/ Si lui quis maistre grant et poissant qui de sa grace le retint/ mais comme la petite faculté du jeune enfant pou apparant en la multitude des grans de sa court tous jours a ma charge couvint que son estat fust soustenu sanz de son service tyrer aucun fruit/ & ainsi me desherita fortune d’un de mes bons amis et d’une de mes esperances/ mais ancore de puis pis me fit. Se plaint christine de fortune qui lui osta ses bons amis. Sicomme devant est dit comme ja m’eussent donné nom mes dis volumes par les presens qui a maint prince de estranges terres fais en furent nompas de par moy envoyez mais par autres comme de chose nouvelle venue de sentement de femme sicomme dit le proverbe choses nouvelles plaisent ne le dis pour nulle ventance comme elle n’y affiere. ¶ Le premier duc de milan en lombardie qui de ceste chose fu informez & peut estre/ plus grandement que la cause n’y estoit/ desirant me traire en son pays/ tres grandement avoit ordené de mon estat par rentes a tous jours se aler y vouloye/ & ce scevent plusieurs gentilz hommes du pays meismes commis a celle ambassaderie Mais fortune selon ses usages & coustumes ne volt mie que la ruine de mon estat fust reparé/ si me tolli tantost par mort cil qui bien me vouloit/ non pas que de legier eusse deliberé laissier france pour certaines causes/ tout soit de la mon naturel pays/ Toute foiz me greva elle quant me toli un bon ami qui n’est petite perte/ Et tel que comme la relacion de gens notables m’a dit/ sanz partir de ça meismes m’ust il valu par les dessertes de mes livres. Encore de ce mesmes. Ancore reste a parler de ma plus grant perte a cause de grant prince mort puis le temps du susdit sage roy Charles/ ne fusse pas voirement evident signe de hayneuse envie de la perverse contre moy/ quant tost apres que le tres venerable hault et poissant noble prince philippe duc de bourgongne/ qui frere fu au dit sage roy m’ot par l’acointance de mes dis livres & volumes prise a amour/ lesquieulx ne lui avoie ancore pou de temps a presentez comme je ne les reputasse dignes de estre ouvers en la presence de sa sagece/ mais comme sa benigne clemence plus considerant je croy la constance de mon labour que grant soubtilleté estre en mon oeuvre comme elle n’i soit moult les ot agreables/ sicomme me apparu par la louange de sa parolle/ et plus par le effait de son bon et grant secours a l’estat non de moy seulement/ mais de mon dit filz/ de lui retenu a gages et bien amé serviteur Et moy semblablement a qui avec les autres biens faiz tant daigna reputer mon savoir/ que il de sa bouche me chargia que je tins a grant grace/ comme il desirast que la belle vie et notables fais du sage roy susdit fust en propre volume mise en registre affin que perpetuele memoire demourast au monde par bon exemple de son noble nom que je compillasse des dictes choses certain volume. ¶ Helas et tost apres lors que sa grace vers moy de plus en plus croisçoit le me toli par mort la desloyale/ la quelle mort fu renouvellement des navreures de mes adversitez/ & semblablement grief parte a cestui royaume sicomme ou dit livre que il me commanda/ non ancore lors achevé je recorde en piteux regrais. Conclut christine sa complainte a philosophie. Or t’ay je dit tres reverend maistresse les motifs et causes de mes ennuys passez/ et non pas tous/ car dieux scet que en grant quantité de autres maulx & ennuys ay passé le temps que anuyeuses et longues seroient a dire/ et la perseverence de yceulx qui dure encore/ ne de la fin je ne voy signe. ¶ Du temps present comment il m’est te dis que non obstant supplicacions & requestes que par force de divers survenus affaires & partes en la maniere dessus dicte par les floz infortunez souvent courans sur moy que j’ay aux princes françois qui ancor vivent baillees/ mainte foiz requerant leur secours/ non pas les adjurant par mes merites/ mais suppliant par l’ancienne amour qui tira mon dit pere par de ça leur serviteur et par ses bien fais a moy delaissiee et hors de son lieu a son petit maisnage voulsissent secourir/ mais que je ne mente ne soie ingrate/ le secours de aucun d’eulx comme il m’ait assez esté tardif presenté par assignacion non de grans choses/ ancore la longueur de la paye/ & ennuyeuse poursuite de leurs tresoriers auques estaint la value de la grace et merite du bien fait/ O chere dame que cuides tu quel peine/ c’est a femme de ma faculté abstrate assez/ et pou chalant des aluchemens de couvoitise convenir contre ma naturel condicion non moult curable ne ardant sur les desirs de peccune/ mais par neccessité contrainte de grans charges poursuivre a grant train ces gens de finance pourmenee de jour en jour de leurs belles parolles/ Et ainsi va au jour de huy a l’estat de mon vesve colliege/ dame honoree a qui riens n’est occult Et tu meismes qui scez que petit me chault des amas & assemblees de tresors ne de croiscence d’estat fors soustenir cellui venu de mes devanciers comme folle ancore de en curer/ recognoissant que tout est vent chose mondaine/ ne que mes pensees ne sont es desirs de superflus paremens ne delicatifs vivres me soies tesmoing que seulement l’amour & charge agreable que je ay de ma bonne mere en viellece sur les bras de sa seule fille qui n’est oublieuse des grans materneulx benefices d’elle receus/ voluntaire du meriter comme droit est me rent perplexe et adoulee quant fortune ne seuffre a ma voulenté sortir son bon effaict & que femme de si parfaict honnour et si noble vie et bel estat comme est et a tous jours esté/ celle ne soit tenue et ordenee selon son droit/ avec les autres charges de povres parentes a marier & autres amis & ne voie de nulle part fortune propice pour mon secours. ¶ Encore au propos des pointures de mes dolentes pensees avec mes autres anuys/ cuides tu que devant la face de fortune ne me repute peu eureuse/ quant si voy ses autres accompaignez de leurs lignages freres et parens d’estat & aisiez/ eulx resjouyr ensemble/ et je pense que je suis hors des miens en estrange lieu/ & mesmement .ii. freres germains que j’ay sages preudes hommes & de belle vie/ que il a couvenu que par ce que de ça n’estoient pourveus que ilz soient alez vivre ou pays de la sus les heritages venus du pere/ et moy qui suis tendre & a mes amis naturelle/ me plains a dieu quant je voy la mere sans ses fieulx que elle desire/ & moy sanz mes freres/ Et ainsi peus tu veoir chere maistrece que tout au contraire de mes desirs m’a fortune servie qui ancores persevere en ses malefices. ¶ Et que de ces choses dis voir dieu qui proprement est toy & toy qui proprement est lui le savez. Si reviens a ce que devant est dit que comme fortune m’a contraire ades continue par tieulx molestes qui ne sont a cuer femenin & foible pas petites plus me grieve l’empeschement que a l’estude par ses occupacions me fait qui mainte foiz troublent si ma fantasie que ne peut vaquer l’entendement au bien qui lui delite/ tant est ofusqué par ses dures pointures/ que ne fait le fait du mal que j’en seuffre. Respont philosophie a cristine. Quant ainsi je oz toutes mes raisons finees je me teus quoye/ adont la excellent deesse parla ainsi que se semblant feist de sousrire/ tout ainsi que fait un sage quant les raisons du simple lui sont presentes/ mais non pourtant mon ignorence ne me toli l’aisance de sa digne parolle/ qui ainsi me dist Certes amie a tes parolles cognoiz comment folle faveur te deçoit es jugemens de ton meismes estat/ O creature avuglee qui attribues a male fortune les dons de dieu et son propre galice dont il t’abeuvre/ Et pour quoy te plains tu par ingratitude des biens que as receus/ et certes moult est perverti l’estommac qui propice viande reçoit/ & la convertist dalmagiablement a sa nourriture/ Et ou est doncques le sens de ton entendement qui ne cognoist ce qui lui est prouffitable/ et que tu es deceue te prouveray par pratique de groz exemple tout ainsi comme l’expert medecin qui considere la faculté de la nature & compleccion de son pacient & selon sa force ou foiblece lui donne purgatoire et medicine/ ainsi useray en toy de regime tenue et legier pour la foiblece de l’estomac de ton entendement a qui choses pesantes et ponderans teles ou semblables que jadis donnay a mon amé boece sicomme en son livre as trouvé seroyent fortes a digerer et convertir a la sustentacion de ta neccessité/ Et pource comme exemples ruraulx soient aux simples cause de plus legierement comprendre les fourmes des choses par celle voye sus fondement de sainte escripture la plus seure/ te ramenray se je puis a vraye cognoiscence de ton tort. Belle amie par ce que comprendre puis en ton fait moult te plains et tiens mal contempt de fortune que tu dis estre et avoir esté ja lonc temps ennemie de ta prosperité/ & que tres lors que en france conduisi tes parens & toy avec eulx ourdi le las de tribulacion ou conduire te vouloit/ Et puis les autres aventures tu dis estre venues a ton grant grief aux quelles choses non a toutes particulierement/ Car n’en est besoing/ mais assez servira pour chacune ma general responce te monstreray ta vehemente folie & la descongnoissance qui te deçoit en ceste partie/ et te destourne d’aviser le vray de ton fait/ avises un pou en toy meismes les grans persecucions & mortieulx inconveniens qui ont puis esté & ancore sont comme il ne puisse estre en paix/ ou pays dont tu es nee/ et penses a certes se dieu te fist point grant grace non obstant que t’en plaignes de oster toy et les tiens de entre les flames de ceulx qui se bruslent/ cuides tu par ta foy que eschappee en fusses jusques au jour d’uy sans ta part avoir du mal/ ou sur toy/ ou le veant avoir a de tes amis Car meismes par de ça as tu plouré de tes charnelz qui s’en sont sentus/ mais apres je me ry de ta niceté qui attribues a la poissance de fortune la mort et trespas de creature humaine/ sicomme tu dis du roy Charles & de tes autres amis/ et ce qui est ou secret de dieu escript qui toutes choses dispose & gouverne a son bon plaisir/ C’est a savoir la fin et terme de vie humaine/ Il semble que vueilles appliquer a aventure/ quant tu dis que fortune t’en despoullia Tout ainsi comme se autre chose ne eust afaire fors soy occuper pour tes nuisances/ Et scez tu la cause qui te meut a tieulx ymaginacions/ c’est la trop grant faveur et tendreur que as a toy meismes & a l’aise de tes plaisirs qui te fait tout ce qui avient contre ce que vouldroyes attribuer au propos de ce que tu ymagines/ Car quant est de la mort du roy et aussi des autres dieu les avoit ordenez a ce terme pour le meilleur comme toutes choses ainsi le face/ & se le mieulx fust les laisser fait le eust Et des jugemens de dieu quoy que ilz vous semblent merveilleux n’est pas en vous deu discuter en hardies parolles/ car comme il soit tout sapient/ scet bien que il fait. ¶ Et des autres adversitez dont tu te plains resembles l’enfant trop mignot qui se deult du petit coup de la verge que son pere lui donne/ et ne scet cognoistre le bien que il lui fait/ ainsi certes te plains sanz cause Car ne scez adroit que sont tribulacions/ & en ce monstres que tu es femme tendre fresle et pou souffrant qui de pou se scent/ Et ce te prouveray je par raison cy apres. Le reconfort de philosophie. Toy qui te plains pour un pou de tribulacions se elles te sont survenues tout ainsi comme se dieu fust plus tenus a toy que a un autre/ Avises en toy meismes que pevent dire plusieurs bonnes personnes et christiens comme toy qui par estranges fortunes n’ont pas seulement perdu tous leurs biens temporelz mais leur membres dont sont mahaignez par longue maladie/ et par survenue aventure/ et en autres cas divers tourmentez en esperit ou en leurs corps/ Et ancore avec ce en tel povreté que ilz n’ont lieu propre ne chose pour eulx couvrir ne leur lasse vie repaistre se ilz ne se vont traisnant par entre vous a grant peine/ cerchant voz aumosnes ou souvent treuvent pou de pitié que dirons nous de ceulx la/ ou des autres qui ont diverses grandes tribulacions en maintes guises que ilz sont mal eureux infortunez et de dieu haÿs/ nennil nennil/ Ce n’est mie selon les sentences de noz loys qui sont l’euvangile/ ains dirons que beneurez sont tout ainsi comme dieu le dit lui meismes d’yceulz et des paciens. ¶ _Beati pauperes quoniam ipsorum est regnum celorum/ beati pacifici quoniam filii dei vocabuntur._ ¶ Si dis que tu juges follement Car ne sont pas infortunez au regart des distribucions justes de dieu les plus persecutez ains sont les plus beneurez en tant comme plus s’approchent de la vie jhesucrist en ce monde en toute tribulacion. Pour vostre exemple. Si te dis que de tant es tu eureuse et je le te monstre se nyer ne veulx la sainte escripture/ comme tu approches aucunement a ceulx qui passent par tribulacion/ et plus eureuse fusses mais que pacience avec fust/ se plus en eusses/ car de tant seroit plus grant ton merite/ et se tu es ferme en la foy/ de la quelle chose mal fus nee se il n’est ainsi/ point ne mescroiras ce que je dis. ¶ Et a ce propos ne dit saint augustin sur le .xxi.e pseaulme Sache dist il tout homme que dieu est un medecin qui au malade pecheur baille tribulacion pour medicine a son salut non pas pour peine de sa dampnacion/ O malade pecheur quant tu reçois la medicine de dieu en tribulacion tu te deuls/ tu te plains et cryes a ton medecin il ne te escoute pas a ta voulenté mais il te escoute a ta santé. Encore de mesmes. Mais alons oultre pour dieu mercis savoir mon de quoy tu te peus clamer de dieu ne plaindre de fortune/ et certes par ce que il me semble en toy apperçois grant ingratitude & descognoissance quant de foison biens graces que par tant de fois t’a faites & fait chacun jour/ non pas seulement ne le remercies ains te reputes recevoir tres grant tort comme se digne fusses non pas senz plus de mieulx avoir mais toutes choses a ton souhaid/ & que il soit vray avise toy avise quans grans benefices et dons de dieu si notables toy indigne as receus/ & chacun jour fais aux quelles choses se bien penser y veulx & sagement en toy discuter tu trouveras que les adventures qui avenues au monde te sont que tu imputes a male fortune te sont propices & couvenables meismement a l’utilité de ton vivre au monde et pour ton mieulx sicomme cy apres te monstreray Mais ta sensualité te tolt vraye cognoiscence. ¶ Je avise que entre les autres prosperitez .iii. choses entre vous mondains sont que vous reputez comme les principales de voz joyes & gloires & sanz partie de ycelles .iii. ou toutes je suppose que il n’est quelconques richece qui content feist cuer d’omme/ Et qu’il n’est si grant tresor des biens de fortune que cellui a qui elles faillent ne voulsist avoir donné se il l’avoit pour posseder ycelles/ les .ii. sont hors soy & l’autre en soy meismes La premiere est estre nez de nobles parens la quelle noblece je entens des vertus/ La seconde avoir corps sanz nulle defformité et assez plaisant saintif et non maladis/ mais bien complexionné et de competant discrecion & entendement/ La tierce joye qui n’est mie petite avoir enfans beaulx et gracieux au monde de bonne discrecion et de bonnes meurs et craignans dieu/ O femme avises ton ingratitude/ Es tu donques exaussie de celles belles graces avec maintes autres que dieu t’a donnees/ il semble que oublié ayes comment il t’est quant si meseureuse te reputes Est il femme au jour de huy que tu cognoisces plus glorieuse de parens que tu es/ ne te souvient il de la digneté de nostre noble philosophe ton pere qui de noz estudes tant estoit familier que nous seyons en la chayere avecques lui devisant de noz secrés et pour l’acointance de nostre industrie fu en son temps repputé le suppellatif en noz sciences speculatives/ & avec ce vray catholique comme tous jours & a sa fin paru/ et vertueux que je m’en rapporte a toy que plus prises seulement & plus te prouffite la rumignacion de son savoir qui demouree t’est que quelconques avoir non obstant que t’en plaignes que il te peust avoir laissié/ penses se contente de ce bien te dois tenir/ Que diray je de ta tres noble mere scez tu point de femme plus vertueuse/ remembre toy depuis sa jonece jusques au jour d’ui se vie contemplative constamment ou service de dieu quelque occupacion que elle onques eust l’a nul jour laissiee je croy que non/ O quel noble femme comme sa vie est glorieuse comme de celle que nulle tribulacion onques ne suppedita ne brisa par impacience son tres bon courage/ & quel exemple de vivre en toute vertu pour toy/ se tu bien t’i mires/ avises combien grant grace dieu te fait ancore avec tout de si noble mere laisser vivre en ta compaignie en sa viellece plaine de tant de vertu/ & quantes foix elle t’a reconfortee & menee de tes impaciences a cognoistre ton dieu/ Et se tu te plains que peine seuffre ton cuer pour ce que vers elle te semble ne peus faire comme il appartient je te dis/ ce vouloir avec la pacience est meritoire a toy et a elle/ et de elle sanz faille la digne conversacion & vie esleue l’a fait estre clere entre les femmes c’est chose nottoire et tres beneuree Item quant au .ii.e/ en tes biens ne t’a par ta foy dieu donné corps fort assez & bien compleccionné selon ta qualité lui en peus tu rien demander/ se tu ne varies/ si gardes que de tel entendement que il y a mis/ bien en uses/ ou se non/ mieulx te vaulsist moins avoir sceu/ Ce qui touche a la .iii.e joye/ n’as tu enfans beaulx gracieux & de bon sens/ ton premier fruit qui est une fille donnee a dieu et a son service/ rendue par inspiracion divine de sa pure voulenté & oultre ton gré en l’eglise et noble religion de dames a poissi/ ou elle en fleur de jonece et tres grant beauté se porte tant notablement en vie contemplative et devocion/ que la joye de la relacion de sa belle vie souventes foiz te rent grant reconfort/ et quant de elle meismes tu reçois les tres doulces et devotes lettres/ discretes et sages que elle t’envoye pour ta consolacion es quelles elle jeunette et ignocente te induit et amonneste a haÿr le monde et despriser prosperité. ¶ N’as tu un filz aussi bel et gracieux et bien moriginez/ et tel/ que de sa jonece qui ne passe .xx. ans du temps que il a estudié en noz premieres sciences en gramaire on ne trouveroit ne rethorique et poetique lengage naturellement a lui propice gaires plus apte et plus soubtil que il est avec le bel entendement & autre bonne intiquative que il a/ et que je ne mente es choses dictes assez sont magnifestes si que chacun le peut veoir/ non pas le te dis pour toy induire a vaine gloire/ mais affin que graces rendes a cil dont tout bien vient qui t’a donné les diz biens & mains autres/ & lesquieulx fortune ne donne mie/ mais lui de sa pure grace especiale a qui il lui plaist. ¶ Des autres complaintes que tu fais de tes amis germains que tu ne vois et qui de toy sont loings/ je ne fais compte Car comme ce monde ci ne soit que un trespas dois esperer que par les prieres de la bonne mere et la preudommie de eulx serés par la misericorde de dieu conduis en la cité de joye c’est la sus ou ciel ou se dieu plait vous entre verrés perpetuellement. Blasme philosophie christine de ce que elle se plaint. De ce que ton mari en jone aage mort te toli dont tu te plains je te dy que dieu ne te fist nul tort quant son serf pour mettre en plus hault degré volt ravoir/ et lui plut que tu demourasses en la vallee de tribulacion pour esprouver ta pacience et pour toy affiner en vertu/ Sicomme dit saint augustin sur le .lx.e pseaulme que en une meisme fournase la paelle art & l’or se purge/ la paelle tourne toute en cendre/ & l’or de toute escume et ordure se nettoye/ Et que est a entendre la fournase doulce amie scez tu/ c’est le monde ou tu es/ la paelle/ Ce sont les mau prouffitans/ l’or/ ce sont les justes/ le feu/ c’est tribulacion/ l’orfevre/ c’est dieu/ Ce que l’orfevre a voulu faire de toy/ il te doit plaire/ ou il te veult mettre tu le dois vouloir/ tu as commandement de endurer il a l’office de purger/ et combien que la paele arde en ce feu/ c’est la douleur que tu sens/ toutevoye se tu es sage tu t’y purges comme l’or. ¶ Et ancore avec tout ce que le mieulx ait esté pour toy/ et au prouffit de ton sens le te monstreray Il n’est ou monde plus grant bien et toy meismes pas ne le me nyeras/ que cellui qui vient de l’entendement/ & qui le parfait en savoir/ la quelle chose fait estude qui apprent science/ et experience de moult de choses/ Ces .ii. causes font la personne estre sage se faute de l’entendement ne lui tolt a ton propos il n’est mie doubte que se ton mary te eust duré jusques a ore/ l’estude tant comme tu as ne eusses frequenté Car occupacion de maisnage ne le t’eust souffert au quel bien d’estude tu te mis comme a la chose plus esleue selon ton jugement apres la vie qui est de tous poins pour les parfais c’est la contemplative/ la quelle est vraye sapience/ le quel bien d’estude je sçay que confesseras que pour tous les biens de fortune ne vouldroies quelque pou que y ayes fait ne t’i estre occuppee & que la delectacion qui tant t’en agree ne eusses Dont ne te dois tu pas tenir pour meseuree/ quant tu as entre les autres biens une des choses du monde qui plus te delite et te plaist a avoir/ C’est a savoir le doulx goust de science. Item se riche et garnie & sans tribulacion fusses demouree/ en delices te fusses nourrie/ lesquelles choses conduisent creature a plusieurs inconveniens/ Si n’eusses mie l’experience de congnoistre le monde/ et cause de tant le haÿr/ la quelle chose dieu veult/ Et par consequant ne fusses si savant/ car saches de vray que les riches que chascun agree non mie pour eulx/ mais pour le leur/ n’ont si grant cause de congnoistre les fallaces du monde ne lesquieulx sont leurs vrays amis comme ont ceulx qui les espreuvent et qui passent par adversitez Car il leur semble pour ce que le monde leur rit que il ne soit autre paradis et que il soit vray/ toy meismes as ouy mainte foiz dire a de yceulx riches/ qu’ilz vouldroient que dieu gardast son paradis et a tous jours les laissast en ce monde/ Or regarde a quel prejudice tournent les delices quant ilz ramainent la voulenté qui doit suivre raison a tele bestialité que elle ne use ne que une beste mue ne mais aux pastures basses/ & ne se lieve ne regarde a son propre lieu naturel qui est le ciel dont l’ame fourmee a l’image de dieu est venue et doit tendre a aler Et que il soit vray que les espreuves de tribulacion te soient prouffitables je me rapporte a toy que se dieu te ramenoit a un pou plus d’aise de prosperité que pour riens ne vouldroyes que tribulacion ne eusses essayee/ Or conclus en toy meismes et prens garde/ puis que ainsi est que a l’entendement & au bien de ton corps sont valables/ se a l’ame/ se bien en as usé plus sont proufitables/ Car dit saint augustin sur l’euvangile saint jehan/ Les tribulacions que dieu veult que tu ayes a souffrir en ce monde/ ce n’est pas peine de dampnacion/ ains est le flayel de correccion Et vous enfans de dieu estes appellez a l’eritage pardurable/ Et si ne daignez estre flayelez. Encore de ce mesmes. Apres il me semble que tu te plains Et dis que comme tu fusses choite es las de dure fortune tantost que tu fus vesve te assaillirent les mauvais par divers travaulx de plais & de plusieurs inconveniens que ilz te bastirent O ma chiere amie/ ce n’est pas de nouvel que les mauvais persecutent les ingnocens qui deffendre ne se scevent ou pevent/ mais non pourtant que ce soit a leur dampnacion/ yceulx persecuteurs/ se bien a ton utilité sceusses user des trais de leurs dars seroient les orfevres de ta couronne// Car dit saint jerome en l’epistre a ciprian que de tant comme creature humaine plus est afflicte par poissance d’ennemis & de cruauté/ et de tant plus croist la couronne de son loyer/ O folle qui plouroies par desconfort a ton foyer comme dit as ou temps de tes tribulacions/ helas & ainsi faisoies de ton prouffit ton dommage/ se par impacience estoit Car dit saint augustin/ beau filz se tu pleures gardes que ce soit soubz la correccion de dieu ton pere et non mie par impacience/ car la verge dont il te bat n’est mie punicion/ ains est signe que tu as part en son testament Car dieu t’envoioit ton mieulx et user n’en savoies Or regarde les beaulx enseignemens des sains docteurs/ car de tel viande te vueil je repaistre comme elle soit plus penetrant par aventure en ton entendement que force d’argumens ne seroit/ de quoy autre foiz usay en confort de creature humaine. ¶ Helas ne t’enseigna en ce pas ci saint gregoire ou .x.e livre de morales que tu devoies faire lors que il dit tieulx parolles/ de tant dist il/ que nous endurons pour l’amour de nostre dieu plus paciemment tribulacion de tant plus croist nostre esperance en lui/ Car la joye de retribucion pardurable ne peut estre cueillie se premierement n’est semee en affliccion/ Et escoute un beau vers de ses parolles. ¶ Les maulx qui ycy nous estraignent a aler a dieu nous contraignent. ¶ Et combien que ci devant t’aye dit/ et il est vray que cause n’eusses de si grant affliccion avoir selon le effait des choses comme tu dis que avoyes/ Toutevoyes puis que te reputoies mal eureuse tu l’estoies/ et c’estoit ce qui le te faisoit estre/ Car se toy meismes ne t’i reputasses ne le fusses mie/ Dont puis que maladie ta meismes reputacion te donnoit medicine/ Il couvient a quelque cause que le mal soit venus mais a celle fin que a de tes amies ou amis semblablement enformez/ ou a d’autres simples ou ignorens du coliege chrestien a qui ce vendra a congnoissance puisse mon remede estre valable/ le regime a garison prouffitable de tel maladie ne te sera par moy vee/ Et ancor voy que maistier en as/ et a propos que de pou te plaignisses. ¶ Escoute que dit Cassiodore sur le psaultier/ nous endurons dist il petites choses mais s’il nous souvenoit bien quel buvrage pour nous but en la croix de nostre seigneur qui a lui nous appelle/ nous avons matiere de pacience O creature se il est ainsi que tribulacion tu ayes receue ou reçoives/ Comment dieu t’a donné belle maniere de vivre se bien en scez user/ car tribulacion euvre l’oreille du cuer mainte foiz la ou mondainne prosperité la clot. Encore de ce. De ce que tu m’as dit/ que cheus en paroles de ce de quoy tu estoies ignocent dont tu te troubloies O chiere amie quelle gracieuse punicion dieu qui t’aime & n’est mie doubte que mainte fois l’as courroucié par divers pechiez Il te volt donner par te corriger en ce que tu n’estoies mie coulpable pour les pechiez muciez par aventure en conscience ou par effait en quelque maniere que commis avoies/ et ainsi mainte foiz le fait a creature Car en la chose dont n’est mie en coulpe la pugnist d’autres divers pechiez mais c’est grant purgacion pour cellui qui est persecutez de son innocence/ et les flaiolz des mauvais sont les instrumens de sa gloire/ Et de cessi dit saint gerome es morales ou .xx.e livre le tout poissant dist il seuffre en ce monde que les mauvais griefvent les bons/ a ce que par la forsennerie des reprouvez soit purgee de la vie des esleus/ Et n’est point a cuider que jamais dieu souffrist que les mauvais ainsi cruellement tourmentassent les non coulpables ou les bons se il ne veoit combien il leur prouffite/ Car quant les mauvais forcennent sur les non courpables Adont sont luisans les ignocens & purgiez & la perversité des mauvais plus redonde sur la perdicion de eulx O dieux et de entre vous qui passer voulez de delices en delices c’est a savoir des ayses de ce monde que vous desirez aux biens celestiaulx la quelle chose ne se peut faire. ¶ Escoutez que dit saint gregoire en une omelie quant je considere dist il job couché sus un fumier comme mesel/ Saint jehan baptiste mourant de fain en un desert/ saint pierre estendu en crois/ saint jaques decolé de herode/ Je pense comment dieu tourmentera a son jugement durement ceulx que il repreuve/ quant ycy presentement il afflict si durement ceulx que il aime et appreuve. ¶ Et entre vous mondains qui pensez en voz petites tribulacions que dieu vous ait oubliez Et que fortune vous persecute/ Pensez vous que il soit plus tenus a vous que a ses autres bons amis a qui tant laissa souffrir. ¶ Mais de ycelle souffrance escoutez que dit saint bernard en un sermon/ mes freres dist il nous sommes en ce monde ainsi comme en un champ de bataille/ Et pour ce qui ycy playez de tribulacion n’apperra ne recevra en l’autre la victoire de la couronne glorieuse/ O belle amie que cellui est sage & vray/ Bon mainnager ou celle/ qui toutes choses scet bien traire a son prouffit & bien en user soit de prosperité ou d’aversité/ mais comme les delices mondains soient plus fors a en user au prouffit de l’ame que les tribulacions nostresire pour bien de creature communement les envoie a ses mieulx amez/ Car nient plus ne lui cousteroit a envoyer prosperité que aversité/ mais soyez certaine que lui qui scet vostre fragilité le fait pour le meilleur de cil a qui l’envoye/ Car non obstant que vous en murmuriez par impacience souventes fois si estes vous plus actes en la voye de tribulacion a aler ou ciel que ceulx qui sont nourris es grans delices/ et que il soit vray se mescroire ne voulez comme heretiques les saintes escriptures & les sains docteurs moult en avez de preuves/ Car se tu me dis que fortes sont a passer les tribulacions de ce monde & que elles dueillent griement. ¶ Helas escoute a ce propos que dit crisostome sus l’euvangile saint mathieu/ se aucun dist il repute la voye de ceste vie laborieuse pour les afflictions qui y sont il accuse sa parece/ Car se aux maronniers les floz de la mer & les tempestes et les gelees de l’iver aux laboureurs/ et les playes orribles navreures aux chevaliers/ Semblent estre legeres a porter pour l’esperance du gaing/ ou de l’onneur temporelle que ilz en attendent par plus forte raison nous doivent sembler aysiees les tribulacions de ce monde pour les quelles nous est promis paradis en loyer. ¶ Ha dieux & avec tout ce pensez vous point entre vous pecheurs que ayés desservi par maintes diffames ancore trop plus grant punicion que souffisant n’est de pugnir l’aversité que vous avez/ Et quant dieu selon sa misericorde amodere et adoulcist vers vous sa justice pour un pou au regart de voz maulx vous donner a souffrir/ n’estes vous bien tenus a lui/ Et a ce propos dit pierre de ravenne en une epistre/ dieu dist il te pugnist en ce monde a ce que la peine temporelle rachate tes ardeures de la mort pardurable/ Car ainsi que les pierres ne sont mises en edefice se premierement ne sont taillees & au martel acquerries ne le grain n’est point mis ou grenier tant que au fleau soit batu/ aussi ne peus tu estre logié en l’edefice de paradis ne mis ou guernier des esleus se tu n’es esprouvé par tribulacion. Encore de reconfort. Amie chere par ce que dit t’ay/ me semble que assez doit souffire au propos que au premier je promis te monstrer ton tort des grans reclaims que m’as fais de tribulacions que tu dis avoir passees n’estre si grandes que tu les poises/ & aussi que pour ton prouffit te sont premises se en toy ne tient. Assez me semble t’ay prouvé souffisamment/ mais sur le temps present ou quel tu dis ancores durer tes infortunes ou tu ne vois ne cognoiz voye de relachement/ Te respondray confondant pareillement tes oppinions en ce que tu ymagines. ¶ Et apres pour le temps avenir se croire me veulx tout ainsi comme le bon medecin quant il a curé son malade/ lui baille regime pour preserver sa santé & affin que il ne renchee/ te bailleray ordre et voie de estre conduite a la vraye felicité ou tout cuer humain doit tendre comme il n’en soit point d’autre/ Et premierement pour ce que tu ne congnoiz ton estat le te fere congnoistre/ te feray une demande Car par ce que de toy entens tu ne te tiens mie content de telle porcion que tu as de biens Et t’est avis que assez de autres abondent en superfluitez de choses dont escharceté as et souffreté/ Si te demande se tu congnoiz homme ou femme soit prince princesse ou autre des plus remplis des biens de fortune/ soit en seignourie/ estas honneurs et autres dignitez/ je te parle de la vie des mondains/ & en resserve les speculans nobles de entendement/ que tu voulsisses avoir changié ton simple estat & maniere de vivre/ la voulenté que tu as et l’amour et delit de estude que tu prens a ta vie solitaire pour avoir la cure & charge de tant de divers faisselz/ Et dame de conscience et l’ardeur de couvoitise & tout tel courage comme a le plus eureux & fust meismes converti ton corps foible & femenin en homme pour estre transmuee de condicions et de tout en cellui ou celle a qui tu reputes es biens mondains fortune plus propice/ adont respondis a la dame honoree/ dame a quoy me fais tu ceste demande/ ne scez tu que couvoitise tant ne me suppedite que pour tous les biens de fortune voulsisse avoir changié mon estre a cellui d’un autre pour toutes ses richesces/ O folle et comment peut estre que apres tele sentence tu te reputes mal eureuse et puis que mieulx te souffist ton estat que cellui de un tres poissant riche ne feroit/ pour le laissier donc te reputes tu plus riche c’est a savoir plus eureuse que le plus riche qui soit tant que touchent ses richesces/ Car comme toute chose tende tous jours a sa perfeccion/ se tu reputoies le plus riche plus parfaict que toy/ tu vouldroies doncques ton estre avoir au sien changié/ Et ainsi peus tu veoir que le mal ou le bien que les gens ont leur vient par cuider et par oppinion & non mie des choses/ Car cellui est riche qui plus ne couvoite/ et cellui est povre qui art en desir/ amie chiere ci n’as pas mauvaise cause/ or te souffise doncques l’estat ou dieu t’a appellee/ Et de ce que tu te complains de la charge de plusieurs parens que il te faut avoir/ prens la en pacience et fais ton devoir/ Car tout est pour ton merite/ & te resjouis en ce que ilz sont bons/ & espere en dieu comme dit le psalmiste et fais bien/ Car il ne te fauldra ja/ nature est de pou soustenue qui vit a la neccessité de nature il se sauve. Mais qui vit selon les supperfluitez de delices il se pert et dampne & accourse ses jours. Le reconfort de philosophie aleguant la sainte escripture. Mais pource que tu n’as pas ancore la mer de ton pelerinage toute passee te tendray de promesse verité sus l’enseignement de ton vivre. ¶ Tu qui felicité desires se parvenir y veulx viens a moy je te ouvreray la voye/ la quelle non obstant que toute soit plaine de tribulacions/ aler n’y peus par autre chemin et pour ce que entre les autres peines dures a souffrir semble entre vous mondains que injure et persecucion sanz cause receue de voz prochains soit a porter paciemment la plus fort chose fonderay l’entree de nostre oroison sur ce que dit a ce propos saint gregoire sur ezechiel/ tous les biens dist il que nous faisons sont nulz se paciemment nous ne endurons les maulx que recevons de noz prochains Et de ce nous donna exemple Jhesucrist qui plus souffry de son meismes peuple que autre homme ne pourroit souffrir. ¶ Mais bien dit voir grisostome/ quant sur l’epistre saint paul aux ebrieux il dist/ il n’est riens qui si grant confusion au persecuteur qui autrui persecute face que de endurer paciemment & forment ses injures/ et ne lui en rendre vengence en fait ne en parolle. ¶ De ce parla hue de saint victor ou .iii.e livre de l’ame/ grant vertu dist il est a cellui qui est blecié se il espargne cellui a qui il pourroit nuire Car c’est la plus noble victoire que homme puist avoir que de espargner par vertu cellui a qui grever pourroit. ¶ Et que les mauvais soient communement persecuteurs des bons/ ne fus pas repunante a ce que devant est dit/ quant je dis a mon amé boece que ceulx de nostre prophession desirent a estre haÿs des mauvais/ Car comme toute chose hee son contraire ne seront pas leurs hayneulx participans de leurs mauvaistiez. ¶ O gens mortieulx ce dit boece pour quoy la hors querez la beneurté qui assise dedens vous est ignorence vous deçoit/ car la pure vraye beneurté est avoir de soy meismes la seigneurie Car homme n’a si chere chose comme soy meismes Et ce ne lui peut fortune tolir/ Et affin que tu saches que es choses de fortune ne peut avoir felicité je te dy que felicité et beneurté sont les souverains biens de nature Et ce est raison et entendement & bien souverain ne peut estre perdus/ Et ces meismes paroles que je te dis pareillement dis a mon amé boece// Donques entre vous usez des dons de dieu et laissez aler ceulx de fortune/ et apprenez a seignourir vous meismes & adont ne vous seront tant grevez a porter les tribulacions pour l’amour de cellui pour qui le ferés. ¶ Car dit a ce propos saint gregoire ou .v.e de morales se la pensee de l’omme est adreciee en dieu par forte entencion/ quanqu’i est amer en ceste vie lui semble doulx/ & tout quanque afflict il repute repos. ¶ Ancore dit le benoit gregoire sur ezechiel dieu avec ses dons nous mesle ses fleaulx/ a ce que tout quanque mondainnement nous delictoit nous semble amer/ et affin que en noz courages un feu se alume de charitable pacience qui nous excite tous jours au desir du ciel. Et ainsi nous morde delitablement/ nous tourmente souefvement/ et qui nous contriste joyeusement Ha dist il ou premier de morales/ le benoit job quant dieu souffroit que il fust de l’ennemi frappez/ autant de voix de pacience comme il rendoit en ses tourmens autant de dars il regitoit contre son adversaire/ Et assez plus grans coups lui donnoit que il ne soustenoit. ¶ Et en ce dist il lui meismes est discernee la pensee juste de la pensee injuste Car la juste en tous estas et en toutes adversitez confesse la louange du tout poissant/ & l’injuste ne fait que murmurer. ¶ Et de ce dit saint ambroise sus le pseaume de _Beati inmaculati_/ En ce as tu le grant merite de pacience se toy existant subget aux tribulacions tu loes les jugemens de dieu/ se tu grevé de maladie tu rens graces/ et en quelque estat que tu soies plus afflict & tant plus prouffites. ¶ Que te diroye de la noble vertu de pacience se toy existant subget aux tribulacions/ tu loes les jugemens de dieu/ se tu grevez de maladie/ tu rens graces & en quelque estat que tu soyes plus afflict et tant plus prouffites. ¶ Que te diroye de la noble vertu de pacience/ c’est celle en toute somme qui est la maistre portiere de paradis/ et sanz qui les autres vertus ne tiennent lieu Et ce conferme Cassiodore sur le psaultier/ pacience dist il est la vertu qui vaint toutes choses non mie en combatant mais en souffrant non pas en murmurant mais en rendant graces C’est la vertu qui nettoie toute l’ordure de volupté & qui a dieu rent les ames cleres. Instruit philosophie a despriser les biens mondains. Et de ce que entre vous tant amez les assemblemens des richeces/ & tant vous traveillez pour ycelles m’en tairay je dont non feray Car combien que par aventure petit penetreront mes parolles es courages obstinez/ non pourtant viennent avant les notables au propos de leur vitupere/ lesquieulx le dit boece nostre amé recite en son livre de reconfort/ et les approuvons par l’escripture sainte en la maniere encommenciee/ et avisez quelle introite d’ycelles/ veulx tu dist il assembler peccune il couvient que tu la soubtrayes a qui que soit veulx tu avoir dignetez tu seras ou desdaing des envieux/ veulx tu surmonter les autres/ tu seras en peril de hayneux/ se tu montes en poissance/ la paour de decheoir ne te laira point/ veulx tu renommee avoir il te couvendra moult souffrir veulx tu delices/ tous ceulx te despriseront qui serf te verront a tes aises/ Et pour ce peus notter que ces voies ne font pas l’omme riche C’est a savoir assouvy. ¶ Escoute ancore ces propres parolles/ certes dist il les richeces n’estaignent pas l’avarice que l’en ne peut saouler/ ne la poissance ne fait estre seur cellui qui de lians est enchaennez/ Et quant povoir vient aux mauvais il ne les fait pas bons mais descueuvre et monstre leur mauvaistie dont veu ce que vous avez joye de mettre voz cures a choses qui autre sont que vous ne les nommez & que l’en peut assez reprendre pour ce que elles ne sont ne vrayes poissances ne vrayes dignitez/ Je puis conclurre de toute fortune que il n’y a chose qui a desirer face ne qui naturellement soit bonne quant tous jours elle ne se joint pas aux bons & que a ceulx a qui elle se joint elle n’est pas bonne. ¶ Et assez s’acorde a ceste sentence aristote quant ou livre de bonne et de male fortune dit que la ou est le plus grant engin et entendement n’est mie tous jours la meilleur fortune/ Et souvent avient que la ou fortune est plus propice n’est mie le plus grant entendement. ¶ Et ce est contre les arrogans qui presument d’eulx/ Et cuident que quant fortune leur est propice que ce soit pour leur grant savoir ou value/ mais comme l’experience du contraire nous soit magnifeste veons le plus des bons et de cler engin mal fortunez es biens mondains/ Et pource est voir le proverbe des lombars qui dit/ a fol aventureux n’a lieu sens/ mais dit boece que plus prouffite la male fortune que la bonne Car la bonne fait semblant de beneurté/ Et ainsi elle ment comme en ses biens n’ait beneurté/ Et la mauvaise est vraye en ce que elle monstre par soy changier que elle n’a point d’estat seur/ La bonne donques deçoipt & la mauvaise fait sage par l’usage de tribulacion/ Et certes Comme il dit les richesces ont donné nom a maint mauvais & sanz vertu/ Et pour ce cuident yceulx que il ne soit autre bien ne plus digne chose que avoir tresors pierres precieuses et grans seignouries/ O viles dignetez et poissances du monde que entre vous exaussiez jusques au ciel et ne savez qu’est povoir & vraye digneté/ & se mauvais vous a/ onques grant elevacion d’eaues ou de flames plus ne dalmagierent. ¶ Helas homme/ et se tu regardes ton corps/ tu ne trouveras pas plus foible chose/ Car le mors de un chien ou une mouche/ se elle entre dedens toy t’occist aucune foiz/ et de quoy peus tu qui tant te orgueillis avoir povoir sus autre/ ce n’est ou corps & es choses de fortune/ mais a force le cuer qui est franc & fort par le conduit de raison n’est mie en toy de mouvoir. Ci dit comment selon les diz de sainte escripture prosperité mondaine ne fait a priser. Et au propos ancore que dieux ait en reprobacion les mauvais riches & que les simples ne se doient esmerveiller se il leur seuffre avoir des biens temporeulz/ et consent que les bons soient persecutez Retournons aux saintes escriptures/ Car de ce dit Bede sur l’epistre saint jaques Ne soyez dist il point indignés se les mauvais flourissent en ce monde/ Et vous serfs de dieu avez a souffrir/ Car ce n’est pas de chrestiane religion estre exaussez en ce monde/ mais estre abaissiez/ & deprimez Les mauvais n’ont riens ou ciel ne vous riens en ce monde/ Et pour ce en esperance du bien ou vous tendez quelque chose que il vous aviengne en la voye de ceste vie vous en devez esjouir. ¶ Et ce tesmoigne saint gregoire en la .xl.e omelie sur les euvangiles/ qui dit ainsi/ cellui que dieu het il lui seuffre avoir prosperité en ce monde/ Et aussi retient il cellui que il aime soubz le frain de tribulacion Et de ce monstra bien exemple mon seigneur saint ambroise quant une foiz aloit par le pays & se volt logier pour la nuit en un hostel/ si appella l’oste/ Et ainsi comme il avoit de coustume lui demanda de sa fortune/ Le quel lui respondi que toute sa vie avoit flouri en honneurs & habondé en richeces ne onques ne estoit decheu ne en adversité maladie ne autre desplaisir/ mais tous jours lui estoient venus ses choses a souhaid/ Adont ces choses ouyes saint ambroise s’en parti/ et logier ne s’i volt combien que il fust nuit/ Et dit que continuee succession de temporelle prosperité n’est mie signe de estre amé ne esleu de dieu/ ains est signe de pardurable dampnacion. ¶ Viengne avant Seneque & die a nostre propos son dit. voy le ci en la .lxxxvii.e de ses epistres/ Se tu veulx avoir dist il la vraye extimacion de l’omme/ et savoir quel ou quen grant il est/ regardes le tout nu/ ostes son patrimoine oste ses honneurs & les autres mençonges de fortune et le regardes se tu peus non pas ou corps mais ou courage/ et la verras tu quel et com grant il est la saras tu se il est grant du sien ou de l’autruy. Conclusion des choses susdites & ancore de ce. N’avons nous mie assez prouvé qu’en richeces et honneurs mondains n’est pas felicité/ donques nous couvient tendre a la trouver/ mais comme en ce monde ne peut estre trouvee/ ancore treant a nostre propos dire nous en couvient/ si appert assez estre vray ce que dit boece/ Les choses n’ont pas honneur selons elles/ mais selons l’extimacion & opinion des gens qui le donnent et rostent comme il leur plaist/ Et donques puis que injustement se pevent tieulz honneurs donner je conclus que elles sont villes O donques vaine gloire/ ce dist il respandue en multitude de gens/ tu n’es autre chose fors enfleure d’oreilles/ Car on voit souvent louer par faulse oppinion de peuple ceulx qui n’ont mie en eulx le bien que on y dit/ Et ce ne peut estre sanz leur grant honte quant ilz sentent que ce leur fault dont ilz sont louez/ Et se il est ainsi que preudomme doye estre loué pour sa vertu/ que lui chaut quant il ne quiert pas la faveur du peuple/ mais la bonté de sa conscience/ Et se on tient belle chose avoir renommee/ aussi doit on tenir a laide qui ne l’a. ¶ Que diray je dist il des delices du corps quant on les quiert il donnent grant traveil/ quant on les a ilz tournent a ennuy/ quant on les a eues ilz engendrent enfermetez & tele est la paye de ceulx qui leur fin y mettent// Or est donques ainsi/ ce dist il que richeces honneurs/ royaumes/ seigneuries forces beautez et poissances ne donnent pas de felicité/ Car riens digne n’est de estre appellé felix comme dit est devant se il n’est perpetuel/ et comme teles choses ne le soient n’est pas cellui felix qui les a/ mais voy cy que il dit apres/ veulz tu savoir dist il la vraye felicité qui repaist l’ame et donne souffisance/ Or tourne ta force d’autre part/ si verras celle qui donne poissance gloire renommee & delit tout ensemble/ & ce est dieu autre chose ne l’est Sicomme ou dit livre de boece je prouvay par sa bouche/ et les fleurs de ycellui je ay cueillies et appliquees ycy a ton propos pour faire d’une sorte un gracieux chappel avec les dis des sains docteurs pour ton livre/ a la fin comme victorieux couronner/ Or viengnent les roses de la sainte escripture avec noz violettes et frappons ancore contre les arrogans du monde. ¶ Tu ce dit saint augustin qui tant aimes le monde pour quel loyer guerriez vous/ n’est ce pas vostre plus grant esperance que vous puissiés estre amis du monde. helas et quel bien est cestui au quel on ne peut venir fors par grans inconveniens. homme homme laissez perir toutes ces vanitez/ et te convertis a la seule inquisicion qui a gloire et n’a fin/ & qui est ce/ ce est seul dieu. ¶ Helas ce dist il ancore en une epistre/ ce monde ci plus est perilleux quant il se monstre souef/ que quant il se monstre moleste/ & plus a eschever quant plus attrait a soy amer. ¶ De ce meismes ancore dit sur l’epistre saint jehan le monde dist il est plain de tribulacions et voy cy comment chacun l’aime/ que seroit ce se il estoit paisible/ s’il estoit bel comment t’y appuyeras tu quant si lait & tant conturbez si fort l’embraces/ Et quant des espines ne peus retraire ta main/ bien cueilleroies des fleurs se elles y estoient. ¶ A ce propos dit saint gregoire en une omelie/ veez cy dist il le monde qui est en soy tout seq/ Et toutevoyes ancore flourist il en noz cuers par tout mort/ par tout plain de plour/ et par tout en desolacion/ nous sommes de tous costez ferus/ nous sommes de tous lez remplis de amertume/ Et toutevoyes de nostre avugle charnelle pensee et concupiscence nous aimons ces amertumes nous les suivons fuyant nous nous espinons a lui trebuchant/ et pourtant que il trebuche nous ne nous povons tenir avec lui sanz tresbucher. ¶ Mais dit saint bernard en un sermon/ A qui jhesucrist prent a sembler doulx/ c’est neccessité que lui semble le monde amer. ¶ Encore dist il sur quantiques/ ce monde est tout plain d’espines ilz sont en terre ilz sont en ta char/ & converser entre ces espines & n’y estre point blecié c’est de vertu divine et non pas de nostre fragilité. ¶ Mais de ce dit saint gregoire es morales ou .xxiii.e a ses esleuez qui vont a lui/ nostre seigneur a fait le chemin aspre a celle fin que tant ne leur plaise le repos de ceste vie en fourme de la doulceur du chemin que ilz ne se delitent plus a cheminer longuement que a tost venir au terme de leur repos/ & que tant ne leur plaise la voye que ilz en oublient leur propre pays/ C’est le ciel. Mais voy cy que il dit apres les cuers de esleus dist il qui attendent les joyes de paradis prennent cuer et force es adversitez Car de tant que croist plus la bataille de tant attendent ilz plus glorieuse victoire/ les desirs des esleus si prouffitent tant que ilz sont ainsi affermez es tribulacions comme le feu ardant que le vent rabat la flame/ et toutevoye le fait plus croistre et combien que il semble que estaindre le doye il le enforcist. Encore de ce mesmes. Or trayons au terme de nostre oeuvre au quel te desir a l’utilité de ton sens conduire c’est a savoir a la conclusion de la vraye felicité/ ou tu dois tendre comme nous ayons assez monstré par maint dignes preuves que sont faulces felicitez combien que la cure des choses morteles s’i traye/ n’est mie celle/ ains est celle qui a en soy bien parfaict & qui la plus ne peut desirer/ c’est dieu comme dit est/ car on ne peut penser riens meilleur de lui/ il couvient dont que son bien soit parfaict/ Car autrement ce dit boece/ et il est vray ne seroit il pas prince des autres biens/ Si avons dit ce dit boece & aussi nous l’acordons que felicité est souverain bien/ et tu vois que homme est beneureux quant il a felicité/ & felicité si est dieu/ dont est homme dieu quant il a felicité ainsi comme ceulx qui ont droiture sont droituriers/ & ceulx qui ont sapience sont sages Et ainsi ceulx qui ont divinité sont dieux/ & cil qui a felicité est dieu dont tous beneurez sont dieux/ mais par nature il n’est que un dieu et par participacion il en est moult/ Et ces parolles sont le propre texte du dit livre de boece en consolacion/ Or avons trouvee celle benoite felicité que desirer devons/ mais que ferons nous de celle felicité nous promet elle riens. ¶ Viengne saint gregoire en son omelie et le nous die/ veez le cy/ se nous considerions bien quelles et comment grans choses nous sont promises es cieulx/ nous reputeriens villes toutes les choses que nous pourriens avoir en terre/ Car toute la substance terrienne comparee a la souveraine felicité nous est plus a charge que a ayde/ la vie temporelle comparee a la vie eternelle est plus mort que vie/ Car le deffault de nostre cotidiane corrupcion n’est mais que une prolixité de mort Mais qui est ce qui peut raconter ne entendement comprendre com grandes sont les joyes de celle souveraine cité/ estre tous jours present es compaignies des anges avec les benois esperis/ estre assistant a la gloire de nostre conditeur/ veoir le visage de dieu & la benoite trinité face a face/ regarder sa lumiere incomprehensible/ n’avoir jamais paour de la mort/ & soy esjouir du don de perpetuité. ¶ De celle benoite trinité un petit parlons pour plus grant efficace selon les diz des sains docteurs/ et en elle vueil que soit terminee ton oeuvre qui te doint grace que ainsi soit a la fin ta vie/ Mais comment oseras tu entrer a la mediter toy povre miserable creature. ¶ Car dit saint augustin ou livre de la trinité que tout l’ost de pensee humaine n’est pas assez fort pour soy ficher en celle excellente lumiere pardurable se elle n’est bien purgee par justice de foy. Mais que plus soubtilment je t’en declarasse n’est neccessité. ¶ Car dit saint augustin ou sus dit livre que l’en ne peut plus perilleusement ailleurs errer ne l’en ne peut riens plus laborieusement querir/ ne l’en ne peut riens plus prouffitablement trouver que la benoite trinité du pere du filz et du saint esperit en unité de essence divine. ¶ Mais de ce dit il lui mesmes ou livre des paraboles de nostre seigneur parlant contre arrian/ nous veons dist il le souleil ou ciel courant luisant et chault/ aussi/ ces .iii. choses a le feu mouvement lueur et chaleur/ Se tu peus donques dist il faulx arrian devise l’une qualité de l’autre ou souleil/ ou ou feu/ Et puis si devise la trinité/ Et pour ce comme dit saint bernard en un sermon Trop enquerir de la benoite trinité c’est perverse curiosité/ fermement croire et tenir de la trinité ainsi que tient l’eglise et la foy catholique/ c’est seureté. ¶ Il est ce dit ancore saint augustin en un sermon plusieurs trinité/ c’est a savoir la trinité qui nous a fait/ la trinité qui nous deffait/ la trinité qui nous refait/ la trinité qui nous a fait/ c’est la trinité pardurable/ le pere/ le filz et le saint esperit. La trinité qui nous deffait c’est une trinité miserable Quelle est elle/ c’est non puissance/ ignorence/ et concupiscence/ et par ceste trinité miserable est deffaite nostre trinité raisonnable C’est a savoir memoire entendement et voulenté Car quant nostre ame se dechiet de la trinité pardurable/ la memoire chiet en non puissance l’entendement en ignorence la voulenté en concupiscence/ la trinité qui nous reffait/ c’est une trinité prouffitable/ foy/ esperance/ charité/ foy des articles des commandemens & des sacremens/ esperance de pardon de grace et de gloire/ Charité de pur cuer de bonne conscience & de foy non pas fainte. ¶ Mais veoir la benoite trinité ainsi que elle est c’est la vraye felicité seule & souveraine/ et non autre ou doit estre le terme et fin du desir de toute humaine creature/ a la quelle felicité te vueille conduire celle benoite trinité un seul dieu regnant ou siecle des siecles amen. Respont christine a philosophie & la remercie en la personne de theologie. Adont se tut la dame honoree/ et je commençay a ainsi dire/ O tres souveraine aministrarece de la pasture/ et du restorant medicinable qui ne garist pas tant seulement le malade par tribulacion navré/ mais lui rent vie force & vigueur par le doulx ongnement et liqueur de ton reconfort/ Toy philosophie l’armoire et corps de toute sciences/ lesquelles sont tes membres/ Je apperçois que il est vray ce qui est dit de toy sicomme saint augustin recite Car tu es toutes sciences et a tes amez te demonstres tele qu’il te plaist selon la voye que on te veulent enquerre & a moy simple de ta digne grace t’es monstré en fourme de sainte theologie pour repaistre mon ignorent courage le plus sainement a mon salu/ ne m’as pas fait comme a ta chamberiere/ mais mielx que tu ne promis/ C’est a savoir moy servie de tes plus prouffitables et dignes mes qui viennent de la table de dieu le pere/ dont te mercy C’est assavoir dieu qui est toy plus que ne saroie dire Et vrayement es tu toutes les sciences/ Car tu es vraye phisique/ c’est a savoir theologie en tant que tu es de dieu/ Car toutes les causes de toute nature sont en dieu createur/ Tu es ethiques/ car bonne vie et honneste que tu formes & apprens/ c’est a savoir a amer/ ce qui est a amer c’est dieu et le prochain/ & ce la toy theologie monstres tu en la science de phisique & de ethiques/ Tu es logique car la lumiere et la verité de l’ame raisonnable tu demonstres/ tu es politique Car tu apprens a bien vivre/ Car nulle cité n’est mieulx gardee que par le fondement et l’eaue de foy et de ferme concorde a amer le bien commun qui est tres vray et tressouverain/ c’est dieu de qui tu parles en la science en quoy a moy t’es demonstree/ c’est a savoir theologie. O theologie que je vueil louer dame en toy souveraine philosophie. Je congnois que quant homme apprent hors de toy/ se il lui est nuisible par toy il en scet la verité/ Se il lui est prouffitable aussi tu lui demonstres/ et quanque il ara peu apprendre ailleurs se en toy ne refiert/ tout sera parte de temps et ignorence/ Car tu es la sapience vraye/ ne autre chose n’est que toy en qui est trouvé ce que ailleurs ne peut estre c’est vraye felicité. ¶ Et ce tesmongne de toy saint gregoire ou prologue du livre des morales que tu as en publique ce de quoy tu peus nourrir les petis/ et de ce l’experience en ma personne le me tesmongne/ Et gardes en ton secret ce dont tu peus prendre les haulx entendemens en grant admiracion/ Car tu es ainsi comme un fleuve qui semble estre si pou parfont que un aygnel y prent pié/ Et si est si parfont que un elephant y peut nagier/ Merveilleux est ton fleuve sainte theologie qui si pou semble estre parfont a un aignel/ c’est a entendre a un bon simple qui y prent pié/ Et si est si parfont a un elephant orgueilleux/ c’est aux plus haulx entendemens qui a peine te scevent et non toute comprendre. ¶ Et pour ce dit bien le benoit saint jerome en l’epistre a sa bonne devote la vierge de mecriade/ use dist il de la leçon de theologie en lieu de miroir pour corriger ce que tu as en toy lait/ et pour garder ce que tu as en toy bel/ et te faire plus belle/ Car toy sainte theologie as un miroir qui monstre les ordures et les apprent a nettoyer. ¶ De toy et a ta louange de rechief dit le benoit docteur saint jerome qui tant cherement t’ama que ainsi comme les tenebres de la nuit point n’obscurcissent la clarté des estoilles du ciel Ainsi nulle mondaine iniquité ne peut obscurcir les ames qui sont appuyees au firmament de sainte theologie/ O dame sainte theologie/ tu m’as donné certaineté de ce que dit de toy le benoit saint gregoire ton docteur ou premier livre de morales que ta doctrine & sainte escripture aucune fois nous est viande aucune foiz nous est beuvrage en lieu plus obscurs/ lors est ce que elle nous est viande Car quant nous l’exposons c’est la viande que nous machons/ et quant nous l’entendons c’est ainsi comme la viande que nous avalons mais es lieux ou elle est plus clere elle nous est buvrage Car quant elle n’a besoing de exposicion/ nous la humons ainsi comme nous la trouvons// Dame que puis je dire de toy et du bien que tu m’as fait/ de la sainte viande de ton repast qui m’a rassadiee & fait congnoistre la ignorence de ma descongnoissance par quoy je congnoiz mon tort par ce que tu m’as conclus/ Si di que toy sainte theologie et divinité es une tres grasse viande qui contiens en toy toute delices ainsi comme la manne qui aux juifs plouvoit du ciel qui assavouroit en la bouche de chacun selon sa voulenté// Ainsi me depars de mon avision la quelle je ay partie sicomme en .iii. differences de .iii. pierres precieuses en leur proprietez/ la premiere est en fourme de dyamant/ le quel est dur et poignant/ et tout soit il cler hors oeuvre quant il est relié et mis en l’or il semble estre obscur et brun/ et toutefoiz ne se meut sa vertu qui est moult grande/ La seconde est le kamayeu en qui plusieurs visages et figures diverses sont empraintes/ et est son siege brun et l’emprainte blanche/ La tierce au rubis precieux cler et resplandissant et sanz nue obscure qui a proprieté de tant plus plaire comme plus on le regarde. Explicit le livre de l’avision de christine. Table des chapitres [Note: Cette table des chapitres ne figure pas dans l’original.] feuillet La premiere partie parle de l’image du monde et les merveilles que elle y vid. 1 1. Premierement dit christine comment son esperit fu transporté. 1 2. Ci dit l’ordre comment le dit ymage estoit repeus. 1 3. Comment christine fu transgloutie ou corps du dit ymage. 2 4. Comment elle se transporta de lieu en autre. 2 5. L’acointance que elle desiroit a avoir a une dame portant couronne. 3 6. La complainte de la dame couronnee a christine. 3 7. Ci devise la dame couronnee de son commencement. 4 8. Dit la dame couronnee de ses gestes. 4 9. Encore de ce mesmes. 5 10. Des bons et des mauvais gouverneurs de la dame couronnee. 5 11. Ci parle la dame couronnee du bon gouverneur que elle ot. 6 12. De .ii. nobles oyseaulx de proye. 8 13. Ci dit la dame couronnee des contens qui furent pour elle gouverner. 8 14. Ci se plaint la dame de ses Enfans. 9 15. Ci dit comment les vertus au monde sont emprisonnees. 10 16. Ci dit des vices qui queurent en general. 11 17. Du vent de perdicion qui cuert par la terre. 13 18. De la punicion des vices. 13 19. Encore de ce mesmes & complainte de la dame. 14 20. De ce mesmes. 15 21. Encore du vitupere des vices en general. 16 22. Piteuses paroles de la dame couronnee & recors de la sainte escripture. 17 23. Encore de sa complainte. 18 24. Des punicions des vices. 18 25. Encore de ce mesmes. 19 26. Encore de ce. 20 27. Encore de ce. 21 28. Encore de ce. 22 29. La fin de la complainte de la dame couronnee. 23 La seconde partie parle de dame oppinion et de ses ombres. 25 1. Ci dit de quoy ces ombres servoient. 25 2. Comment l’ombre araisonna christine. 26 3. Les choses que l’ombre disoit a christine. 27 4. Encore de ce mesmes. 29 5. Ci dit l’ombre les oppinions de philosophie sus le principe du monde. 29 6. Ancore de ce mesmes. 31 7. Les contre dis d’aristote aux autres philosophes. 33 8. Encore des oppinions. 34 9. De ce mesmes. 36 10. Encore de ce. 37 11. Ancore des oppinions des philosophes. 38 12. Cesse a parler des oppinions. 39 13. De l’ombre la poissance que elle a. 40 14. Encore dit de sa poissance. 41 15. Encore de ce mesmes & des seignouries. 42 16. Dit ancore l’ombre des choses que elle a faites faire. 43 17. Ce que l’ombre disoit des arquemistes. 44 18. Des nobles que l’ombre dit que elle deçoit. 46 19. Ce que l’ombre disoit des gens d’armes. 46 20. La fin de l’oroison de l’ombre. 47 21. Responce de christine a l’ombre. 48 La tierce partie parle de confort de philosophie. 50 1. Ce que christine dit a philosophie. 51 2. La complainte de christine a philosophie. 52 3. Dit christine de ses bonnes fortunes. 53 4. Entre a parler christine de ses males fortunes. 54 5. Encor de ce mesmes. 55 6. Balade. 58 7. Encore continue christine sa complainte. 59 8. Dit christine comment elle mua sa maniere de vivre. 59 9. Se plaint christine de jeunece. 60 10. Dit christine comment elle se mist a l’estude. 61 11. Le plaisir que christine prenoit a l’estude. 62 12. Se plaint christine de fortune qui lui osta ses bons amis. 63 13. Encore de ce mesmes. 63 14. Conclut christine sa complainte a philosophie. 64 15. Respont philosophie a cristine. 65 16. Le reconfort de philosophie. 66 17. Encore de mesmes. 67 18. Blasme philosophie christine de ce que elle se plaint. 69 19. Encore de ce mesmes. 70 20. Encore de ce. 71 21. Encore de reconfort. 72 22. Le reconfort de philosophie aleguant la sainte escripture. 73 23. Instruit philosophie a despriser les biens mondains. 75 24. Ci dit comment selon les diz de sainte escripture prosperité mondaine ne fait a priser. 76 25. Conclusion des choses susdites & ancore de ce. 76 26. Encore de ce mesmes. 78 27. Respont christine a philosophie & la remercie en la personne de theologie. 79 NOTES DU TRANSCRIPTEUR On transcrit le manuscrit «Français 1176» de la bibliothèque nationale de France, daté 1405-1406. L’orthographe, la ponctuation et l’usage des majuscules sont conformes à l’original. On a résolu les abréviations par signes conventionnels (de type Cõe pour Comme), ajouté accents, cédilles et apostrophes, et distingué entre i/j, u/v. On a introduit un nouveau paragraphe à chaque pied de mouche (¶), et mis systématiquement une majuscule en début et un point en fin de paragraphe. Les corrections figurant sur le manuscrit, réputées de la main de Christine de Pizan, ont été appliquées. On s’est permis également de corriger certaines erreurs manifestement dues au copiste. On a conservé la phrase en double «se toy existant subget aux tribulacions...» qui figure également en double dans le manuscrit 10309 de la bibliothèque royale de Belgique. *** END OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK 75554 ***